En effet, à peine la vague de froid et les pluies sans arrêt que la région a connues ses derniers mois sont passées et le retour du beau temps, les paysans sortent avec joie et dans une ambiance de fête pour débuter la cueillette des olives qui s'annonce prometteuse cette année. Ces dernières années, on a constaté l'intérêt que portent les gens à cet arbre légendaire et mythique, l'olivier. Un véritable retour à la source s'est produit dans la majorité des villages de la région kabyle, fait-on remarquer. Plusieurs huileries modernes et traditionnelles carburent dans plusieurs villages de la daïra de Boghni. Les sacs d'olives arrivent et s'entassent en plein air, attendant leur tour pour passer sous les meules. En Kabylie, l'olivier occupe largement les gens. Mouloud Mammeri écrivait à propos de l'olivier : «L'arbre de mon climat à moi, c'est l'olivier ; L'olivier, comme nous, aime les joies profondes, celles qui vont par-delà la surface des faux-semblants et des bonheurs d'apparat. Comme nous, il répugne à la facilité. Contre toute logique, c'est en hiver qu'il porte ses fruits, quand la froidure condamne à mort tous les autres arbres. C'est alors que les hommes s'arment et les femmes se parent pour aller célébrer avec lui les rudes noces de la cueillette. Il pleut, souvent il neige, quelquefois il gèle. Pour aller jusqu'à lui, il faut traverser la rivière et la rivière en hiver se gonfle. Elle emporte les pierres, les arbres et quelquefois les traverse. Mais qu'importe ! Cela ne nous a jamais arrêtés ; c'est le prix qu'il faut payer pour être de la fête. Le souvenir émerveillé que je garde de ces noces avec les oliviers de l'autre côté de la rivière – mère ou marâtre selon les heures – ne s'effacera de ma mémoire qu'avec les jours de ma vie.»