L'écrivain Mouloud Mammeri parle avec amour des oliviers. Voici ce qu'il disait de cet arbre, dans un entretien avec Jean Pélégri romancier et poète français né en Algérie. « L'arbre de mon climat à moi, c'est l'olivier ; il est fraternel et à notre exacte image. Il ne fuse pas d'un élan vers le cielcomme vos arbres gavés d'eau. Il est noueux, rugueux, il est rude, il oppose une écorce fissurée mais dense aux caprices d'un ciel qui passe en quelques jours des gelées d'un hiver furieux aux canicules sans tendresses. A ce prix, il a traversé les siècles. Certains vieux troncs, comme les pierres du chemin, comme les galets de la rivière dont ils ont la dureté, sont aussi immémoriaux et impavides aux épisodes de l'histoire ; ils ont vu naître, vivre, et mourir nos pères et les pères de nos pères. A certains on donne des noms comme à des amis familiers ou à la femme aimée (tous les arbres sont chez nous au féminin) parce qu'ils sont tissés à nos jours, à nos joies, comme à la trame des burnous qui couvrent nos corps. Quand l'ennemi veut nous atteindre, c'est à eux tu le sais, qu'il s'en prend d'abord. Parce qu'il pressent qu'en eux une part de nous gît… et saigne sous les coups. L'olivier, comme nous, aime les joies profondes, celles qui vont par-delà la surface des faux-semblants et des bonheurs d'apparat. Comme nous, il répugne à la facilité. Contre toute logique, c'est en hiver qu'il porte ses fruits, quand la froidure condamne à mort tous les autres arbres. C'est alors que les hommes s'arment et les femmes se parent pour aller célébrer avec lui les rudes noces de la cueillette. Il pleut, souvent il neige, quelquefois il gèle. Pour aller jusqu'à lui, il faut traverser la rivière et la rivière en hiver se gonfle. Elle emporte les pierres, les arbres et quelquefois les traverseurs. Mais qu'importe ! Cela ne nous a jamais arrêtés ; c'est le prix qu'il faut payer pour être de la fête. Le souvenir émerveillé que je garde de ces noces avec les oliviers de l'autre côté de la rivière - mère ou marâtre selon les heures - ne s'effacera de ma mémoire qu'avec les jours de ma vie ». L'olivier est considéré comme un arbre sacré en Kabylie, l'oléiculture tient une place prépondérante dans la région et fait vivre de milliers de familles. Et portant l'Algérie n'a reconnu que tardivement l'oléiculture comme composante d'une stratégie alternative pour la réduction de la facture alimentaire. Aujourd'hui l'Algérie veut accroître les surfaces consacrées à la culture de l'olivier, pour couvrir les besoins en huile du marché local mais aussi pour exporter. Notre pays ambitionne de porter à 500.000 hectares d'ici 2014 la surface consacrée à la culture de l'olivier. Le secteur est déjà en pleine expansion puisque la superficie consacrée à l'olivier est passée de 165.000 hectares en 2000 à 300.000 aujourd'hui, ce qui représente un tiers de la superficie arboricole. Cette croissance a permis de passer de 100 plants à l'hectare en 2000 à 400 en 2008. Avec plus de 32 millions d'oliviers répartis sur 100.000 exploitations oléicoles, le pays a produit en moyenne, sur la dernière décennie, 35.000 tonnes d'huile d'olive annuellement, contre 19.000 tonnes en 1997. Il vient même de battre son record lors de la dernière campagne 2008/2009 avec une production de 56.201 tonnes. L'Algérie se situe désormais à la cinquième place au niveau méditerranéen après l'Espagne, l'Italie, la Grèce et la Tunisie. Nous consommons annuellement 500.000 tonnes d'huiles, dont 10% d'huile d'olive. En d'autre terme, notre production ne couvre même pas notre consommation, alors que la Tunisie et le Maroc placent près de 30% de leurs productions respectives sur le marché mondial. Notre pays dispose d'atouts indéniables, mais il devra relever un certain nombre de défis, tels que la croissance de sa production et de ses capacités de transformation et de conditionnement, l'amélioration de la qualité de son huile par l'instauration d'un label, une organisation professionnelle de la filière oléicole et une amélioration de son organisation à l'exportation. Contrairement à celle du voisin de l'Est, la filière huile d'olive de l'Algérie accuse un retard de développement en amont et en aval. La sécheresse et les incendies de forets dans certaines régions du pays n'ont pas été les seuls responsables de ce retard. La culture de l'olivier et le savoir-faire dans ce domaine ont été perdus. Les structures d'appui font défaut de façon dramatique. L'absence de laboratoires spécialisés, d'unités de conditionnement, mais également la non-maîtrise du processus complet, font que l'huile d'olive algérienne ne peut rivaliser avec les productions des pays concurrents malgré sa qualité indéniable.