Pour obtenir le certificat de qualification, des entreprises louent les diplômes de jeunes universitaires qu'elles recrutent le temps de décrocher un projet. Les pouvoirs publics semblent tout ignorer de ces pratiques. Afin d'obtenir un certificat de qualification, certains chefs d'entreprises de réalisation recourent à des moyens détournés, tant ce document est indispensable. En effet, le certificat de qualification est nécessaire à chaque dépôt de dossier de soumission aux projets. En plus des nombreuses astuces qu'utilisent les gérants de ces entreprises, ces derniers vont jusqu'à « louer » les diplômes de jeunes universitaires. Les fameuses attestations, d'une validité de 3 ans, sont remises par le comité de wilaya de délivrance de certificats de qualification, selon le décret 93-289 du 28/11/1993, modifié et complété par le décret 05-114, et la notation 947 du 03/12/2005 qui gèrent les secteurs de l'hydraulique, le bâtiment et les travaux publics. Les paramètres concernent généralement l'effectif de l'entreprise, les moyens matériels qui peuvent être personnels ou loués, le chiffre d'affaires approuvé, le nombre et les intitulés des réalisations faites auparavant et surtout l'encadrement. De 10 à 20 % de l'ensemble des travailleurs doivent avoir une aptitude officielle dans le domaine. Tout atout est noté suivant un barème et le nombre total des points détermine le niveau de la qualification de l'entreprise, allant de 1 à 4. Tour de vis administratif Des observateurs trouvent que les autorités concernées sont plus sévères dans l'application de ces lois depuis le séisme qui a frappé à Boumerdès en mai 2003. Une opinion à laquelle le secrétaire général de la wilaya, qui est aussi le président du comité de délivrance de qualifications pour les entreprises n'adhère pas. Pour ce responsable, le premier objectif de cette démarche est d'absorber le taux de chômage. Un but qui n'est pas évident puisque les entrepreneurs proposent aux nouveaux diplômés en génie civil, en urbanisme et en travaux publics de 2 à 3 mois de salaires sans que ceux-ci se présentent à leur lieu de travail. Pour ce qui est des rémunérations, celles-ci sont de pas moins 20 000 DA/mois, voire plus. Cela dépend des négociations et du degré du diplôme (BTS, DEUA, Ingénieur). « Il (l'entrepreneur, ndlr) m'a dit clairement que je pouvais rester à la maison et qu'il est prêt à me verser régulièrement mes paies », témoigne un ingénieur en génie civil qui a loué son diplôme et qui a requis l'anonymat. « D'autres diplômés de ma promotion ont fait la même chose que moi », ajoute notre interlocuteur, convaincu que c'est la seule solution vu le manque de travail. « Un entrepreneur m'a demandé de lui louer mon diplôme de TS en urbanisme et j'ai refusé. Il m'a alors fait comprendre que personne d'autre ne m'embauchera parce qu'il connaissait tous les chefs d'entreprises », raconte un autre. Recrutements fictifs Questionné à ce sujet, le SG de wilaya semble ne rien savoir de ce phénomène. « Il est du ressort de l'inspection du travail de veiller sur les employés de ces entreprises », nous dit-il. Selon lui, si jamais il s'avère qu'une entreprise utilise ces méthodes, « la qualification de cette dernière sera confisquée définitivement ». Mais il est difficile de prouver ce genre de pratiques. Certaines entreprises et bureaux d'études sont moins directs avec les diplômés. Ces derniers sont recrutés le temps que les sociétés se procurent, grâce à leurs diplômes, une qualification et/ou un projet d'envergure. Durant cette période, ces ingénieurs font le travail de coursiers au sein de ces entreprises. Pourtant, le SG de la wilaya se dit être souple avec les entreprises et ceci « afin de les promouvoir ».Par ailleurs, les ingénieurs qui sont réellement recrutés se voient dédaignés dans leur travail. Ils sont parfois obligés d'approuver des réalisations qui n'ont rien à voir avec les normes de construction. Beaucoup optent pour la création d'une association de professionnels de ce domaine pour lutter contre ce mépris et aussi arrêter la pratique de la location des diplômes.