Monsieur et distingué Président, Je suis victime d'un déni et d'une privation des droits que la Constitution garantit pourtant à chaque citoyen d'un Etat de droit. Dans mon cas, comble du comble, ce sont précisément des institutions de la République chargées de veiller au respect de la loi et de sa juste application, en l'occurrence tribunal, parquet et ministère, qui me privent à ce jour de la jouissance de mes droits constitutionnels de citoyen. Voici les faits avérés et vérifiables à tout moment. Le 16 septembre 2007, je dépose un dossier complet pour créer un hebdomadaire, «JV, le journal du week-end». Ce n'est que le 2 décembre 2007 que le bureau d'ordre du tribunal de Bir Mourad Raïs accepte enfin de recevoir mon dossier et en accuse réception par simple cachet humide sur ma demande. Ceci est une première violation de la loi n°90-07 portant code de l'information. Cette loi stipule en son article 14 : «L'édition de toute publication périodique est libre (….). La déclaration est enregistrée auprès du procureur de la République du tribunal territorialement compétent. La déclaration est faite sur papier timbré, signée par le directeur de la publication. Il lui sera délivré, sur le champ, un récépissé.» Malgré l'insistance de mon avocate, maître S. Halouane, ce tribunal territorialement compétent a régulièrement refusé de me délivrer «sur le champ» ce récépissé comme l'y oblige explicitement la loi. C'est une première violation flagrante de la loi. Pis, ce même tribunal se dessaisit de mon dossier pour le transmettre au parquet général, ce qui n'est nulle part exigé ou suggéré par la loi. C'est une deuxième violation de la loi. A son tour, le parquet général s'en lave les mains en se déclarant incompétent à délivrer ce récépissé à mon deuxième avocat, maître E. Guehria. Il fait pire que le tribunal territorialement compétent. Il transmet à son tour mon dossier au ministère de la Justice, le 8 mars 2008, où il est toujours à l'étude, me dit-on régulièrement. C'est une troisième violation flagrante de la loi. Le ministère de la Justice me demande actuellement de revenir dans deux mois, juste après les élections. En quoi un droit citoyen est-il asservi à une échéance électorale ? Du jamais vu… Monsieur le Président, premier magistrat du pays, Est-on dans un Etat de droit quand un petit récépissé qui aurait dû m'être délivré en 8 minutes ne l'est toujours pas 18 mois plus tard ? Est-on dans un Etat de droit quand la justice est rendue à l'encan : au moins 5 récépissés ont été délivrés bien après le dépôt de mon dossier ; qui sur le champ, qui en quelques heures ou quelques jours. Mon dossier est souffrance depuis 18 mois. De quel droit le ministère de la Justice s'arroge-t-il le droit et les prérogatives de décider de la création d'un journal ? Aucune réglementation connue ne lui confère ou délègue cette mission. En bloquant ainsi mon dossier, il s'installe dans l'illégalité la plus totale. C'est la quatrième violation de la loi. Par ailleurs, je sais gré à tous les acteurs apparents et de l'ombre et les remercie vivement d'avoir condamné mon journal avant même de le lire, avant même qu'il naisse. Ils m'offrent la dernière motivation de rassembler les 60 numéros que je n'ai pu publier, pour les sortir autrement, sans récépissé, en un seul volume, en une seule colère : Poutakhine. Il sortira bientôt pour dire, en 500 pages, toutes les hérésies, toutes les hogras, tous les dénis et toutes les stupidités d'une république sous bananière et de ses servants, servis et serviles. Je publierai Poutakhine sans récépissé, dans un pays où le garde des Sceaux n'est pas un garde des sauts de droits ni un garde de sots. Très haute considération, Monsieur le Président, accompagnée aussi des profonds sentiments d'un citoyen atteint mais encore et toujours debout.