La pénurie d'eau d'irrigation, le manque d'organisation du marché et l'absence d'unités de conditionnement et de structures de commercialisation pénalisent les fellahs. Le plan national de développement de l'agriculture, lancé il y quelques années, et les efforts consentis par tous les intervenants du monde agricole, boostés cette année par une pluviométrie exceptionnelle, commencent à se manifester à travers toutes les communes rurales de la wilaya de Biskra. En effet, une lecture du bilan des récoltes, réalisées dans cette wilaya durant les trois dernières années, laisse apparaître une augmentation des quantités produites et une nette expansion du secteur de l'agriculture qui ouvre des perspectives prometteuses et annonce des jours fastes pour les agriculteurs et tous les exploitants de la terre. La wilaya de Biskra, où la datte trouve le climat et les conditions idéales pour croître en luxuriantes palmeraies, compte plus de 4,5 millions de palmiers dattiers, dont environ 2,5 millions sont productifs. Oléacées aux fruits comestibles, fournissant une excellente huile après pression, et dont le bois est aussi utilisé en ébénisterie, l'olivier, arbre sobre et généreux, parfaitement adapté au climat semi-aride de la région, est l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics. D'importantes oliveraies sont localisées à Aïn Zaâtout, dotée d'un pressoir ancestral dont l'huile jouit d'une réputation sans faille, à Sidi Okba et El Kantara, tandis que dans les zones phoenicicoles, telles Tolga, Leghrous, Bordj Ben Azzouz, Lioua ou Lichana, où des réticences psychologiques à s'investir pleinement dans la culture de l'olivier, semblent freiner son développement. 2 000 hectolitres d'huile en 2008 Les oliveraies, dont la superficie est passée de 1 786 ha, en 2007, à plus de 3 140 ha actuellement, enregistrent, néanmoins, de bonnes performances. En effet, l'olivaison de l'automne 2008 a permis de récolter 154 742q d'olives et de produire plus de 2 000 hectolitres d'huile d'olive, alors qu'en 2007, seulement 13 427 q d'olives avaient été récoltés. Abdelkrim Touba, 42 ans, propriétaire de palmeraies à Lichana, expliquera que les palmiers et les oliviers ne sont pas incompatibles, mais qu'il est nécessaire de les éloigner les uns des autres, car leurs systèmes radiculaires peuvent se parasiter. S'inquiétant de la pénurie d'eau d'irrigation qui touche sa commune, il dira : « L'assèchent en été des sources de Aïn Sabbat, Aïn Mihoub et Aïn Si Saâda, le vieillissement de centaines de stipes qu'il faut remplacer et l'apparition de vers blancs dans les tomates m'inquiètent bien plus que le fait de m'investir dans la culture des oliviers ». En connaisseur du domaine agricole, il ajoutera : « Avec 10 ha de terre à Dekhila, un prêt de 150 unités, une bonne variété d'oliviers et une petite oliverie, je suis sûr de réussir dans ce créneau, mais il y a déjà fort à faire avec les palmiers ». Ce jeune fellah, affichant un amour sans partage de la terre et des palmiers, se connectant à Internet pour visiter des sites consacrés à la botanique, n'éprouve aucune tendresse pour les fonctionnaires des services agricoles des communes qu'il accuse d'être « en deçà du défi à relever par l'agriculture algérienne », ajoutant que « les bureaucrates sont loin des agriculteurs » et que « ceux-ci se débattent seuls face aux multiples problèmes ». Par ailleurs, notre interlocuteur relève et dénonce le manque d'information, l'absence de formation et de toutes autres formes d'aides. Des prix dérisoires En ce qui concerne les céréales, 800 000 q de blé dur et tendre, d'orge et d'avoine ont été produits par la wilaya de Biskra sur une superficie de 47 000 ha, dont la moitié est équipée d'un système d'irrigation par aspersion et de goutte-à-goutte et l'autre moitié par les eaux des oueds et des pluies. Par ailleurs, une récolte exceptionnelle de plusieurs variétés d'abricots à Sidi Okba, Djemorah, Béni Souik, El Kantara et surtout à Loutaya dans la zone de Mekinet, exploitée par des universitaires anciennement chômeurs, est signalée. Seulement, dattes, olives et abricots subissent les mêmes aléas et les mêmes difficultés. « Ces fruits pâtissent d'un manque d'organisation du marché et de l'absence d'unités de conditionnement et de structures de commercialisation », disent de nombreux fellahs se plaignant d'être « trop souvent, contraints de céder leurs produits agricoles à des prix dérisoires, avant qu'ils ne se gâtent, aux intermédiaires qui gagnent deux fois plus que nous », font-ils remarquer. Ils plaident pour la réactivation de la fête des abricots qui se tenait annuellement à Béni Souik et qui permettait de mettre en contact les producteurs, les revendeurs et les clients affluant de partout. Cette fête était l'occasion pour les femmes de la région d'exposer tous les produits fabriqués à base d'abricots, tels que confitures, jus, gelées, tartes et fermess (abricots séchés) utilisés à la place de la tomate dans les potages et les plats cérémoniaux d'antan.