Rassemblées, hier, au complexe Mizania, à l'initiative de l'association des sages-femmes de Constantine, qui a marqué un point d'honneur à célébrer la journée mondiale de la sage-femme, des dizaines de représentantes de ce corps ont profité de cette opportunité pour crier leur ras-le-bol mais aussi leur ferme détermination à poursuivre leur sacerdoce. Un engagement solennel réitéré par Sakina Benidir, la chef de file de cette association, qui semble plus que jamais, et farouchement, déterminée à poursuivre la politique de terrain engagée en faveur de cette frange de la population féminine, laquelle se retrouve parfois confrontée à l'hostilité de la famille, des proches et, en fait, à tout un environnement. Leïla Azaza, vice-présidente de l'association des sages-femmes, abondera dans ce sens en disant qu'il ne fait pas bon se trouver du mauvais côté de la barrière. En d'autres termes, il ne faut pas s'inscrire hors « normes ». Autrement, il leur sera difficile de trouver une écoute ou un accompagnement spécialisé devant leur permettre de surmonter sans trop de dommages le carcan rigide et les règles ultra-strictes tracées par un microcosme miné par les non-dits, les contradictions et un certain nombre de tabous, toujours aussi présents et vivaces malgré une apparente évolution des mentalités et le regard « bienveillant » porté sur la contraception et les politiques de limitation des naissances prônées par les instances de la santé et mises en application au niveau des structures de proximité du planning familial. A ce propos, d'après une source de la direction de la santé et des populations de la wilaya de Constantine, 18 000 femmes ont figuré durant l'année 2008 au registre des consultations prénatales contre 1700 seulement au rayon des consultations postnatales. Diversement analysé et commenté, sans pour autant que des réponses rationnelles aient été apportées, ce décalage important entre consultations prénatales et postnatales n'a pas, à ce jour, apporté de réponses plausibles et fiables. Zahia Zibouche, l'une des doyennes du corps des sages-femmes, estime pour sa part que ces comportements font partie des zones d'ombre d'un environnement qui continue à manifester son hostilité à tout ce qui sort des us et coutumes en vigueur. Et dans un tel contexte, s'insurge la présidente de l'association des sages-femmes, il est difficile de porter secours à celles qui sont en détresse, voire en danger de mort s'agissant des femmes, voire de toutes jeunes filles pommées, en proie non seulement à une immense déprime mais le plus souvent aussi à des pulsions suicidaires nées d'une grossesse hors mariage. Comment apporter une aide efficace quand, de surcroît, l'association ne dispose pas d'un siège pouvant servir de cellule d'écoute ou de lieu de consultation à ces « marginales » qui n'ont parfois que leurs yeux pour pleurer et l'option du suicide pour celles qui ne trouvent plus la force de régler leur problème. Partant de cette carence tout à fait inadmissible dans une société qui se dit magnanime, ajoute notre interlocutrice, les réunions se font tantôt au domicile de l'une, tantôt à celui de l'autre. Tirant leur foi et leur force de cette adversité qui dit malheureusement son nom, les membres de cette association ne baissent pas pour autant leur garde et continuent un combat qui s'apparente à la lutte du pot de fer contre le pot de terre. Sur un autre registre, notons à titre indicatif que près de 27 % de la population algérienne, soit environ 300 000 couples, connaît un problème de fertilité et vit de ce fait un véritable drame. S'il existe des centres de procréation médicalement assistés, il n'en demeure pas moins vrai, nous dit-on, que le coût global du traitement peut atteindre la bagatelle de 150 000 DA, alors qu'un seul cycle de traitement tourne autour de 80 000 DA. Ce qui est loin d'être à la portée de toutes les bourses. A noter enfin que cette démarche connaît un taux de réussite estimée à 33 %.