Ainsi donc, ce village semble être laissé-pour-compte par les pouvoirs publics depuis l'indépendance. Délaissée et abandonnée, cette localité vit en marge du temps. De prime abord, la seule et unique route desservant cette bourgade, laisse vraiment à désirer, puisqu'elle est dans un état de délabrement très avancé dans la mesure où les automobilistes qui s'y aventurent pour emprunter ce tronçon arrivent trop souvent à faire face à un véritable cauchemar. Ce réseau routier est plein de nids-de-poule. Autrement dit, cette route est difficilement carrossable d'autant plus, qu'il est très pénible de l'emprunter même à pied. En cours de route, la fresque éblouissante du Djurdjura, juste devant nos yeux, à 25 kilomètres du chef-lieu de daïra des Ouadhias, nous invite à nous lancer vers l'aventure. Mais hélas, la beauté de la nature reste en jachère d'autant plus que cette région aux potentialités touristiques inestimables, reste inexploitée pour ne pas dire abandonnée totalement. En effet, devant l'absence remarquable des infrastructures de base, de nombreux habitants de cette contrée ont opté pour l'exode afin de fuir les affres de la nature. Et pour cause, les conditions de vie dans cette contrée sont rudes, notamment durant la période hivernale. «Ici, la vie devient infernale surtout pendant la neige qui fait sombrer le village dans l'isolement parfois plus d'un mois. Et pour y faire face, les villageois prennent toujours leurs précautions à l'avance», nous dira M. Hamouche Bouchama, président du comité de village qui ajoute «nous nous approvisionnons en gaz de butane à partir des Ouadhias, soit à une vingtaine de kilomètres d'ici. L'Etat ne pense jamais à alléger les souffrances des habitants de notre village», déplore-t-il. Le tableau est noir. Durant la période des pluies, les écoliers ne partent pas à l'école. Ils restent cloitrés à la maison car, l'hiver est rude. La galère de ces riverains est indescriptible dans la mesure où leur bourgade est carrément oubliée, disent-ils, aussi bien par les responsables de la commune que par les services de la wilaya de Tizi Ouzou. Le problème le plus épineux est l'évacuation des malades durant les intempéries. «Il y a eu, d'ailleurs, le décès d'une vieille parce qu'elle n'a pas été évacuée vers l'hôpital à temps, à cause de la neige. Durant l'hiver, notre village étant coupé du reste de la planète, on transporte nos malades, par la force des choses, à l'aide de brancards de fortune», fulmine un vieux rencontré au niveau du siège de l'association du comité de village. Aussi, Les collégiens vivent le calvaire. Ils sont ainsi contraints de faire une trotte chaque jour pour rejoindre leurs classes, étant donné que leur CEM est située loin du village. «A l'exception de l'éclairage public et la réfection du captage de la source d'eau, l'APC nous a absolument rien fait. Même l'eau devient une denrée rare chez nous à partir de la période des chaleurs. Donc, on procède toujours à la méthode du rationnement par foyer pour permettre à tous les villageois d'en bénéficier», ajoute notre interlocuteur. Le manque apparent de transport pénalise ces riverains. C'est ce que l'on peut constater en se rendant dans la région. On peut attendre jusqu'à une heure de temps, même plus, pour voir un fourgon se présenter à l'arrêt. D'autre part, pour ce qui est du volet jeunesse, la bourgade ne dispose d'aucun foyer susceptible d'accueillir et de sensibiliser la masse juvénile laissée à l'abandon. Le village ne dispose pas également d'une salle de soins, ni d'agence postale. De ce fait, les riverains sont contraints de faire plusieurs kilomètres pour une simple injection. Le chômage ronge notamment la classe juvénile dans cette région. «Faute d'emploi stable dans mon domaine, j'ai préféré de me consacrer à l'élevage pour assurer le minimum de mes besoins. J'ai fait un tas de dossiers pour prétendre à un poste de travail à Tizi Ouzou ou bien ailleurs, mais sans résultats. Toutes mes démarches ont été vaines», nous a expliqué un jeune ayant le diplôme de licence en finances. Après des décennies d'attente et de marginalisation, les citoyens d'Aït Oulhadj espèrent seulement un geste salutaire des pouvoirs publics afin de sortir des sentiers battus. C'est pour cela qu'ils ne cessent continuellement d'interpeller les pouvoirs publics. «Notre village est naturellement isolé du chef-lieu de la commune d'Agouni Gueghrane, donc, de fait, la nature nous a désavantagé. En plus, les dirigeants de notre commune ignorent carrément l'existence de notre village. Ils n'ont rien prévu dans le sens de désenclaver notre bourgade», écrivent les membres du comité de village d'Aït Oulhadj dans une requête adressée au wali de Tizi Ouzou. Ils dénoncent, à travers leur missive, le favoritisme des responsables de l'APC. «Il y a plusieurs délégations officielles, même celles du ministère de l'Agriculture, qui se sont rendues dans notre localité mais rien n'a été fait dans le sens d'améliorer notre quotidien. Même les projets du PPDR octroyés à notre village sont tombés à l'eau. Les responsables de la Conservation des forêts de la wilaya de Tizi Ouzou nous ont suggéré de constituer un autre dossier dans le cadre du PPDRI, plan de proximité de développement rural intégré», nous a souligné encore M. Bouchama. En somme, devant l'absence des aides de l'Etat dans cette bourgade à la beauté inénarrable, les citoyens ressuscitent l'esprit de solidarité pour se prendre en charge. En mettant sur pied un comité de village actif, les riverains décident de prendre leur destinée en main. Les actions entreprises, jusque-là, permettent, un tant soit peu, d'améliorer le cadre de vie de la localité. Des volontariats sont périodiquement organisés. Enfin, poursuit le président dudit comité : «Notre village est sinistré. A l'ère de l'Internet, chez nous, à Aït Oulhadj, même le réseau de la téléphonie mobile n'existe pas.»