Ghaza. De notre correspondant En l'espace de trois jours, deux accidents ont causé la mort de 8 citoyens, la blessure de 9 autres, alors que 6 sont toujours portés disparus. Le premier accident, le plus meurtrier, a eu lieu dans un tunnel dans lequel se pratique la contrebande de carburant – essence et gasoil. Israël en a interdit l'entrée dans la bande de Ghaza depuis plus de deux années, juste après le coup de force du mouvement Hamas en juin 2007. Suite à une fuite d'essence, un grand incendie a transformé le tunnel en fourneau. Les cadavres de 7 ouvriers calcinés ont pu être retirés du tunnel après toute une journée d'efforts des équipes médicales et de la Protection civile. Les blessés, au nombre de 9, ont été admis à l'hôpital Abou Youssef Ennajar, à Rafah. Ils souffraient de graves brûlures. Ayman est l'une des victimes du tunnel de la mort. Parti vivre en Cisjordanie avec sa famille depuis 8 ans, il a été refoulé par les autorités israéliennes vers la bande de Ghaza, où il vivait chez ses oncles depuis trois ans. Selon l'un de ses proches, le jeune Ayman au chômage avait travaillé durant quelques mois à l'ouverture du tunnel et aidé à faire sortir les produits. Voyant que l'aventure à l'intérieur du tunnel rapportait beaucoup plus, il avait décidé de s'y aventurer. Pour Ayman, c'était le premier et le dernier jour de travail dans le tunnel qui s'est effondré. Les recherches se poursuivent pour connaître le sort des 5 autres ouvriers, compagnons d'Ayman. Ces deux accidents dramatiques projettent une nouvelle fois la lumière sur le problème des tunnels de contrebande. Selon des sources hospitalières palestiniennes, en plus de trois ans de blocus israélien, 110 citoyens ont péri dans les tunnels alors que des centaines d'autres ont été blessés. 110 morts en trois ans ! Les accidents auxquels sont confrontés tous ceux qui s'y risquent sont l'effondrement, l'électrocution, l'asphyxie ou l'incendie. Le nombre de tunnels creusés depuis l'instauration de l'embargo israélien est estimé à plus de 900. Creusés de façon archaïque, le plus souvent à 20 m de profondeurs, ils sont longs de plus de 900 m et leur diamètre est compris entre 1 et 1,5 m. Ces tunnels de la «survie» sont désormais investis par des hommes d'affaires qui en tirent des bénéfices énormes au détriment des citoyens miséreux, qui proposent leurs bras et mettent leur vie en danger. Des organisations non gouvernementales actives dans le domaine des droits de l'homme ne cessent d'appeler le mouvement Hamas à ordonner l'arrêt du travail dans les tunnels. Mais comme le «gouvernement» à Ghaza impose des taxes sur les produits qui traversent les tunnels, l'arrêt de la contrebande signifie une diminution des ressources financières. Hamas n'est donc pas près de se couper les «vivres». Beaucoup de citoyens disent que la grande majorité des propriétaires de ces tunnels sont liés d'une façon ou d'une autre au mouvement Hamas. Accusant ce dernier de les utiliser dans la contrebande d'armes, Israël a bombardé à plusieurs reprises, surtout durant la dernière guerre contre la bande de Ghaza, la région des tunnels. M'hamad, un jeune de 23 ans, résidant à Ghaza, qui se déplace plusieurs fois par semaine à Rafah pour rejoindre son travail dans l'un de ces tunnels, témoigne : «Chaque fois que je me dirige vers Rafah, je fais mes adieux à mes parents qui sont très contents à chacun de mes retours. Je suis très conscient du danger que représente le travail dans les tunnels, mais actuellement, je ne peux m'en passer. Mon père est malade, il ne travaille pas depuis plus de 5 ans. Je suis l'aîné de 6 frères et sœurs. Que voulez-vous que je fasse, les laisser mourir de faim ? Non, je préfère mourir moi-même.» Si la situation politique et économique ne change pas dans la bande de Ghaza, les jeunes Ghazaouis continueront à s'aventurer dans les tunnels au risque d'y perdre leur vie. Pour beaucoup de jeunes, à cause de la situation économique dans l'enclave palestinienne, la vie ne diffère pas beaucoup de la mort, les tunnels continueront à emporter plus de vies.