Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui, depuis son élection le 9 janvier dernier, déploie des efforts colossaux pour convaincre les groupes résistants armés de cesser leurs attaques contre Israël, risque de ne plus trouver d'arguments valables pour faire prévaloir cette politique. A aucun moment, Israël n'a arrêté ses provocations. Pour preuve, l'assassinat, la semaine dernière de la petite Norhane Dib, âgée de 10 ans, dans la cour de son école à Rafah au sud de la bande de Ghaza. Cet incident, qui n'est pas le premier et qui ne sera sûrement pas le dernier du genre, a failli mettre fin à la fragile trêve déclarée du côté palestinien. Le gouvernement israélien quant à lui refuse jusqu'à maintenant d'annoncer officiellement un cessez-le-feu. Devant de tels actes, les milliers de policiers palestiniens déployés dans les zones proches des frontières, ainsi que des colonies israéliennes, sont incapables d'empêcher comme convenu, entre les deux parties, les actions palestiniennes armées. Ils risquent d'apparaître aux yeux de leurs concitoyens comme étant les défenseurs de l'agresseur. Pis encore, ils pourraient facilement être considérés comme des collaborateurs, au service de l'occupant. Le président palestinien, qui prône une solution pacifique du conflit israëlo-palestinien, veut aussi éviter l'image d'un Antoine Lahd, lorsqu'il était à la tête des troupes libanaises qui constituaient la première ligne de défense de l'occupant israélien au Sud-Liban. Actuellement, la situation sur le terrain ressemble beaucoup à celle qui prévalait lorsque Abou Mazen était Premier ministre. A l'époque, il avait aussi réussi à convaincre les groupes palestiniens armés de cesser leurs opérations militaires. Cette trêve, qui a été suivie côté palestinien pendant plus de 50 jours, a volé en éclats à cause de la poursuite des assassinats ciblés israéliens. Des dizaines de militants palestiniens avaient alors été froidement assassinés par l'armée israélienne. Les territoires palestiniens ont vécu, depuis, une escalade militaire d'une rare violence. Les provocations israéliennes ne se limitent pas seulement aux crimes sanglants ou à l'état de siège presque permanent, mais aussi aux négociations politiques. Les multiples rencontres entre des responsables palestiniens, dont M'hamad Dahlane, appelé vraisemblablement à occuper un poste important dans le prochain gouvernement, et israéliens, dont Shaul Mofaz, ministre de la Défense, n'ont abouti, à rien de substantiel. Là aussi, on, voit une répétition des négociations israélo-palestiniennes d'avant-l'Intifadha d'Al Aqsa, déclenchée un certain 29 septembre 2000. Les Israéliens n'ont point changé de stratégie. Sans montrer le moindre respect envers les Palestiniens et à leurs demandes, ils se contentent de leur dicter leurs conditions en leur faisant comprendre que c'est à prendre ou à laisser. C'est ainsi qu'ils ont décidé la libération prochaine de quelque 900 détenus parmi les 8000 qui croupissent dans leurs prisons, mais malheureusement, selon des critères qu'ils ont établis seuls. Ils ont catégoriquement refusé de former une commission mixte avec les Palestiniens afin de discuter de l'identité et des critères des libérables. Cet acte, qui aurait dû renforcer la confiance entre Palestiniens et Israéliens, est, en fait, devenu l'un des points de divergence. La question des prisonniers palestiniens a toujours été un point de discorde entre les deux parties. Devant ces données, le sommet de Charm El Cheikh en Egypte, prévu pour mardi, qui regroupera outre Mahmoud Abbas et Ariel Sharon, le président égyptien Hosni Moubarak et le roi Abdallah de Jordanie, risque d'être un fulgurant échec, qui mettra en réel danger la poursuite des négociations de paix. Si le gouvernement israélien persiste à refuser de concéder quelque chose de palpable au nouveau président palestinien, il sera alors très difficile à ce dernier de poursuivre sa politique pacifique. Espérons que la secrétaire d'Etat américaine Condoleeza Rice, attendue aujourd'hui dans la région, poussera les Israéliens à changer d'attitude. Il y va du devenir du processus de paix .