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La fin d'une saga
Jacques Ferrandez. Bédéiste
Publié dans El Watan le 02 - 07 - 2009

Le célèbre bédéiste parle ici du dernier album de sa série consacrée à la colonisation et à la guerre d'Algérie.
Pouvez-vous nous présenter les Carnets d'Orient dont vous venez d'achever le cycle ?
Ce travail est lié à la fois à mon art et à ma vie personnelle, mes origines. Je suis né à Alger en 1955. Ma famille paternelle avait émigré d'Espagne à la fin du XIXe siècle. Du côté maternel, certains ancêtres étaient venus de France dès 1856. J'ai depuis longtemps cherché à connaître et comprendre l'histoire de ma famille et, forcément, à comprendre l'histoire de l'Algérie et de ses rapports conflictuels ou autres avec la France. La colonisation de l'Algérie a constitué pour moi un domaine de recherche documentaire et iconographique. C'est ainsi qu'en 1987, quand je me suis senti prêt à aborder le sujet, j'ai entamé une grande fresque de 10 albums sur l'histoire de l'Algérie, depuis les débuts de la conquête en 1830 jusqu'à l'indépendance en 1962. Cette série est intitulée Carnets d'Orient. Ces albums entremêlent la mémoire familiale et l'histoire et retracent le destin commun des deux pays durant les 132 ans de présence française à travers les destins des individus ou des groupes représentés par des personnages inspirés en tout ou partie de la réalité.
Vous êtes l'un des rares bédéistes en France à avoir pris l'initiative de raconter l'histoire coloniale. Pourquoi avez-vous choisi cette thématique pour le moins ardue et difficile à mettre en scène dans la BD ?
Au-delà des raisons personnelles liées à l'histoire de ma famille, cette histoire est celle des occasions manquées. C'est ce que j'essaie de raconter tout au long de ces dix albums. C'est aussi pour moi l'occasion de porter un regard sur notre monde euroméditerranéen, avec un message de dialogue entre les cultures et les peuples dans cette époque troublée et dans cet espace qui nous est commun par la géographie, l'histoire et, en conséquent, par les cultures et les hommes. Dans ce travail, sans chercher à masquer les conflits ni à dévoyer les faits, je mets surtout l'accent sur ce qui nous ressemble et ce qui nous rassemble.
Est-ce que vous avez des objectifs pédagogiques ou est-ce juste une manière pour vous d'entretenir une mémoire qui vogue entre deux rives ?
Au départ, je n'avais pas d'objectif pédagogique déclaré, bien que ma démarche, qui se base sur une recherche documentaire, la consultation d'historiens et la collecte de documents iconographiques (gravures, photos, archives illustrées diverses…) comprend sans doute un côté didactique. Celui-ci est bien sûr fort pour les Cahiers d'Orient qui touchent une histoire sensible et difficile et nécessitent donc une préparation plus importante. Aujourd'hui reconnue par le corps enseignant, la série des Carnets d'Orient est utilisée régulièrement comme outil pédagogique dans le cadre du programme d'histoire des lycées et collèges pour illustrer les questions de colonisation et de décolonisation. Pour ces mêmes raisons, je suis amené à voyager tout autour de la Méditerranée et je participe ainsi à des interventions en milieu scolaire ou à des expositions sur ces thèmes dans cette zone géographique mais aussi dans le monde entier.
Vous nous avez parlé de votre rencontre avec le défunt Momo, le poète de la Casbah et de l'état de dépérissement de ce quartier mythique. A bien regarder vos dessins, on constate qu'ils sont proches du travail de l'architecte. Peut-on dire que c'est votre contribution à sauvegarder iconographiquement ce lieu ?
Après avoir rencontré Momo de la Casbah, le poète, qui a été mon guide et mon initiateur lors de ce premier voyage à Alger en 1993, j'ai voulu rendre hommage à ce personnage singulier et attachant. Il était l'âme et l'ange tutélaire de La Casbah. Lui rendre hommage, c'est aussi, bien sûr, vouloir voir perdurer ces lieux qui recèlent une histoire riche et diverse, longue de plusieurs siècles qui lui a donné une atmosphère unique.
Dans le dernier volet que vous venez de publier et qui s'intitule Terre fatale, vous parlez beaucoup des atrocités de l'OAS et des relations entre les différentes communautés. Comment avez-vous pu rendre possible la compréhension de cette complexité à travers quelques planches ?
Comme je vous le disais, j'essaie d'avoir d'abord moi-même une bonne compréhension du sujet pour que tout soit le plus clair possible pour le lecteur et pour éviter de porter atteinte aux faits historiques avérés. A un certain moment, on comprend que le conflit est allé trop loin et que les pieds-noirs se sentent obligés de partir. Les vaincus n'avaient plus leur place dans ce pays. Même si j'ai voulu montrer que beaucoup de ces gens ne comprenaient pas comment on pouvait en être arrivé là. C'est le cas notamment de cette femme, personnage de la BD, qui explique que les pieds-noirs se sont toujours entendus avec les Algériens ! D'ailleurs, beaucoup continuent encore à éprouver le même sentiment aujourd'hui.
Vous avez actuellement un projet d'adapter une nouvelle de Camus en BD, est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus ?
J'ai toujours été attentif à cet écrivain qui m'a forcément influencé. Ce texte, L'Hôte, est une courte nouvelle extraite du recueil L'Exil et le Royaume. Je l'ai découvert pour la première fois il y a une vingtaine d'années, c'est-à-dire au moment-même où je commençais ma grande saga des Carnets d'Orient. Et il a immédiatement résonné en moi comme un élément central dans l'œuvre de Camus à propos de la question algérienne. C'est peut-être le seul texte de fiction où Camus fait allusion à la guerre d'Algérie. Camus a entrepris son écriture en 1951 et l'a probablement remaniée avant sa parution en 1957. Entre-temps, il y avait eu l'insurrection de Novembre 1954 et la démarche infructueuse de Camus en faveur de la paix avec son appel à la trêve civile à Alger en janvier 1956. C'est un texte dans lequel il y a tout Camus et, à travers l'immensité de ces espaces désolés, une bonne partie de l'Algérie coloniale.
Repères
Né en 1955 à Alger dans le quartier de Belcourt, Jacques Ferrandez a d'abord publié chez Casterman Arrière-pays, suite de courtes histoires sur sa Provence d'adoption. En 1987 débute sa grande fresque en cinq volumes sur l'histoire de la présence française en Algérie, de la conquête à la veille de l'indépendance : ce sont les Carnets d'Orient (Casterman). Il replonge ensuite dans l'univers provençal en adaptant Jean de Florette et Manon des sources en 1997. L'année suivante, il revient à des projets plus contemporains avec l'écrivain et scénariste Tonino Benacquista, et c'est ainsi que naîtront, en 1998, L'Outremangeur, paru chez Casterman et adapté au cinéma, puis en 2000, La Boîte noire, paru chez Gallimard/Futuropolis. A partir de 1998, il développe ses Carnets d'Orient avec la publication de Carnets de voyage sur la Syrie, Istanbul, l'Irak, le Liban, Sarajevo et Alger. En 2008, paraît chez Casterman Cuba père et fils , un album conjuguant fiction et récit de voyage réalisé à quatre mains avec son fils Pierre. Depuis 2002, il a repris la suite de sa saga algérienne avec un nouveau cycle de cinq albums consacré à la guerre d'Algérie dont le dernier tome, Terre fatale , est publié chez Casterman en avril 2009.


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