Slim, après une longue absence, revient à la rencontre de son large public. Dans l'entretien qui suit, cet éminent bédéiste dévoile ses projets et parle de la situation de la bande dessinée en Algérie et de tant d'autres thèmes. L'Expression: Longtemps éclipsé de la scène, vous êtes enfin de retour, pourquoi une telle absence ? Slim: Eh bien c'est une absence compréhensible parce qu'en 1992, j'ai voulu sortir un peu, aller ailleurs et puis il y avait les événements insupportables qui se passaient. Et la nature a horreur du vide...et j'avais envie de le remplacer, c'est tout à fait naturel, sinon je ne me porte pas mieux. Et que devient Slim? J'ai une autre vie...et l'Algérie me manque terriblement. Souvent une envie folle de revenir me surprend, pour voir un peu où l'on est, si ça a changé, qu'est-ce qu'il faut faire. Et là, je viens de temps à autre et je suis fort content parce que disons que ça s'améliore un petit peu. Et quand est-ce qu'on reverra les carrés de Slim dans la presse nationale? En fait, actuellement, je suis sur un grand projet. J'envisage de faire un magazine satirique qui paraîtra deux fois par mois et qui s'appelle l'Echo du Hammam où je vais intégrer des collègues que je connaissais et qui ont travaillé avec moi à El-Manchar et je vais faire démarrer ce projet pour rigoler un peu mais sans toutefois tomber dans le piège politicien, disons que c'est genre 100 blagues, question de se délasser. Quand ce projet verra-t-il le jour? Vous savez, tous les projets sont soit réalisables ou irréalisables. Les gens qui s'y intéressent peuvent s'approcher de moi...et au moment où les opportunités seront toutes réunies, le magazine sera sur les étals. Mais il est fort possible qu'il soit réalisé d'ici à la fin de l'année en cours. Du cinéma à la BD, deux facettes d'une même pièce, pourquoi un tel revirement? Disons que j'étais, comme tout jeune qui rêve, féru de cinéma et j'ai même suivi des cours dans une école cinématographique. Mais je me suis retiré trop vite. Par le biais du cinéma, j'ai évolué. En fait, je suis plus doué pour le travail solitaire que le travail en équipe que le cinéma nécessite, alors je me suis retourné vite vers la BD et de travailler dans la presse, c'est devenu un métier et j'ai fait aussi du dessin animé. L'Algérie accuse un retard flagrant en bande dessinée, cela est dû à quoi, à votre avis? Oui, mais il ne faut tout de même pas oublier que l'Algérie est un pays très jeune. Il faut des publications de toutes sortes. De même, notre pays a un potentiel de jeunes dessinateurs et bédéistes mais ils n'ont pas eu cette chance de se faire connaître et de sortir leurs créations au grand jour. Je crois que ce déclin est dû au manque de sensibilisation, il n'y a pas d'éditeurs qui semblent être intéressés. Ce qui marche actuellement en France ce sont les albums, et pourquoi nos éditeurs ne tentent pas le coup ici chez nous? Peut-être qu'en Algérie les albums sont trop chers et par conséquent les gens ne peuvent pas les acheter. Ne croyez-vous pas que la télé et l'école ont leur part de responsabilité dans cette affaire? Evidemment, avec la guerre des images qui se livre actuellement, les gens n'attendent pas uniquement ce qu'une chaîne leur donne, mais ils zappent et même s'ils ne comprennent pas la langue, ils saisiront quand même le sens. Quant à l'école, elle est capable de jouer un rôle capital dans la promotion de la BD. Je me souviens très bien, pendant les années 1970, quand les enseignants me sollicitaient pour voir leurs dessins. Les gens ont une petite nostalgie des personnages comme Zid ya Bouzid, Zina...comptez-vous créer d'autres personnages, plus vivants, plus animés? Certes, les gens ont une nostalgie de ces personnages qui les ont longtemps bercés. C'était l'époque d'Algérie Actualité (rire) et puis maintenant la boucle est bouclée. Quant à la création d'autres personnages, pourquoi pas? Si l'envie me venait, je le ferais avec un grand plaisir. Vous savez, j'ai vécu à une époque où la BD était à son apogée, notamment durant les années 1960-1970 et puis il y avait Pif, Pilote...c'était merveilleux et maintenant c'est le changement total, les gens se sont tournés vers le cinéma, les dessins animés... Comment voyez-vous l'avenir de la BD en Algérie? D'abord il n'y a pas de BD, donc cet art n'a pas d'avenir en Algérie. Si maintenant les éditeurs voulaient redynamiser cet art, nous sommes toujours là et ce sera une occasion propice de découvrir des talents extraordinaires.