Confrontés au péril climatique, les dirigeants du monde entier devront parvenir à surmonter leurs divergences d'intérêt de court terme pour se rassembler autour d'un projet politique mondial fondé sur un constat scientifique objectif et ainsi donner une suite au protocole de Kyoto. S'il est encore difficile d'évaluer avec précision l'amplitude des impacts du réchauffement climatique, le danger est en revanche déjà certain. Ecosystèmes ravagés, variabilité climatique extrême, hausse du niveau des océans : les premières victimes de ces catastrophes en chaîne sont les populations déjà vulnérables en Afrique subsaharienne, en Asie centrale, du Sud-Est ou dans de nombreux pays insulaires. La sécurité alimentaire, l'accès à l'eau ou à la terre sont gravement menacés et des centaines de millions de personnes risquent d'être poussées à l'exode, grossissant les rangs de ceux que l'on nomme les «réfugiés climatiques». Dans un monde de crises, la guerre, l'autoritarisme, les inégalités, la misère et la souffrance humaine prennent encore un peu plus le pas sur la paix, la dignité humaine et la démocratie. Il faut impérativement parvenir à stopper la croissance des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'ici à 2015 avant de les faire décroître. L'étude perspective scientifique faite depuis le rapport du GIEC de 2007 nous met en garde sur un réchauffement possible terrestre d'environ 7 °Celsius au cours de ce siècle. Il peut entraîner un accroissement du niveau des mers pouvant aller jusqu'à deux mètres au pire. En 2008, les émissions mondiales de dioxyde de carbone générées par les combustibles fossiles étaient en hausse de presque 40% par rapport aux émissions générées en 1990. Même si les taux d'émissions mondiales se stabilisent aux niveaux actuels, il y a une probabilité de 25% que juste 20 ans d'émissions de plus entraîneraient un réchauffement climatique supérieur à 2 °C. Même avec zéro émission après 2030. Chaque année de retard prise dans la mise en place de mesures adéquates accroît les chances que le réchauffement dépasse 2 °C. Si le sommet de Copenhague ne semblait pas faire l'unanimité, depuis quelques mois, un changement d'attitude des Etats-Unis se fait sentir, le président Obama se rendra le 9 décembre à cette conférence ainsi que le Premier ministre chinois Wen Jiabio. Barack Obama a décidé de se rendre à la conférence internationale «pour donner de l'élan aux négociations» sur le climat, selon un de ses conseillers. Agir est une nécessité vitale Le président américain, dont le pays est l'un des plus gros pollueurs de la planète, se joint ainsi aux soixante-cinq chefs d'Etat et de gouvernement qui ont d'ores et déjà confirmé leur venue au Danemark, hôte de cette conférence de l'ONU. La présence de M. Obama devrait renforcer les espoirs d'un accord significatif dans la capitale danoise, tant les Etats-Unis passent pour avoir un rôle capital à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique. Le président américain a décidé de s'engager à ce que les Etats-Unis réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre de 17% en 2020, puis de 30% en 2025 et de 42% en 2030, le tout par rapport aux niveaux de 2005. Le gouvernement chinois a déclaré vouloir baisser l'«intensité carbonique» — la quantité de gaz à effet de serre émise par point de produit intérieur brut (PIB) — de 40 à 45% d'ici à 2020 par rapport à 2005. «C'est une action volontaire prise par le gouvernement chinois en fonction des conditions du pays et une contribution importante aux efforts mondiaux pour lutter contre le changement climatique», a déclaré le gouvernement, cité par l'agence Chine nouvelle. C'est un rendez-vous jugé de la plus haute importance. Les autorités chinoises en attendent beaucoup. Mais comme tous les sujets, il donne lieu à de longues et tortueuses négociations. Il y a en fait deux clans qui s'opposent. D'un côté, des responsables politiques de la nouvelle génération : ils ont conscience de la nécessité d'agir pour lutter contre le réchauffement climatique. Pas seulement pour préserver l'environnement, mais aussi pour le bien de l'économie chinoise. De l'autre côté, la «vieille garde» est bien consciente de l'impact sur l'environnement des émissions de CO2 mais elle fait passer la croissance du pays en priorité. Le 3 décembre, l'Inde gagne à son tour le label de puissance «responsable» dans la lutte contre le réchauffement climatique. Elle s'est engagée à réduire de 20 à 25%, sur les onze prochaines années, ses émissions de CO2 par rapport à leur niveau de 2005. Quelle est la position des pays en développement sur ce sujet ? Les émissions de gaz à effet de serre sont principalement dues à l'accélération de l'industrialisation des économies occidentales. Or, les premières victimes de ce réchauffement climatique seront les pays en développement, plus vulnérables et moins armés pour faire face à la situation. Ils réclament donc un soutien financier de la part des pays riches pour financer des programmes de réduction des émissions de carbone et d'adaptation aux conséquences du changement climatique. L'Afrique, responsable de 4% seulement des émissions totales de gaz à effet de serre, paiera le plus lourd tribut au réchauffement dans les années à venir. Elle sera confrontée à des problèmes de pénurie d'eau, de famine et autres catastrophes. Des efforts doivent aussi être faits pour permettre le développement des énergies renouvelables en Afrique au travers d'un soutien financier mais aussi d'un transfert de technologies des pays développés vers les pays en développement. Le réchauffement climatique va sans doute créer des instabilités dans les régions pauvres, qui manqueront d'eau et de terres cultivables. Instabilités qui seront d'autant plus exacerbées si la communauté internationale ne se mobilise pas. Ne pas soutenir l'Afrique dans sa lutte contre le réchauffement, c'est s'exposer au risque de voir perdurer déforestation, stress hydriques, perte de la biodiversité, dont les conséquences dépassent largement le cadre régional pour englober l'ensemble de la planète.