Jusque-là l'image d'une France soucieuse de se débarrasser de ses immigrés clandestins passait aisément dans l'opinion publique. Le volontarisme du président Sarkozy, élu en partie pour ça, se voulait être gage de réussite en ce domaine, et peu importe les dégâts humains et le prix. Lyon : De notre correspondant Pourtant, le rapport de la Cour des comptes paru le 1er juillet met en miettes deux certitudes : que les reconduites aux frontières fonctionnent bien et que les nouvelles entrées clandestines diminuent. En effet, si le nombre d'étrangers en situation irrégulière placés en rétention ne faiblit pas, passant de 24 502 à 34 592 entre 2002 et 2008, le taux de reconduction à la frontière a au contraire baissé de 44,6% en 2003 à 41,7% en 2008. La Cour des comptes doute dès lors de l'« efficacité » des dispositifs, alors que déjà le caractère arbitraire des interpellations, souvent musclées, a été dénoncé par de nombreuses associations humanitaires. A ce sujet d'ailleurs, le rapport indique que les interpellations sont passées de 59 023 à 111 692 entre 2003 et 2008, mais le taux d'exécution des mesures d'éloignement a diminué : de 22,3% en 2003, à 19,4% en 2008. Les étrangers arrêtés sont conduits en centre de rétention administrative (CRA). Les places sont passées de 650 en 2002 à 1424 en 2008. Le taux de reconduction à partir des CRA a baissé à 41,7% en 2008. Que deviennent les presque 49% ? En réponse, devant la commission des finances du Sénat, le ministre de l'Immigration, Eric Besson, a souligné la jeunesse de son ministère créé seulement en 2007 et indiqué qu'entre « 2001 à 2006, le taux d'exécution des APRF (arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière) a constamment progressé, passant de 16,6% à 25,7%. Le nombre d'APRF exécutés passant sur la même période de 6161 en 2001 à 16 616 en 2006. A compter de 2007, des OQTF (obligations de quitter le territoire français), en nombre beaucoup plus important que les APRF, sont appliquées. Ce qui fait mathématiquement baisser le taux. S'agissant des causes de non-exécution des mises en rétention, j'en retiens deux qui sont essentielles : l'annulation des procédures par décision de justice (pratiquement 34% en 2008) et la non-obtention des laisser-passer consulaires (quasiment 22% en 2008) ». L'immigration illégale n'a pas fini de faire couler de l'encre puisque le ministre ne veut pas baisser les bras : « Quand bien même nous aboutirions à un chiffre jugé élevé du coût d'une reconduite à la frontière, qu'en tirerions-nous comme conclusions ? Faudrait-il pour autant renoncer à éloigner des étrangers en situation irrégulière ? Faudrait-il même chercher à calculer le coût d'un non-éloignement, à comparer coût d'éloignement et coût de non-éloignement ? Ne faut-il pas mettre au bénéfice des reconduites un coût positif en termes de dissuasion de l'immigration clandestine ? ». Rien n'est moins sûr !