L'absence d'animation de la scène économique nationale doit certainement beaucoup à notre isolement à l'international dans le monde qui est naturellement le nôtre, soit le monde arabo-maghrébin et africain. Autant les médias algériens sont friands en nouvelles politiques et militaires du continent, autant ils développent un black-out de la chose économique, financière et boursière africaine. Nous nous économisons les domaines dans lesquels nous ne savons rien, à commencer par les politiques économiques des Etats africains et les lignes nationales et internationales de leur financement ainsi que leurs projets d'union monétaire, douanière, commerciale, etc. Que ce soit au niveau officiel ou au niveau des managers industriels et commerciaux, nous avons tendance à regarder vers le Nord et parfois maintenant vers l'Asie. Or, notre proximité géographique avec le Maghreb, notre appartenance historique au monde arabe et notre situation stratégique en Afrique devraient nous inciter à aller voir ce qui se passe en matière économique et financière dans les nombreux pays constituant ces périmètres familiers. Le détour vaut la chandelle et nous risquons de rougir de honte devant les avancées africaines en de nombreux domaines de la finance, du droit des affaires, de l'investissement et du commerce international. Aujourd'hui, nous sommes frappés par le constat fait par de nombreux experts en la matière : le continent africain est solvable, peu ou pas endetté et prometteur particulièrement en marchés de matières premières et ressources naturelles. La crise financière et économique a préservé l'Afrique parce que le risque financier est moins important que le risque américain ou européen (absence de produits toxiques dans les circuits bancaire et financier). L'industrie locale africaine a besoin de confiance pour transformer en produits manufacturés ses propres matières premières qu'elle exporte actuellement à bas coût et qu'elle réimporte à coût renchéri. En matière agricole, l'Afrique développe une politique de sécurité alimentaire limitée pour l'instant à la recherche de l'autosuffisance alors même que ses richesses diverses et variées, si elles étaient encadrées par des politiques agroindustrielles, de marché commun ou de commerce intra-communautaire, impliquant plusieurs opérateurs de plusieurs Etats, peut prétendre à l'exportation d'excédents avantageux en termes de qualité et de prix vers des marchés demandeurs de produits frais. Le chômage endémique régnant en Afrique devrait encourager les partenaires africains à s'entraider mutuellement pour instaurer des zones de libres échanges ou d'une union douanière élargie, d'une libre circulation des ressources humaines de sorte qu'on favorise la mobilité des techniciens et paysans d'un pays à un autre et d'une saison à une autre dans un grand marché spécialisé par rapport au climat, à la nature des sols et à l'abondance ou la rareté de l'eau. Si la terre africaine est mise en valeur par des politiques volontaristes alors il n'y aura pas besoin de visa pour permettre aux paysans de servir là où la demande se fait sentir et endiguer ainsi la crise du chômage et son corollaire les flux migratoires clandestins. Parlant du risque politique, les experts notent la stabilité du personnel politique en Afrique, mais la sécurité juridique revient dans leur constat en ce sens que les investisseurs étrangers ont peur des positions versatiles des Etats qui changent de cap politique sans crier gare. Les affaires ont besoin de stabilité des régimes juridiques qui président aux décisions économiques des investisseurs qui s'étalent dans le temps. La stabilité recherchée touche à l'ensemble des domaines intéressant le commerce et l'investissement : régime douanier, fiscal, foncier, droit de la propriété, le change et les transferts, droit du travail, droit de la qualité etc. L'Algérie, par son réseau diplomatique et consulaire, devrait s'intéresser aux marchés africains et favoriser les opportunités d'affaires avec ce continent ami et allié à la fois. Pour ce faire, nos représentations dans ces pays devraient, autour de missions économiques et financières, développer l'ingénierie nécessaire à l'information de nos hommes d'affaires et autres industriels et commerciaux à l'effet de les rapprocher de ce monde aujourd'hui entre les mains de puissances étrangères à l'Afrique dont les intérêts ne sont pas forcément le développement économique et social des africains. Notre absence demeure énigmatique et en tout cas inexpliquée, quand on se remémore les trésors de coopération politique et diplomatique investis aux quatre coins de ces pays dans tous les cadres institutionnels existants : politiques, économiques et financiers depuis pratiquement un cinquantenaire. Il reste à encourager via nos diplomates la présence prospective de nos entreprises nationales publiques et privées qui devraient être entourées de tous les égards pour aller apprendre là-bas comment nouer des affaires depuis leur montage financier jusqu'à leur bouclage effectif (le français et l'anglais sont des langues presque naturelles). Que ce soit en matière industrielle ou commerc0iale, les opportunités sont réelles, elles demandent à être captées et présentées à Alger par la voie des médias et des officiels qui visitent ces pays. Sinon à quoi nous sert notre politique africaine si elle ne nous aide pas à prospérer économiquement dans l'intérêt de l'ensemble des parties africaines, le nôtre étant de créer de la valeur, notamment par l'exportation ou l'importation de matières premières à prix concurrentiel et de l'emploi pour nos capés en chômage. En matière de capitaux, les placements sous toutes les formes qui vont du prêt gouvernemental aux financements de l'industrie locale par le biais des marchés des capitaux (qui se développent sérieusement) peuvent rapporter des dividendes qui nous aideraient à mieux entrevoir l'avenir de l'après-pétrole. A l'Etat de négocier les garanties et les contrats pour sauvegarder au mieux l'intérêt de ses placements ou ceux de ses ressortissants. Aux ambassadeurs de développer la fonction VRP que leurs collègues des pays développés et industrialisés assurent passionnément au bénéfice de leurs pays et de leurs acteurs économiques. Il est bon de noter que le Maroc, la Tunisie, l'Egypte, le Liban et la Libye ainsi que l'Arabie Saoudite sont présents en force dans les marchés africains. Sont-ils mieux outillés, disposent-ils de compétences que l'Algérie ne possède pas, poursuivent-ils des intérêts qui ne nous intéressent pas ? Autant de questions qui globalement charrient elles-mêmes leurs réponses. Les Etats de ces pays jouent le même rôle joué par les Etats des puissances industrielles et commerciales. Leurs médias aussi. Contrairement à nos représentations dont nous ignorons ce qu'elles font là-bas dans ces domaines précis de l'économie et de la finance. Le coût de leur installation et fonctionnement devrait être appréhendé comme un investissement de l'Etat (Trésor public) qu'il va falloir apprendre à fructifier et évaluer. On devrait leur fixer des contrats d'objectifs et de performance pour les inciter à changer de profil dans l'intérêt de notre Etat. Si l'on veut réanimer la scène économique nationale, on devrait, sans hésitation aucune, permettre à notre bourse des connexions à l'international qui vont déboucher sur le suivi, au moins dans un premier temps, des fonds africains, islamiques, du Moyen-Orient, les fonds matières premières et ressources naturelles, or et métaux précieux. Ensuite, et en fonction de nos capacités d'attractivité (qui touchent aussi le tourisme d'affaires) la mise en place locale de correspondants des bourses étrangères et des marchés notamment de matières premières. S'il n'y a pas d'ouverture programmée et planifiée à l'international, dans le sens où c'est nous qui allons voir ce qui se passe chez les autres, il ne faut pas nourrir de faux espoirs d'économie de marché, pour ne pas dire d'économie tout court ; les enjeux actuels et futurs sont là.