Pour son premier voyage en Afrique, le président américain, Barack Obama, a fait mouche. De la tribune du Parlement ghanéen, il a mis les mots sur les maux d'un continent dont il souhaite un changement. Mais par les Africains eux-mêmes. Barack Obama a d'ailleurs remis au goût du jour la fameuse tirade du roi berbère Massinissa – l'Afrique aux Africains – passée à la postérité. Le premier président afro-américain des Etats-Unis n'a pas choisi pour autant de bomber le torse ni de toiser son auditoire qui dépasseait largement les travées du Parlement ghanéen. On était loin du discours humiliant de Nicolas Sarkozy à Dakar où il assénait que « l'homme africain n'est pas entré dans l'histoire ». Devant ces foules joyeuses et fières d'Accra, Obama était justement l'histoire personnifiée de l'homme africain monté aux cimes du pouvoir aux Etats-Unis. Et c'était un juste retour aux sources d'un homme qui a « du sang africain qui coule dans mes veines ». Le président américain a en revanche brocardé sèchement les dictateurs africains et tous ceux qui s'accrochent au pouvoir. Et là, il montre la voie à suivre aux peuples du continent : « Vous avez le pouvoir de demander des comptes à vos dirigeants, de construire des institutions pour servir le peuple. Vous pouvez vaincre les maladies et les conflits. Oui, vous le pouvez ! » tonnera-t-il, reprenant à l'occasion son célèbre refrain de campagne, « Yes, you can ! », cette fois. Pour Obama, les souffrances de l'Afrique portent une signature : la mauvaise gouvernance. Et d'avertir : « Ne vous y trompez pas, l'Histoire est du côté des courageux africains, pas de ceux qui font des coups d'Etat ou changent les Constitutions pour rester au pouvoir. L'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts, elle a besoin d'institutions fortes ! » Cette salve a dû froisser des dizaines de dirigeants de pays africains dont certains comme le nigérien Mahamadou Tandja s'apprête à opérer un passage en force pour un troisième mandat. Barack l'Africain Obama a dépeint hier une Afrique encore en proie « aux conflits, aux maladies, au sous-développement économique, à la corruption et aux pratiques antidémocratiques ». Une fatalité ? Non, répond Obama, pour qui il y a maintenant un « nouveau moment de promesse ». Et de montrer la voie du salut pour l'Afrique : « …Cet espoir et le développement ne sauraient se concrétiser qu'avec la bonne gouvernance ; un ingrédient (qui) a fait défaut trop longtemps dans trop d'endroits. » Discours de rupture avec celui des républicains trop occupés à siphonner les richesses de l'Afrique, Obama s'est fait un point d'honneur de lier le développement de l'Afrique à la bonne gouvernance. « Ce que nous ferons, c'est augmenter notre assistance aux individus et aux institutions responsables, en faisant porter l'effort sur le soutien aux règles de bonne gouvernance », a-t-il promis comme pour montrer la conduite à tenir pour qui souhaite l'appui de son administration. Obama s'est gardé de jouer le tuteur comme le font bien des présidents de certaines anciennes puissances coloniales. Pour lui, l'équation est simple : « L'avenir de l'Afrique appartient aux Africains eux-mêmes ». Et comme il fallait bien un exemple pour rendre visibles les « espoirs déçus » de l'Afrique, Obama a cité la « destruction » de l'économie du Zimbabwe, ces dix dernières années, pour mettre au box des accusés tous les « Mugabe » de l'Afrique. S'il reconnaît la responsabilité du colonialisme dans le désastre africain, Barack Obama ne dédouane pas pour autant les dirigeants africains pour qui « il est facile de rejeter la faute sur les autres » (l'Occident ndlr). Les dirigeants actuels étant irrécupérables à ses yeux, le président des Etats-Unis s'est adressé aux nouvelles générations de tous les pays africains en leur disant ceci : « L'Histoire est en mouvement et je peux vous promettre une chose : l'Amérique sera avec vous, comme partenaire, comme ami. » En janvier dernier, lors de son discours d'investiture, il avait lancé ceci : « A ceux qui s'accrochent au pouvoir par la corruption et la tromperie, sachez que vous n'allez pas dans le sens de l'Histoire (…) Sachez que votre peuple vous jugera sur ce que vous serez capable de bâtir, pas de détruire. » Force est de constater que le discours d'Obama sur l'Afrique n'a pas changé. Dans son exigence démocratique.