A moment où l'Algérie s'apprête à fêter ses 48 ans d'indépendance et 3 mois seulement après la sortie du pamphlet du président du RCD sur le colonel Amirouche, la Wilaya III historique s'invite à nouveau dans le débat à la faveur de la sortie du livre sur le colonel Mohand Oulhadj, prévue hier. Sous le titre Si Mohand Saïd raconte Amghar (le sage, ndlr), le livre écrit par le fils du colonel, Akli Mohand Saïd, lui-même ancien officier de la Wilaya III, retrace le parcours du combattant de Mohand Oulhadj, mais aussi les circonstances dans lesquelles il a pris le commandement de la Wilaya III historique, de 1959 jusqu'à l'indépendance. Marquée par des événements décisifs, cette ultime phase de la guerre de Libération nationale a été cruciale pour cette wilaya et pour le successeur du colonel Amirouche. Cependant que l'étau de l'armée coloniale se resserre sur la région à travers le plan Challes, le colonel a été confronté successivement à un mouvement de dissidence et à l'affaire dite «la Paix des braves». «Etre à la tête de la Wilaya III durant la période 1959-1960 n'était pas une tâche facile. La région a été secouée par des événements qui ont affecté sensiblement son unité. La Wilaya III allait vivre des conditions très difficiles. Le plan Challes visant à anéantir la lutte armée a débuté en février 1959», écrit Mohand Saïd Akli dans le chapitre consacré aux circonstances dans lesquelles a eu lieu la succession au colonel Amirouche. «En 1960, Si Mohand Oulhadj a fait prévaloir sa sagesse et son intelligence légendaire pour paralyser le plan du général de Gaulle qui visait à neutraliser les Wilayas III et IV à travers la Paix des braves», est-il encore souligné. Cependant, un mouvement de dissidence se dresse contre le nouveau commandement de la Wilaya III incarné par le colonel Mohand Oulhadj et le commandant Mira. Sur cet épisode, peu connu de l'histoire de la guerre de Libération, l'auteur évoque le lieutenant Allaoua Zioual ayant constitué «le mouvement des officiers libres» qui, à l'issue d'un congrès, «conteste publiquement l'autorité de Mohand Oulhadj et du commandant Mira, les jugeant incapables de faire face à la situation que vivait la Wilaya III depuis l'opération Jumelles». En conséquence, est-il encore écrit, «des commandos devraient arrêter et désarmer tous les officiers libres rencontrés. En cas de refus d'obéissance aux ordres, ils seraient abattus purement et simplement. Néanmoins, en se soumettant à leurs ordres, ils seraient gardés à vue et dirigés vers le PC de la Wilaya III». L'affaire de «la Bleuite», dont le rebondissement est inévitable dès l'évocation de la Wilaya III historique, est également rappelée dans le livre en question, où il est fait part de nouveaux éléments qui, à coup sûr, permettraient d'apporter de nouveaux éclairages quant à cette étape ô combien douloureuse de la guerre de Libération nationale. Amirouche et le projet d'un commandement unique à l'intérieur Il fait état à cet effet des instructions formulées par la direction extérieure de l'ALN et transmises au nouveau commandement de la Wilaya III : «Abderhmane Mira arriva en Wilaya III et nous transmit toutes les instructions amenées par lui de l'extérieur telles que cesser les purges à l'encontre du réseau bleu», mais «les officiers et les sous-officiers arrêtés avant le départ d'Amirouche sont restés prisonniers même à l'arrivée du commandant Mira».En outre, un hommage que le colonel Mohand Oulhadj a rendu le 28 mars 1966 à son prédécesseur à la tête de la Wilaya III, lors du 7e anniversaire de sa mort et reproduit intégralement dans ce livre, fournit de nouveaux éléments sur la vision du colonel Amirouche quant à la gestion de la lutte de libération et l'organisation des Wilayas, laissant déduire des divergences entre «le lion du Djudjura» et la direction extérieure. En effet, est-il écrit, «avec les colonels Si M'hamed (Wilaya IV), Hadj Lakhdar (Wilaya I) et avec l'accord du colonel Lotfi (Wilaya V), Amirouche et Si El Houes conçurent l'idée d'un commandement unique à l'intérieur du pays afin de ne pas laisser à l'ennemi l'initiative des opérations. Hélas ! Ce projet ne fut jamais mis à exécution à cause de la disparition de quatre de ses promoteurs». Le texte de Mohand Oulhadj, qui date de 1966, rappelle en conclusion qu'«Amirouche visait l'unification des Wilayas en réduisant la rigidité de leur autonomie et le régionalisme n'a jamais effleuré son esprit». Outre les témoignages divers, il est reproduit dans la partie annexe du livre Si Mohand Saïd raconte Amghar des documents non moins importants et même inédits, comme des correspondances entre le commandement de la Wilaya III et la direction extérieure et autres PV de réunions décisives.