« Nous voulons organiser une immense exposition de l'art algérien traditionnel et contemporain à Washington », a annoncé, hier, au siège de l'ambassade des Etats-Unis à Alger, lors d'une rencontre avec la presse, Johnnetta Cole, directrice du Musée national de l'art africain à Washington, invitée à la faveur de la tenue du deuxième Festival culturel panafricain (Panaf'2009). Rencontre à laquelle a assisté également Anita Henri, directrice des relations extérieures au même musée. « Ce type de projets nécessite un financement qui, nous espérons, provienne des deux gouvernements », a-t-elle relevé. L'Algérie, pour beaucoup d'Américains, n'est pas un pays africain. « Notre musée est spécialisé en art africain, et si on arrive à organiser cette exposition, c'est un message aux Américains pour dire que l'Algérie fait partie du monde arabe, mais avant tout que c'est un pays africain », a observé Johnnetta Cole, docteur en anthropologie. Des discussions ont été entamées avec Mustapha Orif, directeur de l'Agence nationale du rayonnement culturel sur ce projet, qui, selon Anita Henri, pourrait coûter de 1,5 à 2 millions de dollars. « Il faut déplacer les artistes et les objets et prévoir des installations », a-t-elle expliqué. Au Musée national de l'art africain de (NmAfa), qui fait partie de l'organisme public The Smithsonian Institution, il existe 8000 objets d'art dont des pièces en céramique et des bijoux algériens. Le seul artiste algérien à y avoir exposé est Rachid Koraïchi : « Nous avons déjà apprécié l'art algérien, pourquoi pas les arts libyens, tunisiens et marocains aussi. Cependant, nous travaillons à renforcer les contacts qu'on a déjà établis », a relevé la responsable du musée. « Il est difficile d'organiser des expositions, car cela nécessite beaucoup de planification. On sait déjà ce que nous allons exposer en 2010 et en 2011. La difficulté réside dans la collecte des fonds », a-t-elle ajouté. Selon elle, le financement des expositions provient de trois sources différentes : The Smithsonian Institution (qui gère 19 musées et 9 centres de recherche), les pays à qui la manifestation est dédiée et le secteur privé américain. « Nous sommes impressionnés par le soutien qu'apporte le gouvernement aux arts. La tenue du Panaf' avec son grand budget en est un exemple. La culture est un moyen efficace pour renforcer les relations diplomatiques », a noté Johnnetta Cole qui visite l'Algérie pour la première fois. Elle a promis d'y revenir. Johnnetta Cole et Anita Henri ont l'habitude de faire plusieurs tournées en Afrique : « C'est une chance pour nous d'être en Afrique au même moment que le président Obama qui visitait le Ghana », a-t-elle dit. Elle a indiqué que son musée a un programme pour les résidences d'artistes. « Nous voulons emmener avec nous des artistes algériens aux Etats-Unis. On va engager des procédures pour cela. Les artistes doivent postuler pour cela. C'est un autre exemple de coopération future entre la Smithsonian Institution, notre musée et l'Algérie. Il est important de tisser des relations officielles avec les musées algériens », a insisté Johnnetta Cole. La coopération peut, selon elle, s'élargir au domaine de conservation. « Je rêve qu'un jour nous puissions offrir nos services et notre expertise à l'Algérie pour conserver les objets d'art. La conservation est un problème majeur en Afrique en raison des conditions climatiques », a-t-elle souligné. Les Américains ont-il des préjugés sur l'art africain comme les Européens qui évoquent souvent « l'art primitif » ? « Notre musée, qui expose l'art qui provient du berceau de l'humanité, a une mission d'enseignement. On veut montrer aux visiteurs l'Afrique, ses cultures, ses peuples. On voudrait que l'art africain soit aussi admiré et respecté au même titre que les arts français, britanniques, néerlandais, etc », a précisé Johnnetta Cole. Selon elle, l'histoire de l'anthropologie a été toujours associée au colonialisme, notamment en Europe, ce qui la différencie de la conception américaine qui est plus ouverte. Aucune pièce pillée d'Afrique n'est acceptée par le musée de Washington. « Nous respectons la charte d'éthique imposée par l'Unesco en la matière. Nous n'acceptons aucune œuvre s'il y a des doutes sur son origine. Nous faisons tout pour être sûr que les objets reçus ne proviennent pas d'un pillage », a précisé la directrice du musée. Le Musée national de l'art africain, spécialisé dans les arts plastiques et graphiques, fait partie de The Smithsonian Institution qui gère 19 musées, 9 centres de recherche et un parc animalier national et qui est responsable d'un trésor de 142 millions d'objets d'arts et de spécimens. Spécialiste d'études afro-américaine, Johnnetta Cole fut la première femme noire à occuper le poste de présidente du prestigieux collège Spelman, basé à Atlanta.