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Le phénomène prend de l'ampleur à Béjaïa : Ces routes bloquées chaque jour…
Publié dans El Watan le 31 - 07 - 2010

Les habitants des agglomérations en proie à des pénuries d'eau, des problèmes d'assainissement ou encore au mauvais état des routes prennent d'assaut les axes routiers pour faire obstruction au trafic automobile. Le phénomène, qui, jusqu'à récemment, était l'apanage des principaux axes routiers (RN26 ou RN12) jugés stratégiques, a eu un effet de contagion en gagnant les centres urbains. La dernière action remonte au lundi 26 juillet, quand des habitants de Tala Markha, dans la ville de Béjaïa, ont obstrué la voie publique pour réclamer la réfection de la route principale desservant leur quartier. Ils ont réussi à déplacer le maire sur les lieux. La veille, des habitants de plusieurs villages de Oued Ghir ont bloqué la RN12, pour réclamer des travaux de bitumage des sentiers desservant leurs bourgs. Les automobilistes qui ont voulu accéder à Béjaïa par contournement via Amizour se sont vite heurtés à un autre barrage de contestataires. Résultat : une pagaille et plus de 30 km de bouchons ont complètement paralysé le triangle El Kseur-Amizour-Béjaïa. «Le blocage des routes est le seul moyen que nous avons pour nous faire entendre. Nous avons bien raison d'y recourir», justifie un protestataire à l'air bien décidé derrière les barricades. En pleine période de chassés-croisés des vacanciers, les blocages des axes routiers névralgiques paralysent la ville et exacerbent les usagers. Cette escalade de l'action radicale pénalise l'activité économique qui se retrouve fortement perturbée. Face à cette situation de forte tension, les usagers de la route en ont assez, la majorité des personnes que nous avons interrogées estiment «injustifiée» la fermeture systématique des routes. Le 8 juillet dernier, un cortège nuptial a été bloqué sur la RN26 près du village agricole, à quelques kilomètres de Sidi Aïch. Le drame a été évité de justesse. La procession de voitures s'est heurtée à l'entêtement des protestataires qui ne voulaient pas céder le passage. Une rixe s'en est suivie et a failli tourner au bain de sang. «C'est insupportable ! Il faut qu'on arrête ces blocages», peste un chauffeur. «Je comprends la préoccupation à propos des mauvaises conditions de vie des protestataires, notamment les problèmes d'eau, d'électricité, d'assainissement et, en même temps, je ne comprends pas que les autorités attendent jusqu'à ce que les gens bloquent les routes pour qu'enfin elles daignent répondre à leurs doléances.» Et d'ajouter : «Cette manière de faire des autorités encourage les gens à bloquer les routes. Et on pénalise et les entreprises et les usagers. Ça, c'est insupportable.»

Inerties des autorités

Les usagers sont très souvent remontés face à ces blocages. «Les gens le prennent très mal. La fermeture des routes coûte cher autant pour les travailleurs, les étudiants, les entreprises que les vacanciers», se plaint un automobiliste. Le blocage des routes pourrit la vie des usagers, qui se retrouvent otages de l'inertie des collectivités qui ne réagissent qu'après usage de la manière forte par les protestataires. Des dizaines de milliers d'automobilistes se retrouvent ainsi pénalisés, portant fatalement des coups sévères à l'économie locale. Le blocage des routes coûte cher à l'économie de Béjaïa. L'économie locale est, en effet, portée par des PME dont les besoins en déplacements sont quotidiens. Autre terrible dommage collatéral : le tourisme en prend un sérieux coup. Les estivants qui viennent passer leurs vacances à Béjaïa voient leur séjour transformé en cauchemar par les interminables embouteillages que causent ces manifestations de colère. «Je comprends tout à fait les protestataires, affirme un chauffeur de bus, mais ils devraient plutôt bloquer les institutions qui sont responsables de leurs problèmes.» Un retraité observe cette étonnante procession de voitures bloquées d'un air dégoûté : «Ils n'ont pas raison, c'est le pauvre salarié et le commerçant qui payent la facture. Les autorités sont à l'abri», râle-t-il. «Je ne comprends pas pourquoi ils nous font ça. Il y a des malades, des femmes enceintes, des nourrissons qui n'ont rien fait de mal pour subir un tel enfer», se révolte un chauffeur dont la voiture est coincée entre deux camions. «Il faudrait bloquer la mairie, la daïra ou encore la wilaya et les ministères, pas la route, pas les particuliers», rouspète un livreur au volant de sa camionnette. «Comment une dizaine de protestataires peuvent-ils bloquer aussi facilement des dizaines de milliers de citoyens usagers de la route ?», s'interroge un chauffeur au volant d'un bus, coincé dans l'embouteillage. «Au lieu de mettre une heure et demie pour atteindre mon poste de travail, j'ai mis 5 heures. Ça me révolte ! Je trouve inadmissible de prendre les gens en otages. Je trouve cela anormal», lâche un salarié. Réconfortés par l'aboutissement de leurs revendications ou du moins la promesse de leur prise en charge, les protestataires finissent souvent par faire des émules. Et le phénomène de la fermeture des routes fait tache d'huile.


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