« Loue F2 avec jardin, 6000 DA. » Alléchés par l'annonce parue dans un hebdomadaire spécialisé, nous prenons contact avec le propriétaire. Celui-ci nous explique qu'il s'agit en fait… d'une cave ! Aménagée en appartement F2, à Bab Ezzouar, avec kitchenette et douche. Précision : l'eau et l'électricité sont gratuites. Comprendre : prélevées du réseau en toute illégalité. Mises en vente à des prix défiant toute concurrence, et à des standings différents, les caves constituent désormais, à elles seules, un véritable marché immobilier. « Je vous vends ma cave F3 à 1, 2 million de dinars », nous propose un « propriétaire » à la cité du 5 Juillet (Bab Ezzouar). Une autre cave F3 à Sorecal, toujours dans la localité de Bab Ezzouar, est mise en vente pour 900 000 DA. Ali, un locataire du quartier raconte : « Au début, nous avons laissé des voisins aménager ces caves, à cause de l'exiguïté des appartements et de la crise du logement. Mais rapidement, cela a provoqué des conflits entre voisins qui voulaient tous avoir droit à ces chambres en sous-sol. Transformées plus tard en appartement. » Avec toutes les commodités. Et Ali de dénoncer certaines pratiques : « Maintenant, ils vendent ces caves à des étrangers ! Certains locataires vendent leur appartement avec cave comprise dans la transaction, tout cela, sans que les autorités ne bougent ! » A en croire les résidants des cités dortoirs de la capitale, ce style de transaction est devenu courant. A Aïn Naâdja, même pratique, même prix. La fourchette des prix évolue en fonction de l'espace, mais aussi de la localisation. A proximité du marché et des arrêts de bus, il vous en coûtera de 400 000 DA à 1,5 million de dinars. « J'ai vendu mon appartement, j'ai acheté une cave à 800 000 DA, le temps de construire ma maison à Dar El Beïda », nous explique Salah, la cinquantaine, fonctionnaire. « J'ai bénéficié d'un logement OPGI, dans les années 1980. Après le séisme de Chlef, aujourd'hui je suis contraint de le vendre, car mes enfants sont arrivés en âge de se marier et ils n'ont pas les moyens de s'offrir un logement. Je déménage dans trois mois et je revends ma cave à 1 million de dinars », calcule-t-il. Naïm et Manel, un jeune couple, s'apprêtent, eux aussi, à louer une cave à Alger-Centre. Ils se marient dans un mois et viennent de trouver une cave à Belcourt pour 7500 DA par mois les 30 m2. « On n'a pas le choix », nous expliquent-ils amèrement. Parfois même, certaines caves font office de locaux commerciaux. « Après plusieurs tentatives pour obtenir des aides dans le cadre de l'Ansej, je travaille dans ma cave, confie Fella, une jeune coiffeuse. Cela ne gêne pas mes clientes même fortunées… »