Il est indéniable que la problématique de l'environnement et la lutte contre la pollution dans les régions du nord ne se posent ni dans les mêmes termes ni avec la même acuité que celle prévalant dans les régions du sud. Pour la simple raison qu'il n'existe à Béchar aucune usine industrielle polluante. Il n'y a pas, non plus, de forêts, de lacs, d'espaces végétaux verdoyants et de précipitations importantes comparables à ceux des régions humides. Alors, forcément, la stratégie devant être adoptée et les moyens mis en œuvre pour préserver la nature contre les multiples atteintes et dégradations, sont nécessairement différents de ceux employés dans les régions du nord. Ici, tout est sec, aride, avec un climat extrêmement chaud en été et glacial en hiver, et la moindre quantité de pluie déversée durant la saison hivernale est instantanément absorbée par l'aridité d'un sol terriblement assoiffé. Seules subsistent à cette sécheresse naturelle et millénaire, des plantes pérennes qui parsèment les immenses étendues désertiques dans un décor immuable depuis la nuit des temps. Les quelques zones agropastorales, un don de la nature, sont situées à proximité du bassin de Oued Namous et de la vallée de la Zouzfana, au nord de la wilaya, à quelques dizaines de kilomètres de la commune de Béni Ounif. Ces régions constituent des lieux privilégiés pour le pâturage et la transhumance des troupeaux ovins des nomades et la pratique de la cygénétique. La valeur nutritive reconnue aux plantes pérennes - éremth, degâa, armoise blanche (chih), el gars, etc. - sont un atout majeur pour l'élevage de moutons. Mais, face à cette sécheresse millénaire, à l'hostilité de la nature, doit-on pour autant baisser les bras et se résigner ? Ici comme ailleurs, la responsabilité des hommes est mise en cause dans le désastre perpétré contre la nature. Les hommes qui détiennent une parcelle de responsabilité, n'ont pas su ou voulu épargner l'environnement des déchets polluants (ménagers ou solides) qui continuent à agresser notre milieu urbain. Les arguments développés ça et là, du côté officiel, pour justifier les carences avérées dans ce domaine, ne peuvent être perçus que comme une échappatoire, des faux-fuyants, car il est courant d'entendre de la bouche de nos décideurs que la priorité, à l'époque, n'était pas orientée vers la protection de la nature et la sauvegarde de l'environnement, mais vers des secteurs vitaux comme l'éducation, la santé et l'habitat. Cependant, plus de quarante ans après l'indépendance, qu'en est-il de la préservation de l'environnement et de la lutte contre la pollution ? Cette question fondamentale vient-elle, aujourd'hui, au premier plan des préoccupations des pouvoirs publics ? Dans ce cas précis, existe-t-il un suivi permanent et rigoureux et des sanctions appropriées contre les atteintes à l'environnement relevées lors des aménagements urbains dans le cadre des différents plans d'extension des zones nouvellement urbanisées ? Un constat amer Le constat est malheureusement amer et sévère. Dans l'espace urbain de plus en plus rétréci où évoluent les collectivités, la question de l'environnement prend alors une dimension importante dans le cadre du développement harmonieux. C'est pourquoi il est impératif de songer à intégrer cette donnée fondamentale dans une vision globale et la protéger contre toutes sortes d'agressions répétées que subissent sans cesse nos agglomérations défigurées par le béton armé qui s'est substitué aux périmètres verdoyants et aux espaces de repos. Les violations flagrantes contre l'environnement sont perceptibles pour le visiteur débarquant pour la première fois à Béchar. L'entrée de la ville offre un aspect rébarbatif d'une cité dépourvue de plants d'arbres, de verdure, si ce n'est la palmeraie en décrépitude située sur les rives de l'oued Béchar, qui atténue l'aspect désagréable de l'ensemble de l'agglomération. Seuls, trônent sur les terrasses des habitations souvent inachevées, dénuées d'harmonie et agencées presque en ligne sinueuse, quantité de fer à béton armé visible sur les toits, indice du peu d'intérêt que nous accordons à l'embellissement du cadre de vie et à la création d'espaces verts. Autre exemple : les anciennes constructions démolies au début des années 1980 dans le centre de la ville, ont été remplacées par des édifications nouvelles surélevées, contrastant avec le style et le type d'habitats préexistants sans âme car dépourvus d'espaces verts et d'aires de repos. Les associations marginalisées Alors, comment remédier à cette situation épouvantable et faire en sorte que l'environnement dans lequel nous évoluons soit vivable, sain et moins stressant. Cependant, il faut reconnaître aussi que la prise de conscience pour la sauvegarde de ce qui touche de près à l'environnement est récente, depuis la libération du champ médiatique après que le gâchis eut été consommé. Le mouvement associatif né à la suite de la prise de conscience n'est malheureusement pas associé ou consulté pour donner des suggestions ou avis en matière de protection de la nature. Les associations agréées, 12 au total, ne sont ni associées ni impliquées, car elles ne reçoivent pas de subventions de la part des collectivités locales. L'AEPPEFF, l'unique association qui active dans le domaine de la protection et de la sauvegarde de l'environnement, a saisi officiellement les pouvoirs publics sur la question. Ces associations, qui ne disposent pas de moyens financiers pour agir et encore moins de pouvoir de décision, ne peuvent par conséquent pas faire entendre leurs voix et défendre leurs idées en la matière. laideur environnementale Dans ce décor maussade, il n'y a aucune aire de repos pour familles, aucun aménagement digne de ce nom, à l'exception toutefois d'un centre de loisirs familial géré par l'ANP et d'un ancien jardin public datant de l'époque coloniale et unique refuge pour des familles fuyant le bruit infernal de la ville et l'enfermement dans les maisons. Face à cette laideur environnementale, beaucoup de personnes pensent que cette situation intenable n'est pas étrangère au stress, à la crispation des nerfs et à l'attitude souvent maussade dans les relations sociales, conséquence directe de la colère et du vacarme exaspérant de la ville. Mais les yeux de la population locale restent néanmoins braqués sur l'oued de Béchar. Ce dernier qui traverse la ville sur une longueur de 13 kilomètres, détient sans doute le triste privilège de l'endroit le plus agressif contre l'environnement et de source d'épidémies par ses capacités de nuisance et néfastes pour la santé publique. En période de crues, il charrie sur son passage toutes sortes d'alluvions solides et d'ordures ménagères, déposées aussi par manque de civisme aux abords et dans le lit de l'oued par les riverains. La pollution du cours d'eau, qui dure depuis de nombreuses années, n'a pas été neutralisée malgré les efforts financiers engagés pour venir à bout des nuisances, résultat de l'éclatement pas endroits du réseau d'assainissement traversant le lit de l'oued. Les atteintes à l'environnement dans la wilaya appellent des mesures urgentes pour sauver le cadre de vie dans lequel évoluent les habitants. Pour cela, il est indispensable d'engager des actions salutaires en impliquant le mouvement associatif agréé pour tout programme, dans le présent et le futur, engagé par les pouvoirs publics, lors des aménagements et extensions des zones urbaines.