La problématique de la protection de l'environnement se pose aujourd'hui de façon plus explicite surtout que les répercussions du réchauffement climatiques touchent de plus en plus l'Afrique. “Il faut rénover ou fermer le laminoir à chaud d'ArcelorMittal acquis en 1960, car il présente une grande nocivité aussi bien pour la collectivité que pour l'entreprise elle-même. Le second laminoir, acquis plus récemment, ne se trouve pas loin des normes en matière de pollution”. Telle était la déclaration faite avant-hier par le docteur Serradj de l'université de Annaba devant un parterre de scientifiques, à l'occasion d'une rencontre consacrée à la Journée mondiale d'action sur le changement climatique, tenue les 12 et 13 décembre à l'hôtel Mountazah de Séraïdi. Le site de Séraïdi, qui ne semble pas encore affecté par la pollution qui étouffe Annaba, a été sciemment choisi pour abriter cette manifestation qui reste la première au niveau national et ce, à l'initiative du comité d'organisation composé d'une dizaine de docteurs de l'université Badji-Mokhtar de Annaba et auquel s'est joint un groupe de scientifiques spécialistes en la matière venus des universités de Annaba, Tlemcen, Béjaïa, de Roumanie et de Rennes (France). L'impact sur l'environnement, calculé au moyen d'outils scientifiques très performants, à l'aide de la méthode de cycle de vie des deux laminoirs à chaud d'Arcelor-Mittal, comme expliqué par le conférencier, devait mettre en évidence que le principal pollueur dans le cas précis, était beaucoup plus le fait du processus de fabrication de l'énergie utilisée (électrique en l'occurrence) que de l'entreprise elle-même. L'impact de la pollution générée par Arcelor-Mittal et Sonatrach sur les habitants de Annaba et sa région ainsi que sur le PIB de cette wilaya est si préoccupant qu'une étude d'impact avait été demandée aux chercheurs de l'université sur le sujet, par le ministère de l'Environnement. “Cette étude avait été élaborée et remise au ministère avec copie au wali de Annaba et au directeur de l'environnement depuis plus d'une année, mais il n'y a eu aucune suite jusqu'à présent”, devait révéler le docteur Khaoua. De son côté, le professeur Sari devait déclarer lors des débats : “Les moyens financiers sont mis pour concrétiser la lutte contre la pollution ; si vous n'avez pas d'argent, vous ne pouvez rien faire.” Le Pr Belletaf de l'université de Béjaïa, qui a fait le tour de la situation environnementale au niveau du Bassin méditerranéen, a révélé que “toutes les villes de plus de 100 000 habitants autour de la mer ‘fermée' rejettent plus de 60 % de leurs déchets dans la Méditerranée”. Et d'ajouter : “Notre pays subit les effets nocifs de la forte activité des pays du Nord, dont les littoraux ont une forte densité de pollution, bien que ces derniers, contrairement à nous, agissent pour la combattre. Dix usines de dessalement de l'eau de mer (cinq sont situées en Israël) aggravent encore cette pollution des eaux.” Pour le doyen de l'université de Annaba, “nous devons commencer la dépollution en mettant sur pied une culture globale, en déterminant le rôle de l'université dans le diagnostic et la recherche de solutions, en particulier dans les villes côtières, les plus fragiles”. L'approche scientifique pour évaluer et prendre en charge les problèmes liés à la pollution de la région et, partant, du pays, a été évoquée par les scientifiques. Cette fois, la situation de l'environnement est trop grave pour être occultée, les spécialistes ont décidé de faire un premier pas vers une véritable politique environnementale en Algérie en créant dans les prochains jours, un réseau de scientifiques toutes disciplines confondues qui aura la lourde tâche, non seulement de cerner les problèmes et leur trouver des solutions, mais surtout de sensibiliser les bailleurs de fonds pour concrétiser la dépollution et la protection de l'environnement.