Les pharmacies privées, les hôpitaux, les fabricants de médicaments, les grossistes ont été destinataires la semaine dernière d'une note fixant un délai de six mois pour écouler les stocks des médicaments contenant du dextropropoxyphène (Di-Antalvic) suite à la décision du ministère de la Santé de procéder au retrait progressif de tous les produits à base de la molécule incriminée. Une décision que l'Agence européenne d'évaluation des médicaments a entérinée en début de mois de juillet. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a recommandé aux professionnels de santé de ne plus prescrire de médicaments contenant du dextropropoxyphène, notamment le Di-Antalvic, qui devrait être définitivement retiré du marché d'ici à un an en France. Motif : dans des pays où ce médicament a fait l'objet d'automédication en surdosage, il a été à été constaté de nombreux décès voire un moyen de suicide. Une large concertation avec les principales autorités européennes de santé a été initiée. Le retrait progressif d'ici à un an été alors accordé. Une période qui permettra d'écouler les stocks et de pouvoir trouver d'autres alternatives thérapeutiques. L'application de cette décision à l'Algérie sans l'avis ni des fabricants et encore moins des prescripteurs, fixant un délai très réduit, semble être un sérieux problème auxquels feront face les professionnels du médicament et de la santé. Est-ce que le délai fixé pour l'Algérie par la direction de la pharmacie au ministère de la Santé est suffisant pour les 10 fabricants de ce produit, d'écouler les stocks avant le 12 décembre 2009 ? Chose qui ne pourra pas être réalisée, puisque ces derniers sont dans l'obligation, la loi oblige, d'avoir un stock de produits d'une année. Comment cela pourrait-il être possible, avec un délai aussi réduit, pour les entreprises de prendre les mesures nécessaires pour la mise en œuvre de cette décision. D'autant que les avis restent encore partagés au sein de la communauté scientifique européenne sur cette décision de retrait. Le motif d'intoxications médicamenteuses liées aux utilisations déviantes, invoqué par l'EMEA pour justifier le retrait, n'est que très exceptionnellement observé en France (2% des décès par intoxication médicamenteuse, soit 65 décès par an, a déclaré, à la presse française, le Pr Queneau de l'Académie de médecine. « Si les problèmes de surdosage et d'interaction avec plusieurs médicaments sont indiscutables, les risques de décès par intoxication médicamenteuse dues au Di-Antalvic sont les mêmes que ceux liés à d'autres antalgiques comme le paracétamol », ajoute-t-il en rappelant, par ailleurs, l'efficacité du médicament. Afin d'aider les médecins à trouver la solution de remplacement la plus adaptée à leur patient, l'Afssaps met en place un groupe d'experts chargé d'émettre de nouvelles recommandations sur la prise en charge de la douleur, dans le nouveau contexte. Pour les patients pour lesquels aucune alternative satisfaisante n'aura été trouvée à l'issue de la phase de retrait progressif, l'Afssaps étudiera la possibilité de pouvoir autoriser un accès encadré à la prescription. L'association (dextropropoxyphène/paracétamol) est un médicament antalgique, disponible en France depuis 1964 sur prescription médicale. Il est indiqué dans le traitement des douleurs modérées ou intenses, ou qui ne sont pas soulagées par l'aspirine, le paracétamol ou l'ibuprofène, utilisés seuls. Une trentaine de spécialités pharmaceutiques renfermant cette association est à ce jour commercialisée en France. En 2004, la réévaluation en Suède et au Royaume-Uni du rapport bénéfice-risque des médicaments contenant du dextropropoxyphène (DXP) a conduit ces deux pays à retirer du marché l'association DXP/paracétamol. Cette décision a été motivée par le nombre important de décès enregistrés dans ces deux pays (200/an en Suède pour 9 millions d'habitants et entre 300 et 400/an au Royaume-Uni pour 60 millions d'habitants), dans le contexte d'intoxications volontaires (tentatives de suicide) ou accidentelles à ce médicament. En 2005, en France, les résultats d'une première enquête menée par le réseau des centres antipoison et de toxico-vigilance, concernant les intoxications aiguës au DXP, avaient mis en évidence un nombre de décès inférieur à celui observé en Suède et au Royaume-Uni. Selon certaines sources, le produit en question sera remplacé par un autre médicament, à savoir du paracétamol associé au Tramadol, qui comporte, selon les spécialistes, les mêmes risques de surdosage.