Au moment où sa famille et ses proches l'enterraient à Cherchell, Hakim Hamdane venait d'être relaxé par la cour d'Alger. Le défunt, qui occupait le poste de directeur régional de distribution de Sonelgaz, est mort jeudi dernier au CHU Mustapha, après un malaise respiratoire dans sa cellule à Serkadji. En détention provisoire depuis des mois, il était poursuivi avec quatre de ses collègues pour surfacturation, délit pour lequel il a été condamné, en première instance, à un an de prison ferme, et ses collègues relaxés. Lors de son procès à la cour, le premier responsable de Sonelgaz a témoigné en sa faveur en affirmant que l'entreprise n'a subi aucun préjudice, balayant, en quelques phrases, les accusations portées contre les prévenus. En fait, c'est sur la base d'une simple lettre de dénonciation écrite par un des collègues de Hamdane que ce dernier a été rapidement inculpé et mis sous mandat de dépôt, en dépit d'une maladie respiratoire dont il souffrait. La détention provisoire que la loi a consacrée en tant que mesure exceptionnelle est devenue systématique pour de nombreux juges, y compris quand il s'agit de cadres de l'Etat qui offrent toutes les garanties pour répondre à tout moment à la justice. Le défunt Hamdane n'a pas bénéficié du droit de se défendre en liberté, lui qui devait prendre sa retraite, le 1er août prochain, après 40 ans de loyaux services à Sonelgaz. Sa mort a bouleversé son entourage et ses collègues, tous convaincus de son intégrité et sa compétence. Hier, le verdict de la cour, venu un peu en retard, n'a pas surpris. Il a juste rappelé douloureusement aux consciences ce grave problème du recours abusif à la détention provisoire par les juges, mais aussi le danger de l'utilisation des lettres de dénonciation comme instrument de preuve, au lieu que leur contenu soit consolidé par des enquêtes sérieuses et impartiales. Dans le cas de Hamdane, les services de police, qui sont pourtant impliqués dans cette affaire, à travers la DGSN citée comme victime de surfacturation, n'ont fait que reproduire ce qui était écrit dans la lettre. Il en est de même pour le juge d'instruction qui a placé sous mandat de dépôt Hamdane sans aucune preuve tangible. Autant d'anomalies qui font craindre le pire aux justiciables, dans la mesure où la mise sous mandat de dépôt est devenue mesure qui n'épargne personne. Toutes les voix qui se sont élevées pour dénoncer le recours abusif à la détention n'ont pas trouvé une oreille attentive pour répondre à leurs inquiétudes. La mort de Hamdane dément catégoriquement le principe de justice que les autorités se targuent de préserver. Mais il reste que la décision de la cour a été courageuse car en cela elle réhabilite le défunt Hamdane.