Leur placement sur la chaussée est gérée par des textes de loi. C'est le cas même en Algérie, où de nombreuses lois ont été élaborées pour réglementer l'usage des dos d'âne et des ralentisseurs. Mais sur le terrain, c'est l'anarchie totale. Dans chacune de leurs interventions sur la sécurité routière et les accidents de la circulation, nos responsables mettent en cause les chauffeurs et leur excès de vitesse. Mais rarement l'état défectueux des routes. Ont-ils tort ? Ont-ils raison ? La première hypothèse est la plus plausible. Il faut dire que l'utilisation anarchique des ralentisseurs et dos d'âne contribue, de l'avis même des spécialistes et des usagers de la route, à la dégradation à la fois de la voie et des véhicules. Une véritable jungle ! On retrouve toutes sortes et toutes formes de dos d'âne sur nos routes, mais aucun n'est installé conformément à la loi. Ni les citoyens ni les autorités ne respectent la réglementation en la matière. Dans les villes, comme dans la campagne, l'utilisation des ralentisseurs n'obéit à aucune norme. Il y en a de toutes les formes et à chaque coin de rue. Parfois même sur les autoroutes et les voies express. Une aberration ! Et cela n'est pas sans conséquence sur les véhicules. Les témoignages des automobilistes, des garagistes et des spécialistes auto sont sans appel. Le diagnostic est toujours le même. Les champignons de la discorde
De tous les ralentisseurs et dos d'âne utilisés en Algérie, les champignons métalliques ou clous font plus de dégâts. «Si tu passes dessus une fois, ton véhicule ne risque pas grand-chose. Mais les passages répétés provoquent des dégâts incommensurables. C'est toute la suspension de la voiture qui passe souvent sur ces clous qui accuse le coup. Même s'ils sont neufs, certains véhicules demandent une révision générale», explique un garagiste d'Alger. Les parties les plus touchées sont surtout les roulements, les cardans et les amortisseurs. Les utilisateurs, eux aussi, se plaignent des effets de ces champignons. «J'en ai fait les frais. Je peux vous dire qu'ils engendrent des dégâts très importants sur les véhicules. J'emprunte une voie où sont plantés des clous en guise de ralentisseurs. Au bout d'une semaine, j'ai dû remplacer les roulements, dont un s'est carrément brisé. J'ai révisé la suspension à maintes reprises», affirme Azeddine, chauffeur dans une entreprise. Qui a autorisé l'importation de ce genre de ralentisseurs, qui pourtant ne sont utilisés dans aucun autre pays au monde ? Qui a donné l'autorisation pour l'utilisation de ces champignons sur les routes algériennes ? Il semblerait que l'importation de ce matériel est un business florissant. A près de 400 DA l'unité, les importateurs de ces champignons font, sans nul doute, fortune, et ce, au détriment des usagers de la route. Malgré les dénonciations des spécialistes, en particulier le célèbre animateur de l'émission Tariq Essalama de l'ENTV, Mohamed Lazouni, les clous continuent d'être utilisés. On en retrouve à Alger, à Bouira et dans de nombreuses wilayas. Et cela sans que les autorités concernées, en l'occurrence le ministère des Travaux publics et celui des Transports, ne bougent pour mettre un terme à cette mascarade. Outre les champignons, les ralentisseurs en caoutchouc sont également critiqués. Non seulement ils ne répondent pas aux normes, mais surtout leur utilisation provoque aussi la détérioration de la voirie. «Pour fixer ce type de ralentisseur, il faut percer le bitume. Et c'est ce qui provoque la catastrophe. Les eaux de pluie s'infiltrent dans les trous et provoquent la détérioration de la couche de bitume», explique encore Mohamed Lazouni (lire l'interview). Théorie et réalité L'autre drame dénoncé par les usagers de la route est la qualité des ralentisseurs. «En plus de leur placement anarchique, les dos d'âne, en Algérie, ressemblent plutôt à des montagnes érigées sur les routes. Ce sont de véritables rochers installés sur les routes. Si l'avant de la voiture passe, l'arrière devrait être porté. Vous vous rendez compte ? On risque facilement de percuter le sommet du dos d'âne et même d'y laisser des pièces de voiture», s'indigne un utilisateur. Dans certains quartiers de la capitale, les ralentisseurs sont érigés «par n'importe qui et n'importe comment». «Parfois, on retrouve sur 100 mètres quatre dos d'âne et plus. Qui décide de leur emplacement ? On a l'impression que les citoyens prennent possession des routes et font ce qu'ils veulent sans qu'aucune autorité ne les en empêche», déplore un autre automobiliste. Pourtant, la loi algérienne est claire. Selon l'article 27 de la loi 04-16 de 2001, seul le wali est habilité à autoriser la construction d'un ralentisseur. «Les ralentisseurs constituent des dispositifs matériels destinés à la réduction de la vitesse sur certaines voies. Leur mise en place ainsi que les lieux de leur implantation sont soumis à l'autorisation préalable du wali, sur proposition du président de l'Assemblée populaire communale. Les ralentisseurs doivent être implantés selon des normes et mesures unifiées à travers le territoire national», lit-on dans l'article en question. Ce texte et bien d'autres ne sont malheureusement pas respectés. La réalité du terrain contredit les textes…