Les villageois d'Ichekalène, situé à 3 km du chef-lieu de la commune, ont enterré les quatre jeunes tués par balle dans une embuscade tendue par un groupe armé, à mi-chemin du chef-lieu, sur la route qui mène au dit village. Au lendemain de l'attaque, les avis sur les auteurs de ce massacre sont mitigés. Chacun y va de sa propre version. Sur la chaussée, des éclats de verre et des traces de sang couvertes de terre témoignent de la violence de l'attentat. Le lieu est à une centaine de mètres des premières demeures et entouré d'un vaste champ de vigne et de figuiers. Densément boisé sur les accotements, l'endroit offre toutes les conditions pour perpétrer une attaque furtive dans la plus totale quiétude. Jusqu'à ce lundi noir, le village évoluait dans la sérénité malgré le manque de développement qui caractérise particulièrement cette partie de la localité de Tadmaït, à maints égards. Chemin faisant, au bout d'une impasse, la maison de l'une des victimes. Ils étaient tous là, les parents et proches de Hocine Chaouichi, l'un des quatre jeunes assassinés. Son frère aîné, se tortillant de tristesse, la mine défaite après deux longues veillées, accepte de nous parler. Convaincu de la piste terroriste, il affirme que « des témoins oculaires nous ont, en effet, livré leurs témoignages. Il s'agit d'un villageois qui se rendait dans son champ avant l'attaque et des ouvriers qui s'affairaient dans la récolte de raisin. » Malheureusement, nous n'avons pas pu rencontrer ces témoins dans l'après-midi d'hier. « Le premier, raconte notre interlocuteur, nous a rapporté qu'en rejoignant son champ de vignes, a rencontré des hommes barbus, armés et en treillis pour certains, en tenue de policiers pour d'autres. Les terroristes étaient en position d'embuscade. Ils lui ont juste signifié de continuer son chemin. » Un autre proche de la même famille livre la déclaration des ouvriers, qui seraient tombé nez à nez avec les assaillants après l'opération, au moment du repli. « Ils nous ont recommandé de quitter sur le champ la plantation, en nous disant que les militaires allaient intervenir à coups d'obus et que c'était dangereux d'y rester », avaient confié les ouvriers à notre vis-à-vis. À en croire les avis des uns et des autres, les terroristes guettaient le retour d'un pick-up blanc, de marque Nissan qui approvisionnait le détachement militaire installé depuis seulement dix ou quinze jours au lieudit Aânnan, à quelques encablures, sur une crête qui domine le village Ichekalène. Les militaires sont en opération de ratissage, indique-t-on. L'on indique que ce véhicule à bord duquel se trouvaient quatre militaires a rebroussé chemin au niveau de l'école primaire du village après avoir entendu les coups de feu. La distance entre le véhicule militaire, banalisé et la Peugeot 504 empruntée par les quatre jeunes villageois était à environ 600 m. Après leur forfait, les criminels ont délesté les victimes de tout objet de valeur et de leur argent. « Les terroristes ont pris à mon frère une somme de 15 millions de centimes qu'il allait déposer dans une banque », poursuit l'homme visiblement pas encore remis de ses émotions après la perte de son frère aîné. Indignées, les familles reprochent aux autorités civiles et militaires la lenteur de leur intervention. Cependant, les soupçons et la colère de certains proches ne se sont pas dissipés complètement malgré l'ouverture d'une enquête par la Gendarmerie nationale afin d'élucider les circonstances de cet abominable acte. « Quoi qu'il en soit, l'Etat est responsable de la sécurité des personnes. Pourquoi n'a-t-on pas sécurisé le village, sachant que les terroristes sont présents dans les maquis de la localité. Pourquoi n'a-t-on pas enclenché une opération de ratissage juste après le drame ? Ils ont mis plusieurs heures pour intervenir », dit un jeune, en colère, les yeux larmoyants, qui suivait la discussion silencieusement avant qu'il n'intervienne. À la question de savoir si des garanties ou des assurances leur ont été données par les autorités, les familles endeuillées affirment qu'elles n'ont reçu aucune délégation à ce jour. « Nous avons emmenés les corps de nos enfants nous-mêmes et nous les avons transportés avec l'ambulance de l'APC ». Par ailleurs, à l'enterrement, on a remarqué la présence des présidents des assemblées de wilaya et communales aux côtés de représentants de l'administration, en la personne du secrétaire général de la wilaya.