Au début de ce mois d'août, nous quittait Francis Jeanson. Durant la guerre d'Algérie, au risque de sa liberté et au péril de sa vie, le philosophe allait nous montrer comment serait bien vaine la pensée qui refuse l'action. Engagé dès son jeune âge dans la résistance à l'occupant nazi, il comprit d'emblée que la liberté n'a pas de frontière et la dignité pas de limite. Dès 1955, dans son ouvrage l'Algérie hors la loi, il se rangeait à nos côtés car, pour lui, est légitime tout combat contre l'oppression des hommes ou la domination des peuples. Traduisant sa conviction dans ses actes, il allait, au cours de nombreuses années, mettre quotidiennement à la disposition de la Fédération de France du FLN son autorité d'écrivain, sa réputation de philosophe et le poids de la revue de Jean-Paul Sartre les Temps modernes. Il ne pouvait admettre que son pays, la France, dont il entendait défendre les grands principes humanitaires, puisse au XXe siècle traîner encore ses citoyens dans une guerre anachronique de reconquête coloniale, sans que des voix autorisées s'y opposent publiquement. Recherché par tous les services de police et de la DST, il ose les défier en tenant une conférence de presse clandestine en plein Paris pour témoigner de son refus et d'une certaine idée de la France. Condamné à dix ans de prison comme responsable des « Porteurs de valises » et du « Réseau de soutien » au FLN, il vivra dans la clandestinité quatre années après l'indépendance, alors que nous-mêmes étions libérés du carcan colonial. L'homme ne fut pas un militant du FLN, il fut davantage défenseur de la personne humaine, de son intégrité, de sa liberté et de sa dignité, en fait, un défenseur des droits de l'homme. A nos côtés, Jeanson fut d'un précieux apport et d'une efficacité sans bornes. L'histoire ne manquera sans doute pas de le dévoiler lorsqu'elle pourra s'écrire, sans passion pour les uns ni amertume pour les autres. « Francis, Tu demeures toujours présent au cœur de tes amis, ceux avec lesquels tu as partagé six années de vie clandestine d'une intensité que seuls peuvent ressentir ceux qui l'auront vécue. Ils formulent l'espoir que l'Algérie honorera ta mémoire comme tu as su participer à son juste combat. Francis, Il n'est pas dans nos habitudes de pleurer. Mais il nous faudra beaucoup pour retenir nos larmes. » Merci l'ami. Adieu frère. Les membres du comité fédéral de la Fédération de France du FLN Alger, le 19 août 2009 Ali Haroun, Omar Boudaoud, Saïd Bouaziz