Oran est une grande ville commerciale et touristique. Elle est également une petite ville artisanale. En effet, sur les 125 métiers d'artisanat des années 1980, il n'en subsiste qu'une soixantaine. L'état des lieux est désolant. Les tisserands d'El Hamri ont pratiquement tous disparu. A Saint-Pierre, les cordonniers ont plié bagages et les petites fabriques de chaussettes, qui ont inspiré au défunt Alloula la fameuse pièce théâtrale « El Khobza », ne constituent plus qu'un lointain souvenir. Au début des années 1980, les différents métiers de l'artisanat constituaient le principal revenu d'environ 20 000 familles oranaises. Les artisans couturiers du mythique quartier de Derb se sont reconvertis au commerce en gros de bonneterie. A Médioni, les joailliers ont fermé boutiques alors qu'à Ville Nouvelle, quelques-uns d'entre eux seulement continuent à entretenir l'illusion d'une joaillerie artisanale et traditionnelle. L'avenir ? Les artisans ne veulent même pas y songer ! Selon des statistiques fiables, 8 000 personnes exercent encore des professions classées artisanales. Certains artisans, parmi ceux que nous avons rencontré, déplorent le manque de matière première tels le bon bois, la laine, le cuir, l'or, le cuivre... sur le marché local, et l'importation de tels produits est hors de prix pour eux. A titre d'exemple, AGENOR n'assure plus la distribution de l'or. La laine, la soie, le corail coûtent de plus en plus chers. Le bois est, selon les artisans contactés dans le cadre de ce travail, de piètre qualité. Les roseaux sont exportés vers l'étranger et l'extraction de l'argile n'est plus aussi facile qu'autrefois, déplore un autre artisan. Depuis l'an dernier, plusieurs ministères ont été impliqués pour redonner à l'artisanat sa place au sein du marché local pour l'impulsion d'une nouvelle dynamique de l'emploi. Ainsi le ministère du Travail et de la Sécurité sociale vient de promulguer un ensemble de textes visant « une stabilité et une protection des métiers de l'artisanat. » Pour sa part, le ministère des PME a annoncé des aides et des facilités en faveur des jeunes désireux d'exercer une activité dans ce secteur. Des prêts allant de 200 à 500 millions de centimes seront octroyés aux jeunes qui projettent la création d'ateliers ou de fabriques. Alors que les responsables du tourisme comptent promouvoir les professions en imposant des expositions permanentes au sein des infrastructures hôtelières classées, ceux de la culture font dans les « quinzaines artisanales ». Ainsi, les 48 wilayas du pays sont conviées, à tour de rôle, à exposer durant toute la saison estivale leurs créations artisanales locales. La principale décision est celle prise par les responsables du ministère de l'Enseignement et de la Formation professionnelle ayant trait à la création de nouvelles spécialités liées aux métiers de l'artisanat. Grâce à ces mesures, le gouvernement compte corriger le tir et replacer des métiers qui étaient longtemps considérés comme faisant partie de l'authenticité et surtout de l'identité nationale.