Une équipe de bénévoles, hommes et femmes, s'affaire durant tout un mois à préparer le f'tour aux démunis dans une ambiance familiale. Dimanche, 18h 30. Une file impressionnante s'est constituée à une porte annexe de la mosquée Okba Ibnou Nafaâ, sise au centre de la ville d'El Khroub. Des hommes, quelques femmes et des enfants attendent de prendre place dans une ancienne salle de prière, convertie, pour la circonstance, en restaurant. L'espace, immense, est garni de tables pour huit personnes chacune. Elles sont proprement apprêtées et les couverts sont déjà mis ; on n'attend plus que la chorba fumante, dont les effluves se dégagent de la grande cuisine, envahissant l'espace, mettant l'eau à la bouche des quelque 300 personnes ayant pris place dans un joyeux brouhaha. Quelques personnes sont derrière l'initiative, en l'occurrence les membres de l'association de la mosquée. L'expérience, heureuse, semble-t-il, en est à sa troisième année consécutive. Le vice-président de l'association, El hadj Mohamed Mahimoud, explique : « La première année nous nous sommes lancés dans ce petit projet, celui d'offrir le couvert durant le mois sacré aux personnes démunies et autres de passage, ou aux travailleurs issus des autres wilayas, loin de leurs familles, et nous avons fait avec les moyens du bord ; nous avons constaté que les bienfaiteurs sont très nombreux, et nous avons reçu de l'aide, notamment des dons en nature provenant de bouchers, de marchands de fruits et légumes, alimentation, etc. les gens ont eu confiance parce que, déjà, nous n'acceptons pas d'argent, nous préférons les denrées alimentaires, que nous gérons au jour le jour. » Pour ce faire, un registre est scrupuleusement tenu, où sont consignés au détail près toutes les entrées et sorties des dons en nature, sur la base desquels est élaboré un menu substantiel, composé invariablement de la traditionnelle chorba, d'une salade, d'un plat de résistance, avec poulet ou viande, en plus d'un dessert (fruit et pâtisserie) et d'eau gazeuse et minérale. L'on distribue, à la fin du repas, et à tout le monde, un sachet de lait à emporter. L'on est également très tatillon sur l'hygiène, puisque, nous dit-on, les services du bureau d'hygiène communal (BHC) procède régulièrement à l'analyse des mets. Une équipe, composée de femmes, s'occupe de la cuisine et de la propreté de l'endroit à titre bénévole. Un homme, hôte habitué des lieux, nous a fait part de sa gratitude et de sa satisfaction en ces termes : « Ici nous sommes bien traités, comme des invités de choix ; j'habite à Annaba, je suis loin de ma famille, et je suis content de retrouver la convivialité et l'ambiance familiale. On nous fait même des menus spéciaux pour les 15e et 27e jours du Ramadhan, comme à la maison ! » Une femme, accompagnée de ses enfants, visiblement dans un grand dénuement, s'est dite comblée. Même des étrangers viennent rompre le jeûne dans ce restaurant de la solidarité, notamment des Egyptiens. Selon le staff organisateur, dont l'imam de la mosquée, tout le monde est le bienvenu, aucun tri ni questionnaire ne sont faits, même éventuellement dans le cas de faux nécessiteux. Les gens étaient plutôt dubitatifs quant à la réussite d'un tel projet, au vu de toutes les indélicatesses constatées ici et là, comme notamment les affaires sordides de couffins de Ramadhan détournés et autres malversations. Pourtant, les choses semblent bien marcher, et les donateurs affluent de toutes parts. El Hadj Mahimoud espère mieux équiper l'espace à l'avenir, en particulier la cuisine, qui demande plus de commodité. Avec son équipe, il ne compte pas s'arrêter en si bon chemin, « Nous améliorerons les choses et comblerons les lacunes au fur et à mesure », assure-t-il en guise de conclusion.