Le service de la citerne d'eau commandée par téléphone est entré dans les mœurs locales. Les propriétaires de tracteurs, ces engins des champs agricoles par excellence, qui ont changé de vocation pour s'adonner exclusivement à la vente de l'eau dans des citernes de 3 000 l, deviennent par les temps qui courent, les « stars », excusez le terme, de toute une ville livrée, toute honte bue, aux épisodes rocambolesque des pénuries d'eau. Dans les cafés, à l'occasion des veillées de Ramadhan, au marché ou dans la rue, on ne jure plus que par ces fameux grands engins ! Grâce à eux, s'exclame-t-on, on a pu être alimentés en eau ! Un médecin raconte qu'il a fait le tour de toute la ville à bord de son véhicule, juste, a-t-il dit, pour trouver un tracteur qui puisse lui « livrer quelques jerricans d'eau ». Pour s'alimenter en eau, et devant le fait accompli de l'absence de la moindre goutte du précieux liquide dans les robinets, ce n'est plus une sinécure, (attendre simplement le passage de ces engins très sollicités et réservés d'avance), mais il convient désormais d'aller les chercher dès qu'ils font le plein de leurs citernes. Face à la crise chronique d'eau, certains ont trouvé la « bonne » solution de noter le numéro de téléphone d'un conducteur de tracteur…pour l'appeler en cas de besoin ! Ce service de la citerne commandée par téléphone est entré dans les mœurs locales après que le citoyen eut perdu toute confiance dans les organismes chargés de l'AEP. Las de subir les contrecoups de cette situation dramatique, les habitants de cette ville n'ont plus le choix que de prendre leur mal en patience, ou prendre, comble du ridicule, un rendez-vous chez un tracteur et attendre pour s'abreuver ! Les ronflements des moteurs de ces engins qui sillonnent, tels des vautours, les quartiers, sont devenus très familiers pour la population qui semble parfaitement s'adapter à ces nouvelles conditions qui n'émeuvent à vrai dire plus personne. Aux dernières nouvelles de la énième rupture de la distribution d'eau, signalée depuis plusieurs jours, et de surcroît en plein mois de jeûne, on avance la même histoire de la panne des pompes pour justifier cette grave crise qui fait plus que jamais courir la population derrière les tracteurs. Indignés de cette situation qui n'a que trop duré, certains citoyens parlent d'une faillite générale dans la prise en charge de ce problème, dont les causes, comble de l'incurie, ont toujours été les mêmes à chaque fois qu'il se pose. Le hic est que pour rétablir l'AEP, les services concernés doivent ce déplacer…à El Baroughia, dans la wilaya de Médéa, pour ramener une nouvelle pompe. Ceci dit, à chaque fois qu'une pompe tombe en panne, c'est toujours la même mission qu'il faut prévoir. El Baroughia est devenue très célèbre ici à El Milia de par tout le vacarme fait autour de ces missions à effectuer dans cette ville lointaine pour ramener les fameuses pompes, et ce à chaque épisode de ce feuilleton interminable !