Les bilans demeurent encore partiels, car les huileries triturent encore les olives. Mais les indicateurs sont sans appel : un oléiculteur de la région de Maillot (Bouira) affiche grise mine : ses 2000 oliviers s'étalant sur 10 hectares n'ont produit que 160 litres d'huile, cette année, contre 1 800 litres l'an dernier. La situation est similaire à Aït Melikèche, sur les hauteurs de Tazmalt (Béjaïa). «C'est une mauvaise récolte. Mes oliviers ont produit très peu d'huile. Il y a juste de quoi couvrir les besoins de la famille durant quelques mois», se désole Hakim, qui vient de finir la cueillette de ses quatre oliviers. Dans cette wilaya qui produit, chaque année, près du tiers de la production nationale d'huile d'olive, «la production oléicole accuse une chute de près 50%», selon les estimations de la chambre locale d'agriculture. Près du quart des oliveraies (15 000 ha) ont été cueillies. Le volume prévisionnel s'établit sous le seuil de 9,5 millions de litres (495 000 quintaux d'olives), contre 18,4 millions de litres, l'an dernier (802 766 quintaux), indique la chambre d'agriculture. «Les rendements s'établissent en moyenne à 11 quintaux à l'hectare et à 19 lites au quintal», fait savoir la même source. C'est un peu plus qu'en 2009-2010, où Béjaïa n'a pas produit que de 7 millions de litres d'huile avec une récolte qui n'a pas dépassé les 300 000 quintaux d'olives. Cette saison, l'on est loin du bon rendement de 2008-2009, où 21, 5 millions de litres ont été produits. Le record a été enregistré en 2003-2004, la production ayant frôlé les 26,8 millions de litres. M. Meziani, un des 431 oléifacteurs de Béjaïa, indique que «les rendements sont faibles, cette année». Une source du ministère de l'Agriculture prévoit une réduction de la production d'huile d'olive à moins de 30 millions de litres cette année. De 22 quintaux de rendement à l'hectare, en 2008, nous sommes passés à 6, à 15 puis à 11 quintaux d'olives cueillis à l'hectare durant les trois dernières années. La filière oléicole a été particulièrement affectée cette année par le faible rendement des récoltes. Selon un spécialiste de l'ITAF, ce repli du rendement «est essentiellement imputable à la sécheresse qui a sévi cette année, mais aussi à la vieillesse du verger dont les capacités de production ont tendance à évoluer en dents de scie». «De plus, les vergers ne sont ni fertilisés ni entretenus, et les cultures ne sont pas intensives», explique l'agronome. La wilaya de Béjaïa totalise 4 millions d'oliviers répartis sur 50 500 ha. Mais la structure des vergers est éparse. Les 35 000 exploitations agricoles éparpillées en montagne ou dans la vallée sont petites. Elles n'ont en moyenne que 4 ha. La quasi-totalité de la production est absorbée par l'autoconsommation. Les oliviers produisent à peine les besoins de leurs petits propriétaires. La filière est tributaire des aléas de la pluviométrie, car seuls 5% de ces terres sont irrigables. Rares sont les exploitations qui répondent aux normes de qualité exigées pour l'export. La filière oléicole fait aussi face au manque d'organisation des oléiculteurs. Ce sont autant de facteurs bloquant qui pénalisent la filière. L'Algérie n'est qu'un petit producteur face à l'Espagne (40% de la production mondiale), l'Italie (25%) ou encore la Grèce (18%).
Concurrence déloyale
Des quantités inestimables présentées comme étant de «l'huile d'olive» sur le marché (formel ou informel) ne sont en fait que de l'huile lampante (acide) mélangée avec de l'huile de tournesol ou de soja. «Le marché national est en perpétuelle expansion. Mais il est fortement dérégulé. Les règles commerciales sont floues, ce qui créé une concurrence déloyale massive et pénalisante», se plaint un opérateur dans le conditionnement. Le comble c'est qu'en Algérie, le mélange de l'huile d'olive avec d'autres huiles n'est pas illégal. C'est une pratique courante. Un conditionneur réclame l'interdiction pure et simple de mélanger les huiles. Le critère qui en définit la qualité reste le degré d'acidité. Le premier choix des huiles d'olive est appelé «la vierge extra», car elle ne doit pas dépasser 1% d'acidité. L'huile d'olive vierge fine contient 2% d'acidité. L'huile d'olive vierge courante a moins de 3,3% d'acidité et enfin l'huile lampante dépasse 3,3% d'acidité. Ce sont les conditions de production qui décident du niveau d'acidité de l'huile. Des olives rapidement triturées (48 heures au plus tard) donnent de bons crus.
Le label, un vieux projet
Le processus de labélisation qui est toujours en cours depuis six ans «est en phase de finalisation», affirme un responsable de l'Institut technique de l'arboriculture fruitière (ITAF) qui animait une communication lors d'un séminaire dédié à l'oléiculture qu'a abrité, récemment, l'université de Béjaïa. La commercialisation souffre encore de l'absence d'appellation d'origine contrôlée et de label. La création d'un label est un vieux projet et tarde à voir le jour. En novembre 2008, le ministère de l'Agriculture a promulgué un arrêté fixant les modalités et procédures d'attribution des indications géographiques des produits agricoles. Ceci peut ouvrir la voie à une labellisation des produits du terroir, dont l'huile d'olive. «Pour avoir un label, il faut en faire la demande et se conformer à un cahier des charges définissant l'aire géographique, la qualité, la superficie, la variété du produit, et d'autres critères», explique un responsable de l'ITAF.