Un pôle pénal financier à compétence nationale chargé des affaires financières complexes sera créé en Algérie dans le cadre du projet de loi, adopté jeudi en Conseil des ministres, qui complète la loi de 2006 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. Le projet de loi, qui prévoit ce pôle financier qui sera rattaché au tribunal d'Alger-Sidi M'hamed, permettra ainsi de «mettre la législation en concordance avec la Constitution révisée en 2016», tout en codifiant les missions de l'Organe national de prévention et de lutte contre la corruption (ONPLC), précise un communiqué rendu public à l'issue de la réunion du Conseil des ministres. Ce projet de loi «explicite et conforte les missions et attributions de cet organe» et «prend également en charge les recommandations faites par l'instance spécialisée des Nations unies» à la suite de l'évaluation qualifiée de «positive» de la politique algérienne de prévention et de lutte contre la corruption. Il porte, également, sur «la protection légale des dénonciateurs de faits de corruption, y compris au niveau de leur environnement professionnel». Ce «moyen supplémentaire» de lutte contre la corruption «sera mis en œuvre en même temps que les cadres gestionnaires demeureront protégés par les dispositions du code de procédure pénale qui subordonne l'ouverture de toute information judiciaire au dépôt d'une plainte par les organes sociaux de l'entreprise ou de l'administration ayant subi le dommage». Le texte prévoit, en outre, «la création d'une agence nationale de gestion des avoirs issus des infractions de corruption. Ce mécanisme permettra la conservation des avoirs liés aux affaires de corruption qui sont placés sous séquestre judiciaire en attendant le jugement ou qui sont saisis par décision de justice». Intervenant à l'issue de l'adoption de ce projet de loi, le président Bouteflika a invité «tous les acteurs de la société à concourir à la politique de prévention de la corruption en rapportant ces faits lorsqu'ils sont établis, de sorte à permettre à la justice d'intervenir avec les moyens efficaces mis à sa disposition, pour appliquer la loi qui réprime sévèrement ce fléau», souligne le communiqué. Le président Bouteflika a salué «ce renforcement de la législation de prévention et de lutte contre la corruption, un fléau universel qui n'épargne pas notre pays» et noté «avec satisfaction que la revue consacrée par les instances compétentes des Nations unies à la politique algérienne de lutte contre la corruption a débouché sur le constat que notre pays se situe parmi les Etats les plus engagés dans ce domaine». L'ONPLC, rappelle-t-on, a initié depuis 2016 un programme national de sensibilisation et de formation contre la corruption qui a profité à 4400 agents des administrations publiques et du secteur économique aussi bien public que privé, ainsi que des corps de la sécurité et des représentants du mouvement associatif. Depuis début 2017, l'Organe s'est attelé à dispenser cette formation dans les régions intérieures du pays, dont ont bénéficié 700 agents publics de 10 wilayas. Soulignant «l'intérêt particulier» qu'accorde l'ONPLC pour le volet coopération et coordination avec les différentes institutions administratives, le responsable avait fait état, également, de la mise en place d'un groupe de travail chargé d'élaborer «une cartographie des dangers de corruption» dans le secteur des finances. Cette cartographie devrait inclure dans une première phase les secteurs de l'habitat, la santé et le commerce, avant de s'élargir aux autres secteurs, avait-il affirmé, ajoutant, dans le même cadre, qu'un atelier avait été ouvert en vue de l'élaboration d'un projet stratégique national de prévention contre la corruption qui sera déposé auprès des autorités spécialisées dès son parachèvement. Dans le même sillage, le président de l'ONPLC a annoncé que ses services avaient reçu 54 000 déclarations de patrimoine d'élus locaux et près de 6000 déclarations émanant de hauts fonctionnaires de l'Etat, ajoutant que son instance devrait recevoir près de 100 000 déclarations d'agents publics occupant des postes corruptibles à partir de début 2019. Le même responsable avait dénoncé, dans ce cadre, la non-coopération de certains fonctionnaires, obligés par loi de déclarer leur patrimoine, estimant qu'ils «ignorent la missions et prérogatives de l'Organe en le considérant un simple appareil administratif».