Il est de 6,9 milliards de dollars seulement ! En effet, on vient d'apprendre, de manière sournoise et en catimini, non pas de sources algériennes qui, visiblement, semblent quelque peu gênées aux encablures, mais à partir d'une information formelle distillée par une agence de presse britannique, citant une source de «haut rang» du ministère des Finances (qui est cette taupe ?), que l'évaluation pour l'acquisition de la filiale d'OTH(1) qu'est OTA, possédant la marque Djezzy, a été fixée à 6,9 milliards de dollars ! Souvenons-nous que l'administration des finances de notre pays a attribué le marché de l'évaluation(2) de la part d'OTA au cabinet d'affaires Shearman & Sterling LLP-France (filiale française de la société-mère britannique) pour donner à cette transaction un caractère «scientifique et légaliste», surtout pour que les lampistes se protègent des soubresauts futurs que ce dossier ne manquera pas de soulever, tôt ou tard, après que les parrains du dossier auront quitté le pouvoir, très prochainement. Les déclarations, du côté algérien de la transaction, semblent d'une certitude quasi-divine tant au niveau de celui qui détient les cordons de la bourse (pour compte), que de celui qui a la charge technique du dossier. A l'autre bout du téléphone, le groupe russo-norvégien Vimpelcom, qui a acquis 51,7% des parts d'OTH en déboursant 6 milliards de dollars au compte de S. Sawiris pour acquérir ainsi la propriété d'OTA, se voit déjà attribuer une «prime» de 900 millions de dollars (bismallah), différence constatée entre le coût d'achat à S. Sawiris (6 milliards de dollars) et celui évalué par un cabinet de renommée mondial à 6,9 milliards de dollars. Qui dit mieux ? Bien que le groupe Vimpelcom ne souffle mot sur ses intentions et sur ses prétentions financières, pour l'instant, se réservant le dernier mot, il faut noter, d'ores et déjà, qu'en l'espace d'une transaction (achat d'OTA à S. Sawiris et sa probable revente à l'Etat algérien) il escompte gagner 900 millions de dollars dès la conclusion de l'opération ! Je dis bien pour l'instant, car il n'y a pas de raison objective pour que le groupe Vimpelcom n'augmente pas les enchères, compte tenu de la volonté inébranlable affichée par le pouvoir actuel de «récupérer à tout prix» cette entreprise. Le comportement normal de tout acheteur averti eut été de ne jamais afficher sa décision d'achat, voire de répandre l'information de son intention de renoncer à cet achat de manière à faire baisser les prix. Or, dans ce cas de figure tout à fait particulier (à enseigner dans nos universités en matière de management commercial !) les pouvoirs publics se comportent de telle façon à renchérir les prix à leur propre détriment ! Que cache cette volonté d'acquisition d'OTA ? Pourquoi des échéances aussi réduites pour une affaire aussi importante ? Les intérêts de notre pays ont-ils été préservés ? Pourquoi l'Autorité de régulation de la téléphonie ne s'est-elle pas exprimée sur ce dossier depuis le début ? En déclarant expédier le dossier dans un timing n'excédant pas la date des élections législatives (mai 2012), le ministre des Finances fait prendre un risque, à la charge de l'Algérie, qui nous semble superfétatoire et entraîne un renchérissement exorbitant de la transaction, essentiellement induit par l'empressement et la volonté affichée d'acquisition. Le ministre technique, quant à lui, s'est ravisé, laissant la décision au seul ministre des Finances, interrompant le processus dit de la «révolution numérique»(3) dans notre pays(4), il déclare attendre que le dossier Djezzy soit finalisé «pour ne pas pénaliser les 16 millions de clients de l'opérateur»… No comment. La relation de cause à effet étant infime, il est clair que d'autres éléments doivent dicter cette attitude. Entre-temps, le groupe Vimpelcom(5) «s'est engagé à poursuivre les discussions en vue d'examiner les modalités d'une éventuelle cession à l'Etat algérien d'une participation majoritaire dans le capital de sa filiale OTA». Entre-temps, comme par hasard du calendrier, les condamnations se multiplient à l'encontre de OTA et toutes les institutions de l'Etat se rappellent ainsi à son bon souvenir. Haro sur le baudet ! Après l'administration fiscale(6), c'est au tour de la Banque d'Algérie de se réveiller aujourd'hui, après plusieurs années de sommeil, et de réclamer 1,3 milliard de dollars pour violation, par OTA, de la réglementation des changes, ce que le tribunal d'Alger vient de lui accorder ces derniers jours. Il est évident que les recours d'OTA, filiale d'OTH, s'ils ne trouvent pas d'écho auprès des tribunaux nationaux, vont se déplacer vers l'extérieur (Tribunal de Genève, spécialisé dans les relations commerciales internationales), ce qui pourrait se traduire par une tout autre forme d'arrêt en arbitrage. OTH, de toute façon, récuse ces accusations et affirme que «sa filiale et le haut responsable de Djezzy incriminés n'ont pas commis d'infractions à la réglementation algérienne». Dans ce dossier, la messe est dite, les prochains jours vont nous éclairer sur les intentions des uns et des autres et surtout nous révéler les dessous de table qui piègent cette transaction. Notes -1). Orascom Telephony Holding et Orascom Telecom Algérie. -2). On ne connaît pas le montant de la facture du cabinet retenu pour évaluer OTA à 6,9 milliards de dollars mais l'ayant évalué, pour ma part à 7 milliards de dollars, soit un différentiel de moins de 100 millions de dollars, le ministre des finances aurait été bien avisé de me confier la réalisation de cette évaluation, je lui aurais coûté moins cher et en dinars, à coup sûr ! -3). Le rapport du CREAD 2008, à cet endroit est très significatif des retards accumulés et des moyens prioritaires à mettre en œuvre pour les rattraper. -4). Il serait plus judicieux que notre pays fasse fonctionner les technologies existantes et installées et qui ne fonctionnent pas ou peu, plutôt que de s'aventurer dans les dernières technologies de 3e génération (3G) à utilisation restreinte (appelées e. Algérie 2013). Exemple frappant : les 28 000 étudiants de l'université d'Alger 3, de sciences économiques de Dély Ibrahim, ne disposent pas du simple dispositif d'internet pour accompagner leurs études ! -5). Les termes employés dans ce mémorandum sont loin de refléter un quelconque engagement obligé, ce qui revient à dire que le groupe entend bien tirer le maximum d'argent de cette transaction.6). Un redressement fiscal de quelque 230 millions de dollars, augmenté d'une amende de 193 millions de dollars sont infligés à OTA et traités par la justice de notre pays.