Le FLN ne se consacrait pas, jeudi dernier, à rendre hommage à Abane Ramdane, l'architecte de la Révolution et dont l'Algérie commémorait le 61e anniversaire de sa mort. Il était occupé à tester une nouvelle forme de coup d'Etat scientifique, celle électronique. Dans cet antique parti qui désapprend l'histoire, la chronique est celle des coups fourrés et des résistances des caciques contre les nouveaux dirigeants adoubés par des cercles qui ont une lointaine conception des statuts et de l'éthique politique. Sa nouvelle direction, qui a pu débarquer avec la violence que l'on sait l'expansif Ould Abbès, se révèle finalement incapable de prendre le simple contrôle de son propre site internet. Elle saisira, selon les derniers échos, les services de sécurité pour «débusquer» ceux qui ont mis en ligne une lettre attribuée à l'actuel coordinateur du parti, où il appelait en substance à reconduire le président de la République lors de la présidentielle d'avril prochain. Cet appel, qui serait un faux, vu qu'il est démenti par le signataire, est en revanche authentiquement du FLN, puisqu'il émane de la mémoire immédiate du parti et reprend les mêmes termes avec lesquels il annonçait la «fête démocratique» d'avril 2014, consacrant le 4e mandat. Le parti FLN se débat contre lui-même et le coup d'Etat n'est jamais parfait. Si un tel chamboulement des structures et des institutions, parmi lesquelles l'APN, aboutit à décrédibiliser ce processus électoral auquel le pouvoir s'accroche avec la dernière énergie, il convient de conclure à un naufrage en cours de tout le système politique qui régente la vie nationale depuis des décennies. La dernière sortie tonitruante du patron de l'UGTA, affirmant – dans le même ordre d'idées que la vraie fausse lettre du FLN – que le «candidat des travailleurs» à la prochaine élection est le Président en place, participe des mêmes symptômes de dérèglements affectant le système en profondeur. La déclaration du premier responsable de la centrale syndicale n'a pas été suivie d'un désaveu, mais elle a dû causer quelques remous au sein de cette organisation traversée par les mêmes contradictions que tous les appareils gravitant autour du pouvoir. En dépit des craintes de débordements qui impacteraient la société, ce processus d'auto-déligitimation du système revêt un caractère salutaire aux yeux des partisans de la rupture politique et de l'alternance théorisée depuis de nombreuses années. L'opposition démocratique, qui existe encore même si elle ne donne pas beaucoup de signes de vie, a régulièrement réitéré sa volonté d'«aider le pouvoir à partir». Ce sont les structures et démembrements de ce même pouvoir qui s'occupent de scier leurs propres assises, dans une ultime bataille pour la sauvegarde de leurs intérêts amassés durant ce long règne envers et contre ceux de la population. Cette fin de cycle historique va placer le pays face à deux perspectives. Celle de Makri et ses clones dans l'opposition ou dans les institutions, et celle de Abane dont le projet n'est pas mort.