De la littérature traditionnelle au théâtre moderne, tel est le thème de deux journées d'étude organisées la semaine dernière à la maison de la culture de Tizi Ouzou par le Haut Commissariat à l'Amazighité (HCA). Plusieurs universitaires de Béjaia, Bouira et Tizi Ouzou et des spécialistes du 4e art ont pris part à ce colloque. Expliquant la problématique de la rencontre, le sous directeur à la recherche et de l'évaluation au HCA a indiqué : «En Algérie, il existe, aujourd'hui, une pratique théâtrale moderne d'expression amazighe et arabe. Sur le plan de la production, plusieurs écrivains algériens se sont essayés à l'écriture théâtrale, parmi les classiques, on cite Mouloud Mammeri et Mohia en langue amazighe et Kateb Yacine, Alloula et bien d'autres en arabe algérien. Sur le plan de la réalisation, de mise en scène et de la présentation de pièces théâtrales, il existe, au sein de notre jeunesse, de nombreuses associations qui activent dans ces domaines, dans toutes les régions d'Algérie». Selon le même intervenant, «ce sont les genres littéraires traditionnels oraux, tels les contes, les proverbes et la poésie qui alimentent le travail théâtral ; il est donc intéressant de retracer le cheminement de la littérature algérienne orale et son investissement dans le théâtre moderne». Il ajoutera : «Notre objectif est d'explorer en premier lieu les genres littéraires anciens dans leur évolution diachronique et s'arrêter sur leur état actuel en se demandant d'ailleurs s'ils ne sont pas en perpétuelle formation, transformation, voire métamorphose. En second lieu, on scrute le théâtre actuel, que ce soit les pièces écrites en tamazight et en arabe algérien ou celles traduites et adaptées de l'arabe et du français, en vue de mesurer le chemin parcouru et la part des vestiges de la littérature ancienne dans la genèse de l'écriture théâtrale». Trois axes de réflexion ont été développés par les communicants. Omar Fetmouche, directeur du TR de Béjaia, dramaturge et metteur en scène, a consacré son intervention à l'adaptation des pièces de théâtre en arabe classique et en français et à l'incursion des adaptations propres au roman, nouvelles, contes et légendes. Il a mis en exergue les techniques propres à ce genre d'adaptation et leur relation avec le théâtre maghrébin qui, dira t-il, essaie d'allier la modernité à la tradition, notamment à travers la mise en scène. Développant un autre aspect, Kahina Flici, enseignante à l'université de Tizi Ouzou s'est intéressée à la citation proverbiale dans la poésie chantée chez Lounis Aït Menguellet. «Toute évolution littéraire passe irrémédiablement par l'héritage patrimonial littéraire préexistant, issu généralement de la tradition orale. La société kabyle est considérée comme l'une des sociétés les plus riches en adages populaires. Son répertoire oral ancestral contient des milliers de proverbes et de maximes dont la mémoire collective conserve une grande partie. Ce répertoire ancestral forme un réservoir inépuisable d'images, d'idées et de visions, qui alimentent sans cesse le processus créatif de l'ensemble des poètes kabyles anciens. Lounis Aït Menguellet est l'un des poètes kabyles qui ont fécondé fructueusement leur champ poétique avec des données patrimoniales riches et diversifiées. La citation proverbiale dans son œuvre prend des dimensions très larges, elle se manifeste, pratiquement, dans la plupart de ses textes poétiques», a-t-elle souligné. Les autres axes de réflexion développés lors de ces journées ont trait à l'enseignement du théâtre amazigh à l'université, l'expérience de mise en scène des fables de La Fontaine, les vestiges du conte dans la genèse de l'écriture du théâtre; le théâtre radiophonique en kabyle, la valeur de la poésie traditionnelle chez Ben Mohamed.