Mon ami, mon frère Aïssa. Tu as été l'ami et le frère d'un demi-siècle ; Tu nous as quittés le jeudi 8 octobre 2009 à la suite d'une fâcheuse maladie ; Comment parler de toi au passé, toi qui es toujours présent dans mes pensées ! Tous ceux qui t'ont approché, t'ont estimé et respecté. C'est vrai que tu étais un homme de cœur et de parole ! Officier de l'ALN et membre du conseil de l'AN MALG, tu as conservé un amour indéfectible pour la patrie. Toujours égal à toi-même, chacun se souvient que tu as remué ciel et terre, après près d'un demi-siècle, pour ramener d'Allemagne jusqu'en Algérie les cendres du regretté Georg Puchert, militant de la cause nationale et victime d'un attentat à Francfort ; auquel tu avais fait la promesse de l'enterrer en Algérie s'il venait à décéder, comme il avait émis le vœu. Le quotidien El Watan a rapporté et dans l'édition du 4 juillet 2006, les détails de tes péripéties, ce jusqu'à ce que Georg Puchert repose en paix au cimetière d' El Allia. Te sachant alité, Marina, la fille de cet ami Puchert, est venue spécialement d'Europe, te rendre visite à la maison, quatre jours seulement avant ton départ pour l'éternel. Il y a peu de temps encore, on t'a vu à la télévision nationale, dans une émission consacrée à la fabrication d'armes par la logistique ouest, dont tu étais l'un des premiers acteurs. Je ne puis me faire à l'idée que mes enfants ne viendront plus jamais me dire : « C'est ammi Aïssa qui te demande au téléphone, et de ne plus entendre ta voix ! Parmi les copies de documents que tu m'a remis en me disant : « On ne sait jamais… », sans préciser le fond de ta pensée, l'un d'eux contenait cela : « Abdessemed Aïssa ben Tayeb est né en 1932 à Tazoult, wilaya de Batna. Il commença à activer dès l'année 1955 en tant que responsable au sein du service technique de l'armement de la logistique de la zone V, devenue wilaya 5 après le congrès de la Soummam. De 1955 à 1958 au sein du service de la logistique ouest, zone V, il s'est acquitté de multiples missions sous la responsabilité de Issad Mohamed Larbi, responsable de la logistique, et des directives hiérarchiques, dont celles de Boudiaf Mohamed. Il a participé activement à l'opération « Bateau de Cadix » dirigée par Issad Mohamed Larbi et supervisée par le membre de la délégation extérieure, coordinateur du FLN, Mohamed Boudiaf. Cette opération consistait à ramener d'Espagne vers le Maroc un bateau chargé de 250 tonnes de plastic, chargement offert par la Mouqawama marocaine : Fqih El Basri, Mehdi Ben Barka, Hassen Laredj et Hahrizi. L'équipage du navire était composé d'un commandant hollandais et de marins algériens spécialement formés pour cette opération par des éléments du service de la logistique du FLN, dont Aïssa Abdessemed. Cette opération s'est soldée par une réussite totale et les explosifs furent déchargés à Nador. L'organisation des opérations de ravitaillement, à partir de 1956, en armes et munitions de la zone autonome d'Alger est ordonnée par les responsables Mohamed Boudiaf et le docteur Gueniche, dit docteur Driss. La fabrication et la mise au point, avec Cherbal, Sif El Islam et Rachid, de bombes à retardement, lesquelles avec des armes, des munitions et des explosifs provenant du bateau Cadix, furent acheminés à plusieurs reprises jusqu'à Alger par deux camions Volvo, spécialement aménagés par Aïssa Abdessemed. Ces camions furent achetés au nom de Bensaïla Ramdane qui, aidé de son frère Salah, les amena à bon port et leurs chargements servirent lors de la bataille d'Alger. Ces véhicules transportaient officiellement du poisson qui était vendu sur la place d'Alger. La fabrication de bombes à retardement et leur placement dans les trains assurant le transport de militaires français qui se rendaient du Maroc vers l'Algérie. L'éclatement des engins détruisait les trains en territoire national. La création de la première usine de fabrication d'armement grâce à du matériel acquis en Europe par lui-même et le martyr Mourad Benchouk, en collaboration avec le groupe Sif El Islam, Rachid Bekhoucha, Sari Bachir, Saïd Toutah, Hamel Abdelkader. En qualité d'instructeur - artificier et de responsable technique à l'usine de fabrication de grenades et de matériels de guerre, installée à Casablanca puis transférée à Tétouan après les incidents créés par la gendarmerie française à Casablanca. La transformation et l'aménagement de véhicules devant assurer l'approvisionnement en armes et munitions à l'organisation spéciale de la Fédération de France, qui ont servi, entre autres, aux actions menées en 1958 à travers toute la France (le deuxième Front). La formation en 1957 à Casablanca pour le compte de la Fédération de France du FLN de cinq volontaires - choisis parmi les éléments du camp de Khemisset - qui furent initiés à la fabrication de bombes à retardement et aux techniques de sabotage en vue des actions à mener en territoire français. Entre 1958 et 1960, il était responsable technique, en tant qu'instructeur artificier, du service armement de l'Organisation spéciale de la fédération de France du FLN. De 1960 à 1962, il a assumé la responsabilité technique de la logistique et de l'armement à la Mission Europe. A l'indépendance, tu as été nommé délégué de l'ONRA en Allemagne fédérale, jusqu'en 1967. Ensuite, tu as créé tes propres activités aussi bien en RFA qu'en Algérie, ce jusqu'à ta retraite. Ayant été présent en RFA, au sein de la délégation de l'ONRA, je me souviens que tu as retourné aux partenaires allemands les petits présents offerts, à titre personnel, pour les fêtes de fin d'année. Les intéressés étaient presque offensés, mais après leur avoir fait connaître tes principes, ils avouaient, eux-mêmes, reconnaître en toi un homme ferme mais honnête et loyal, digne représentant de son pays à l'étranger. Aïssa ne parlait jamais de lui, mais se faisait un devoir de défendre la mémoire de ses amis disparus. Il est le quatrième membre qui nous quitte, parmi les principaux « hommes de l'ombre » de la mission de prospection et d'achat (mission Europe), après Yousfi M'hamed (Mustapha), Mabed Charef ( Mehdi) et Puchert Georg (capitaine Morris). Il y aurait tant à dire concernant cet homme intègre, généreux et vrai nationaliste. Qu'il repose en paix, au cimetière d'El Alia, au milieu des compagnons qu'il a rejoints et qu'il aimait tant ! En guise d'adieu, comme tu me le répétais souvent Aïssa, je te dis « salut », à plus tard mon ami !