U ne centaine de personnes se sont rassemblées, hier à partir de 9h, devant le tribunal de Ksar El Boukhari (68 km au sud du chef-lieu de la wilaya de Médéa), en signe de soutien à Abdelkader Kherba, militant de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) et également membre du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC). Elles sont venues d'une dizaine de wilayas pour réclamer la libération inconditionnelle d'un citoyen qui, disent-elles, a eu le tort de se ranger dans le camp de la contestation populaire revendicatrice de la liberté et de la dignité. Plus de vingt slogans étaient écrits sur des pancartes et scandés par les amis de Abdelkader Kherba, à une vingtaine de mètres du tribunal de Ksar El Boukhari : «Non à la hogra», «Libérez Abdelkader Kherba»…. Des membre du Réseau de défense des libertés et de la dignité ont insisté pour que les manifestants fassent un tour dans la ville de Ksar El Boukhari, où nous avons remarqué que la photo du détenu est affichée sur pratiquement tous les édifices publics : poste, APC… Un panel de dix défenseurs du collectif des avocats de la LADDH compose la défense de Abdelkader Kherba, qui est poursuivi pour «outrage et agression sur un fonctionnaire» de la daïra de Ksar El Boukhari. «L'audience a été reportée au 4 septembre 2012 à la demande du collectif des avocats pour faire comparaître des témoins à décharge», indique un communiqué que nous a fait parvenir son avocat, maître Nourredine Benissad. «Ces témoins attestent qu'à la date des faits imputés au militant Abdelkader Kherba, celui-ci se trouvait à Alger où il a assisté, pendant toute la journée, à une réunion d'un syndicat autonome», a confirmé Me Benissad, joint par téléphone. Et d'ajouter : «La mise en détention du militant des droits de l'homme par le parquet de Ksar El Boukhari est une décision disproportionnée par rapport aux griefs reprochés, à savoir outrage et agression sur un fonctionnaire de la daïra, pendant que les dispositions de la loi énoncent que le recours à la détention doit être une exception, lorsque les faits sont graves, et que la liberté doit être la règle.» «Le harcèlement judiciaire de Abdelkader Kherba est en réalité lié à ses activités pacifiques et légales de militant des droits de l'homme pour la démocratie, l'Etat de droit, la citoyenneté et le respect des droits de la personne humaine et de sa dignité.» La famille du détenu se préoccupe et exprime son inquiétude quant au sort de son fils, jugé pour la deuxième fois en l'espace de quelques mois seulement. «Ma mère vient de subir un deuxième choc suite à l'arrestation de mon frère au troisième jours de l'Aïd. Elle est depuis sous traitement alors qu'elle est déjà cardiaque», déclare un des frères de Abdelkader Kherba dont l'état de santé, affirme-t-il, est en nette dégradation alors qu'il ne renonce pas à la grève de la faim qu'il a entamée depuis son arrestation, il y a de cela déjà huit jours. Maître Debouz Salah, avocat de Kherba, a affirmé, après une rencontre avec le détenu, que son client fait une grave hypoglycémie (0,55 g/l), ce qui nécessite sa libération. Abdelkader Kherba devrait être convoqué pour le soi-disant procès et non incarcéré, parce qu'il ne s'agit nullement d'une accusation relevant du criminel. Son frère affirme que la vidéo de la contestation populaire qu'il a filmée aurait pu disparaître et la détention provisoire de son frère aurait pu être passée sous silence, n'étaient des témoignages de facebookistes qui ont ébruité l'information de son arrestation sur la Toile. Rappelons que le grief retenu contre Abdelkader Kherba a été rejeté dans le fond et dans la forme par des témoignages concordants de personnes qui étaient présentes lors de la protestation devant le siège local de l'Algérienne des eaux, dénonçant une pénurie d'eau qui a duré tout le mois de Ramadhan. «Le jour même de l'arrestation de mon frère, l'eau, comme par magie, est revenue dans les robinets à sec durant tout le mois de Ramadhan à Ksar El Boukhari», explique son frère. «Pis encore, certains quartiers ne sont pas alimentés en eau potable depuis presque trois mois alors que dans les hammams à côté et à la Sonelec, l'eau coule H24. Mon frère est allé filmer une scène de revendication populaire réclamant un droit vital, l'accès en quantité suffisante et en qualité acceptable à l'eau. Résultat : la police le malmène après l'avoir sommé de ne pas filmer la scène», poursuit-il. Un ami de Abdelkader accuse, sans les nommer, certains responsables qui auraient, le jour même de la protestation populaire, proposé à Kherba une dotation régulière en citernes d'eau potable pourvu qu'il se retire sans filmer la scène.