Dans leurs bilans annuels, les contrôleurs financiers n'arrêtent pas de signaler, d'année en année, le surplus de dossiers d'engagement et d'ordonnancement dans le dernier trimestre de l'exercice des budgets des ordonnateurs, en raison de la clôture budgétaire qui menace de faire tomber en exercice clos leurs crédits non consommés. La solution à ce problème, aussi bien de gestion que d'économie, consiste à se demander si en lieu et place de la règle de la clôture budgétaire, il ne serait pas utile de consacrer une nouvelle règle dite de clôture comptable (25 décembre plus la période complémentaire légale). Tout en permettant la continuité du fonctionnement de l'Etat dont les opérations au-delà de la clôture comptable seront arrêtées dans le cadre du nouvel exercice de gestion ultérieure (N+1). En effet, la clôture comptable des dépenses de fonctionnement est nécessaire pour arrêter les bilans des ordonnateurs (comptes de gestion destinés notamment à la Cour des comptes nécessaires au quitus et à l'élaboration de la loi de règlement budgétaire). Cette nouvelle règle permettra le report de crédits non consommés sur l'exercice ultérieur en atténuation (soustraction) des nouvelles dotations (une suite réelle de demande et consommation de crédits au jour le jour pour soigner la signature de l'Etat qui ne peut souffrir d'aucun argument spécieux). Ces crédits reliquats sont déjà autorisés par le Parlement, mais pour l'année de l'exercice seulement (règle de l'annualité) sur la base justement de cette mauvaise règle de clôture budgétaire qui pousse au gaspillage (stocks morts des magasins des ordonnateurs destinés à la réforme en pure perte de valeur) et freine le fonctionnement de l'Etat qui n'honore plus ses engagements jusqu'à l'ouverture du nouvel exercice budgétaire (peut aller de fin décembre à début mars). Ce faisant, beaucoup de fournisseurs se plaignent de cet état de fait qui leur pose des problèmes réels de trésorerie face aux craintes des gestionnaires de tomber en panne de moyens faute de crédits légaux malgré les reliquats dégagés. Aussi, la non-consommation de crédits affectés (deviennent crédits gelés de fait) affecte les prévisions des grands agrégats économiques de début d'exercice (Déficit budgétaire, Consommation, Croissance +/- du PNB) liées aux besoins de financement des administrations publiques. De ce constat, il sera nécessaire d'amender la loi de finances 84-17 pour prescrire cette possibilité de report de crédits reliquats de fonctionnement comme en matière d'équipement s'agissant des crédits de paiement annuels toujours reportables jusqu'à la clôture définitive de leurs AP respectives. La philosophie juridique à la base de cette notion de droit des finances publiques ‘‘clôture budgétaire'' semble dépassée, car aujourd'hui le principe de clôture budgétaire n'entraîne que des désagréments à l'Etat d'abord (ensemble des ordonnateurs des IAP) et à l'ensemble des acteurs ensuite. Nous ne lui trouvons aucun intérêt de management ou de bonne gouvernance sous quelconque angle d'approche, y compris dans son historique français (3e, 4e et 5e Républiques). En 2011, le budget de fonctionnement a été exécuté à hauteur de 85% et le budget d'équipement à hauteur de 65% (source panel Banque mondiale 2012). Ce double constat soulève la question de savoir si ce n'est pas la politique de prévision budgétaire et la politique d'exécution budgétaire qui posent de vrais problèmes à solutionner urgemment pour arriver à affecter des budgets réels proches des capacités de consommation des ordonnateurs et des capacités d'absorption de l'économie nationale. Les travaux de la structure en charge du Budget se trouvent contrariés par les demandes surévaluées des ordonnateurs méfiants aussi du bouleversement des prix du marché. Ce surplus respectif de 15% et de 35% notable au fonctionnement et à l'équipement vient en atténuation du déficit budgétaire déclaré en début d'exercice qu'il y a lieu de corriger et de vulgariser dans l'intérêt des finances de l'Etat (1,7 % de déficit budgétaire réel en 2011 très loin de celui annoncé en début d'exercice). Ces crédits affectés et non consommés deviennent des crédits thésaurisés qui coûtent et ne rapportent rien tant en économie réelle que sur le plan des écritures comptables et financières qu'ils faussent inutilement (comptes sociaux de la Nation). Ils privent l'Etat algérien de développer un bon volant budgétaire pour financer d'autres priorités et urgences socioéconomiques puisque ces crédits sont disponibles dans leur contrepartie monétaire nourrissant l'inflation galopante observée. Le gonflement du budget des dépenses incompressibles (charges récurrentes) renvoie un mauvais signal d'éblouissement plutôt d'aveuglement que d'éclaircissement de la conduite de la politique budgétaire. La dernière mesure du premier ministre et du ministre des Finances de réduire de 10% les budgets de fonctionnement des ordonnateurs (sur les crédits votés de l'exercice ou sur les crédits consommés telle est la véritable question) explique cet aveuglement, puisque les budgets réels non exécutés sont au-dessus de ce taux d'économie ciblé. A contrario, les ordonnateurs réalisent 15 et 35% d'économie budgétaire en l'absence de toute prescription gouvernementale ! Il faut s'en inquiéter plutôt que de s'en réjouir, car ces ressources devraient être employées ailleurs à bon escient. L'Algérie est-elle dans une logique d'économie de bouts de chandelle ou dans une logique de plein emploi de ressources dormantes (surliquidités des circuits bancaires et du Trésor) et du FRR ? L'expansion budgétaire en Algérie est donc réduite à une mauvaise politique de prévision et son corollaire la politique d'exécution qui restent justifiées par de nombreux arguments farfelus dont le plus important provient d'une règle juridique ‘‘clôture budgétaire'' qui ne met pas en confiance les ordonnateurs pour formuler des besoins au plus près de la réalité sachant qu'en disposant de reliquats de crédits reportables ils pourraient faire l'effort nécessaire d'une prévision tout aussi près de la réalité (les arbitrages intersectoriels annuels fastidieux se trouveraient facilités). Cette réflexion entame le débat sur la question qui pourrait être officialisé dans le cadre d'une réflexion susceptible d'approfondir ses contours et ses impacts après un bon état des lieux de sa pratique (quel avantage pour l'Etat de la clôture budgétaire de fonctionnement et quels désagréments pour les ordonnateurs et les acteurs du marché ?). L'Etat doit se rappeler sa responsabilité de premier consommateur de la Nation et influe ainsi négativement sur le revenu de ses habitants dont les contributions fiscales directes et indirectes en augmentation permanente financent son budget dédié à son fonctionnement. Les raisons politico-juridiques qui justifient le paiement en continu des salaires et le report des crédits d'investissement peuvent également justifier les reports de crédits de fonctionnement, car la consommation de l'Etat (moyens des services) entre dans les plans de production (biens et services) des opérateurs nationaux (et étrangers fournisseurs d'intrants ou de produits finis) en ce sens la proposition de substituer au principe de la clôture budgétaire le principe de la clôture comptable poursuit des objectifs de politique macro-économique. L'économie demeure un tout cohérent, notamment de politique budgétaire dans ses deux volets fonctionnement et équipement (consommation, investissement) corrélée aux dotations en capital (subventions à l'économie), à la politique monétaire (lutte contre l'inflation et stabilisation de la monnaie, placement et revenu de l'épargne publique non rémunérée des dépôts du Trésor et des CCP) et aux politiques industrielles (production, création d'emplois et lutte contre le chômage).