Un rassemblement de journalistes s'est tenu hier matin, à la maison de la presse Tahar Djaout, à l'initiative de la Fédération nationale des journalistes algériens (FNJA, affiliée à l'UGTA) afin de marquer l'indignation de la profession quant aux conditions de travail des journalistes dans notre pays. C'est le défunt Chaouki Madani, ancien journaliste à El Khabar (entre autres publications où il a servi) décédé mercredi dernier des suites d'une crise d'asthme, qui a été le déclencheur de ce rassemblement, sa tragique disparition venant allonger une liste de plus en plus inquiétante de professionnels des médias emportés par un stress endémique. En effet, feu Chaouki Madani a été le neuvième journaliste à nous quitter en cette année 2009. Il avait la cinquantaine à peine entamée. Les huit précédents avaient pour certains moins de 30 ans comme notre regrettée consœur d'Horizons Lilia Bekta (29 ans). La fédération des journalistes algériens a donc appelé à un rassemblement qui se voulait à la fois un moment de recueillement mais aussi un élan revendicatif. Le secrétaire général de la FNJA et néanmoins journaliste à El Khabar, Abdennour Boukhemkhem, a notamment souligné que la disparition de notre confrère Chaouki Madani aura été la goutte qui a fait déborder le vase. Et d'établir un rapprochement entre les neuf journalistes disparus ces derniers mois et les conditions socioprofessionnelles de l'exercice du métier. Pour A. Boukhemkhem, cette situation alarmante devrait sonner la révolte de la profession. Une plateforme de six revendications à caractère socioprofessionnel est ainsi avancée par le secrétaire général de la FNJA ; des revendications qui constituent, selon lui, le seuil minimum pour améliorer les conditions sociales des journalistes. Parmi les points évoqués, l'accès à un salaire honorable avec garantie d'une couverture sociale. En ce sens, le tribun a relevé le cas de tous ces jeunes journalistes, tous frais émoulus de l'université, qui sont employés au noir, en exigeant l'éradication immédiate de cette fâcheuse habitude de gestion qui consiste à ne pas déclarer des dizaines de reporters et à les exploiter tels des parias. Dans la foulée, M. Boukhemkhem cite des extraits d'une interview accordée par feu Chaouki Madani au défunt hebdomadaire El Mohaqeq dans laquelle il notait : « Aujourd'hui, même un maçon peut ouvrir un journal et des businessmen se font directeurs de journaux. » Le secrétaire général de la FNJA insistera par ailleurs sur les conditions de délivrance d'une carte de presse, le sésame par excellence pour entrer dans la profession, et qui devrait revenir, insiste-t-il, à la commission nationale de la carte de presse. Les droits sociaux, le droit aux congés divers, à un week-end plus ou moins normal, sont instamment réclamés. Des « pauses » censées permettre aux journalistes de souffler. Est également mentionné le droit au logement, à la formation et, par-dessus tout, à un plan de carrière. Autant de défaillances qui trahissent la nécessité impérieuse d'adopter au plus vite une convention collective. Mais cette exigence précisément est jugée prématurée dans un contexte où les gens des médias peinent à faire front commun derrière un même sigle. Cela pose en filigrane le problème de la dépolitisation de la corporation journalistique et le désengagement syndical des journalistes. Un fait pour le moins paradoxal pour une profession politisée par essence. L'urgence de renouer avec l'action syndicale se fait donc sentir. Aussi la FNJA, par la voix de son secrétaire général, lance-t-elle une invitation publique au Syndicat national des journalistes (SNJ) pour agir ensemble et transcender les clivages politiques.