Le Front de libération nationale (FLN) ne risque pas de chômer sous la houlette de Abdelaziz Belkhadem. Le plan de charge concocté par le nouveau secrétaire général du « vieux front » ambitionne rien moins que de maintenir, le plus longtemps possible, le parti au pouvoir. Pour relever ce pari, requérant du souffle, Abdelaziz Belkhadem apparaît s'être entouré d'un ensemble de précautions pour éviter à sa formation de retomber dans une crise analogue à celle vécue tout au long de l'année 2004. Afin de prémunir les structures du parti contre les clivages idéologiques, Abdelaziz Belkhadem a d'emblée procédé à un verrouillage de la ligne idéologique du FLN. Contrairement au souhait récent de Abdelkader Messahel, l'actuel ministre délégué aux Affaires maghrébines et africaines, de voir le « front » épouser les formes d'un parti qui ressemblerait en de nombreux points au Parti socialiste espagnol, le PSOE. Le « chef en second du parti » (Abdelaziz Bouteflika étant le patron du FLN depuis la tenue du 8e congrès-bis) a choisi de placer le FLN sur la voie du populisme. A rappeler que la volonté de propulser le FLN dans la galaxie de l'Internationale socialiste (IS) s'est déjà exprimée lors de la brève parenthèse Benflis. Ce choix affirmé, dimanche, par Abdelaziz Belkhadem à l'occasion de l'installation des membres du secrétariat exécutif présente des avantages multiples. En plus d'éviter le risque de se voir flanquer d'une étiquette électoralement peu productive, à l'exemple de celle collant aux basques d'un parti comme le RND (il est souvent reproché à la formation de Ahmed Ouyahia ses excès de fièvre libérale), le choix du populisme offre aux responsables du FLN une marge de manœuvre suffisamment grande pour leur permettre, au besoin, d'adapter leur discours et leurs attitudes en fonction des situations. L'amarrage du Front de libération nationale à une identité aussi flottante que le populisme peut s'avérer, en outre, payant notamment lors des périodes électorales. En se refusant de se positionner clairement par rapport au traditionnel clivage gauche-droite, le FLN escompte ainsi étirer au maximum sa base électorale. L'engagement réitéré de Abdelaziz Belkhadem de faire du « front » le principal porte-drapeau de la réconciliation nationale et de l'amnistie générale est un élément pouvant également amener les opinions et les électeurs traditionnellement favorables aux partis d'obédience islamiste à soutenir le FLN lors des prochaines consultations électorales. Ces échéances sont d'ailleurs placées comme un objectif prioritaire dans l'agenda de Belkhadem. Pour amener les indécis à rejoindre la famille FLN, Abdelaziz Belkhadem - dont le parcours de militant reste marqué par son soutien au contrat de Rome - n'a d'ailleurs pas hésité à remettre au goût du jour la « guerre » des tranchées ayant opposé, durant toute la décennie rouge, les éradicateurs aux réconciliateurs. Le ministre des Affaires étrangères, qui s'est présenté à l'hôtel du Mouflon d'or en réconciliateur convaincu, n'a pas manqué à l'occasion de signer le premier acte de la confrontation annoncée entre le FLN et les partis (ou les acteurs) représentant l'ancien camp des éradicateurs, en décochant à l'adresse de ces derniers des fléchettes empoisonnées. Mais autant dire, d'emblée, qu'il n'y aura pas grand monde qui se dressera en face du FLN, faute d'adversaires. Depuis la reconversion du RND en parti réconciliateur, les « ennemis » ne sont plus tellement nombreux. Cela à moins que l'objectif voilé de Abdelaziz Belkhadem est, justement, de chercher la petite bête au parti de Ahmed Ouyahia. Dans quel but ? A l'évidence, la démarche s'inscrirait dans une logique de reprise en main de tous les pouvoirs, y compris les avantages que confère le rôle de leadership au sein de l'Alliance. Un rôle jusque-là dévolu au RND. Le constat peut ainsi amener à déduire que Abdelaziz Belkhadem ait voulu, en réactivant la bipolarisation réconciliateurs-éradicateurs, simplement trouver un motif pour commencer à asseoir les premiers jalons de la stratégie de maintien au pouvoir du FLN, en attendant d'en poser d' autres lors des élections législatives de 2007.