En l'absence d'accord de réconciliation nationale, le président palestinien, Mahmoud Abbas, a finalement décidé de ne pas dépasser le délai constitutionnel que représente le 24 octobre, date à laquelle il doit convoquer des élections législatives et présidentielle, et a signé, vendredi soir, un décret dans lequel il fixe au 24 janvier 2010 des élections générales en Cisjordanie, dans la ville sainte d'El Qods et dans la bande de Ghaza. Palestine : De notre correspondant M. Abbas avait menacé de convoquer des élections législatives et présidentielle à la date prévue par la loi fondamentale palestinienne qui tient lieu de Constitution, au cas où échoueraient les efforts tendant à réunifier les rangs palestiniens, plus divisés que jamais depuis le putsch armé du mouvement Hamas dans la bande de Ghaza au mois de juin 2007. Le porte-parole de la Présidence, Nabil Abou Roudeineh, a expliqué que faute d'accord Fatah-Hamas, Mahmoud Abbas était constitutionnellement tenu de convoquer le scrutin en janvier. Il a précisé que le vote se déroulerait en Cisjordanie, dans la partie orientale de la ville d'El Qods et dans la bande de Ghaza. Le mouvement Hamas avait refusé de signer le document égyptien de réconciliation que le mouvement Fatah a accepté et signé avant le 15 du mois en cours comme l'exigeaient les autorités égyptiennes qui parrainent le dialogue interpalestinien depuis le mois de février dernier. Le mouvement islamiste seul maître dans la bande de Ghaza a immédiatement rejeté la décision du président Abbas, qui « renforce la division », selon certains de ses responsables et a menacé d'empêcher leur déroulement dans la bande de Ghaza. « Il s'agit d'un coup fatal aux efforts de réconciliation et d'une prolongation des divisions », a déclaré Sami Abou Zouhri, porte-parole du Hamas. « Abbas a cédé aux pressions des Américains pour qu'il ne se réconcilie pas avec le Hamas à moins que nous n'acceptions les conditions du Quartette », a-t-il ajouté. Le Quartette, (Etats-Unis, Union européenne, Russie et ONU) exige que le mouvement Hamas reconnaisse l'Etat d'Israël et renonce à la violence. Moussa Abou Marzouk, numéro 2 au sein du bureau politique du mouvement a même mis en cause la légitimité de Mahmoud Abbas en tant que président, puisque, selon lui, le mandat présidentiel a expiré au mois de janvier dernier, et par conséquent il a estimé qu'il ne pouvait prendre une telle décision unilatérale en l'absence d'entente nationale. Le document de réconciliation élaboré par l'Egypte, qui le qualifie de document palestinien, puisqu'il ne contient que des points sur lesquels il y avait un compromis au cours des difficiles séances de dialogue, qui prévoyait des élections législatives et présidentielles le 28 juin 2010, a été accepté par le Fatah malgré ses réserves sur cette date, souhaitée par le Hamas. Le Fatah voulait aller aux élections selon le délai constitutionnel, précisé par le décret présidentiel de vendredi, mais avait accepté le report pour faire réussir le processus de réconciliation, ont déclaré certains de ses responsables. Pour le mouvement Fatah, les élections sont devenues nécessaires à cause de l'impasse que connaît le processus de réconciliation nationale car elles donnent la parole au peuple qui décidera de l'avenir du système politique palestinien en toute liberté. Il faut tout de même souligner que le président Abbas qui n'a aucune autorité dans la bande de Ghaza ne réussira à organiser des élections libres dans l'enclave palestinienne sans le consentement du mouvement Hamas. Dans la ville sainte d'El Qods, occupée par Israël les choses ne diffèrent pas beaucoup puisque là aussi, il est difficile d'envisager d'organiser un scrutin sans l'approbation du gouvernement israélien. Donc, si la situation reste bloquée entre le Fatah qui a gardé le contrôle en Cisjordanie et le mouvement Hamas qui domine la bande de Ghaza, la convocation a des élections libres dans les territoires palestiniens par le président Abbas risque de rester lettre morte. Le président palestinien qui n'a pas précisé comment seront organisées les élections dans la bande de Ghaza a répété à maintes reprises que le scrutin se fera dans l'ensemble des territoires palestiniens ou pas du tout. Certains observateurs pensent qu'il est encore possible de réaliser la réconciliation souhaitée par l'ensemble des Palestiniens et de changer la date fixée pour les élections. Dans la rue palestinienne, que ce soit dans la bande de Ghaza ou en cisjordanie, la déception est grande. Les gens craignent que la division politique et géographique actuelle ne soit définitive et mette fin à leurs aspirations de vivre dans un état indépendant. Pour Abou Omar, un commerçant de la ville de Ghaza : « Le Président n'avait pas d'autre choix que de convoquer les élections le 24 janvier prochain, après avoir vu que l'accord de réconciliation était encore loin ; seule une entente nationale aurait légitimé un report des élections mais puisqu'on n'est pas encore parvenu à s'entendre malgré tous les dangers qu'encourt la cause palestinienne, il faut s'en remettre au peuple pour qu'il dise son mot. » Abou Abdallah, un jeune père de famille, rencontré dans l'une des rues de la ville de Ghaza, a dit : « Je suis déçu par la classe politique palestinienne. S'il y avait de la sincérité et de la bonne volonté, on ne serait pas parvenu à cette situation catastrophique. Franchement, je ne peux plus supporter de vivre dans ce climat de division malsain. J'ai peur pour l'avenir de mes deux enfants, qui n'ont pas encore atteint l'âge scolaire. A la première occasion je quitterai Ghaza pour leur garantir un minimum. »