Auteur d'une thèse remarquée sur « Le réformisme musulman » en Algérie, l'historien Ali Merad fera état de l'engagement important de Tewfik El Madani qui fut ce publiciste tôt mêlé à la vie politique en Algérie et en Tunisie. « Il fut l'un des personnages qui contribueront, relève-t-il, le plus activement à l'élaboration du nationalisme au cours de l'entre-deux-guerres ». Le Club de la presse du FLN a organisé, mardi dernier, à l'hôtel El Riadh (Alger), une rencontre consacrée à la vie de Tewfik El Madani dont la date de naissance coïncide avec l'anniversaire du déclenchement de la guerre d'indépendance. Le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a rendu un hommage à l'« homme complet » et au « militant convaincu » que fut El Madani. « Ce sont des hommes de la trempe d'El Madani qui n'ont jamais viré leur cuti, qui ont mis à genoux un système colonial coupable des pires barbaries en Algérie », rappellera en substance M. Belkhadem, qui a honoré les enfants de Tewfik El Madani, Mohamed Islam et ses deux sœurs. « El Madani est né le 1er novembre 1898, fils de Si Mohamed El Madani et de Aïcha Bouiraz, tous deux issus de familles algériennes ayant émigré en Tunisie après l'échec du soulèvement de 1871 », précise Mohamed Islam, qui mettra en évidence le travail « acharné » d'un père qui était un modèle « de probité et de droiture ». Une « bévue » pourtant dans cet itinéraire marqué au coin du don de soi : « Il n'y avait pas encore en Tunisie d'état civil, mon père a été déclaré comme étant né le 16 juin 1899, raconte, en plaisantant, Islam. Après la Zeïtouna, El Madani comptera parmi les fondateurs du parti Destour, formation qui a compté aussi des Algériens, dont El Thaâlibi qui en était le guide attitré. Ces activité lui valurent d'être « exilé » en Algérie, en 1925, où il participera à la création de l'Association des ulémas dont il « rédige lui-même les statuts ». Rédacteur de la revue Al Shihab et rédacteur en chef d'Al Basa'ir, El Madani rejoindra les activités du FLN en devenant le président du Bureau des affaires arabes du FLN. au Caire (1956-1958). Il sera ministre des Affaires culturelles du 1er GPRA et à l'indépendance, ministre des Wakfs (biens de mainmorte) du gouvernement Ben Bella. La diplomatie l'accrochera pour un temps. El Madani fut un encyclopédiste éprouvé. Ibn Badis, un autre alim, dira de lui : « C'est un homme doué pour les œuvres impérissable ». En plus de ses activités de journaliste dans les organes des Ulémas, El Madani a publié, en 1950, une pièce de théâtre qui a fait date, Hannibal. Sa passion fut l'histoire. Il écrira ainsi l'Histoire de l'Afrique du Nord, ou Carthage en quatre siècles, Le Livre de l'Algérie, Les Musulmans en Sicile et dans le sud de l'Italie, La Géographie de l'Algérie, Ibn Khaldoun et l'Algérie, des ouvrages qui le feront comparer par certains à Jules Michelet, l'historien et érudit français. Il rédigera également ses Mémoires. Sa mort est survenue en 1983, la République lui rendra les honneurs qui lui sont dus.