Vendredi 16 octobre, le président du MSP se trouvait à Genève sur invitation d'une association islamique. Alors qu'il était attendu le dimanche suivant à Fribourg pour y donner une conférence, Soltani a dû fuir la Suisse précipitamment en raison d'une plainte pour tortures déposée contre lui par le journaliste et écrivain Anouar Malek. Paris : De notre bureau Pour justifier la fuite de leur dirigeant, les responsables du MSP arguent du fait que Soltani avait été vivement chahuté après la prière du vendredi par un groupe de jeunes Algériens. Soltani a-t-il été agressé, insulté ? Lui a-t-on manqué de respect ? Y avait-il réellement un attroupement comme le laisse entendre communiqué diffusé sur le site du MSP ? Que s'est-il passé au juste ? El Watan Week-end a retrouvé l'une de ces trois personnes présentes à la sortie de la mosquée du Grand-Saconnex à Genève. Malek B, 37 ans, originaire de Kabylie, cadre dans une société de services, vit en Suisse depuis plus de 20 ans. Ce vendredi-là, après la grande prière hebdomadaire, Malek s'approche de Soltani et de son épouse qui se tiennent debout sur le trottoir. « J'ai engagé une discussion avec Soltani pour lui exposer le cas d'un ami algérien en situation irrégulière en Suisse depuis une quinzaine d'années, raconte-t-il. Je lui ai demandé s'il pouvait faire quelque chose en sa qualité de haut responsable. Soltani m'a répondu très courtoisement qu'il était en mesure de faire intervenir ses connaissances civiles et militaires. Sa femme m'a alors proposé d'échanger nos coordonnées téléphoniques afin de rester en contact. » Brusquement, un autre personnage, d'une soixantaine d'années, militant ou sympathisant de l'ex-FIS, se joint à la discussion. Il apostrophe l'ex-ministre d'une manière vive, mais correcte. « Vous êtes des islamistes au service des généraux dictateurs, profiteurs et opportunistes, lui dit-il… Pourquoi avez-vous appuyé le troisième mandat ?… Ils vous ont mis sous leur burnous... » Plutôt gêné, Soltani répond calmement : « Nous n'avions pas le choix. Nous étions obligés de prendre cette position… Nous n'avions pas d'autre solution. Si vous en avez une, nous pourrions nous mettre autour d'une table pour en débattre... » Le personnage lui propose alors d'associer Ali Benhadj au règlement de la crise et précise au chef du MSP qu'il n'a pas mis les pieds en Algérie depuis plus de vingt ans : « A cause de vous et de votre cautionnement du coup d'Etat, nous nous sommes retrouvés à l'étranger, privés du retour au pays. » Soltani propose alors au personnage d'intervenir auprès des autorités algériennes pour régler son problème dans le cadre de la réconciliation nationale. L'épouse de l'ancien ministre d'Etat se rapproche du sexagénaire pour prendre ses coordonnées. C'est alors que ce dernier lui rétorque abruptement : « Je n'ai pas besoin de facteur de service. » Cette réponse provoque alors une certaine gêne chez le couple Soltani. De l'autre côté du trottoir, à une quarantaine de mètres de la scène, un autre jeune, ayant visiblement reconnu la bouille du président du MSP, lui lance à haute voix : « Soltani, vous allez payer pour tout ce que vous fait endurer aux Algériens… » Il s'éloigne. Soltani a la mine décontenancée, mais ne répond pas. Sur ces entrefaits, deux personnes qui accompagnent le couple interviennent gentiment pour demander à nos deux Algériens de laisser le ministre tranquille. « Nos invités sont fatigués… nous devons partir. » Soltani et son épouse s'éclipsent. En tout et pour tout, ces échanges que Malek qualifie de vifs mais cordiaux n'auront duré qu'une bonne dizaine de minutes. Quant à la fuite, à bord d'une voiture de l'ambassade d'Algérie à Genève, pour échapper aux poursuites, cela reste une autre affaire.