L'aisance financière que traverse le pays avec des réserves de change qui avoisinent les 150 milliards de dollars, suscite des interrogations quant à la gestion des finances publiques et son contrôle face à un Parlement dépouillé de son droit de regard sur les dépenses publiques. Le projet de loi portant règlement budgétaire adopté en Conseil de gouvernement au printemps 2008 a été remis dans les tiroirs sans aucune explication légitimant les soupçons relatifs à l'anarchie, voire la gabegie, qui caractérisent la gestion de l'argent public. Si pour le budget de l'Etat la destination est définie, la multiplication des fonds spéciaux, au nombre de 64, dont le plus important est celui de la régulation des recettes avec un montant de 3900 milliards de dinars au 30 juin dernier ainsi que leur gestion échappent totalement au contrôle, y compris e celui de l'Inspection des finances. Ces fonds brassent des centaines de milliards de dinars ou encore celui du développement des régions du Sud avec 238 milliards de dinars, ou encore le fonds spécial de la promotion des exportations avec plus de 5,6 milliards de dinars. Le Parlement censé jouer le rôle du contrôleur des finances exige un droit de regard sur la gestion de l'argent du contribuable. Ce qui dénote l'absence totale de transparence qui attise les appétits et encourage la corruption. Mieux encore, l'Inspection des finances, organe de contrôle des dépenses publiques, n'a pas un droit de regard sur la gestion du budget du ministère de la Défense nationale estimé cette année à 383 milliards de dinars (5,4 milliards de dollars US), et classé premier, avant même celui de l'Education (374 milliards de dinars). Le département militaire a ses propres moyens de contrôle, ce qui n'est pas le cas pour l'ensemble des autres ministères. D'ailleurs, les rares affaires de détournement ou de corruption échappent totalement à l'opinion publique parce qu'elles sont souvent frappées du sceau du « secret-défense ». Le scandale BRC (société algéro-américaine) illustre parfaitement cette réalité. Jusqu'à l'heure actuelle, aucune information officielle n'a été rendue publique sur les contrats qui reliaient la firme américaine au ministère de la Défense et qui portaient, selon des sources proches de ce département, sur un gros marché de réalisation d'une centaine de centres d'écoute répartis sur le territoire national sur une période de 10 ans. Le contrat a certes été annulé, mais des circonstances ont fait que cette banale affaire d'écoute téléphonique a pris le dessus et le patron de la boîte algéro-américaine, Ould Kaddour, a été poursuivi par le tribunal militaire qui l'a condamné à une peine de prison. L'institution a également fait les frais de sévères critiques sur la gestion des contrats d'achat d'avions militaires auprès de l'armée russe, parce que les appareils se sont avérés vétustes. Autant d'opacité qui laisse planer le doute sur l'utilisation des deniers publics.