-Quel bilan pour les forêts en Algérie ? Comme problème majeur, l'Algérie a un problème de gestion des feux de forêt. Une situation record a été enregistrée cet été. Les massifs forestiers ont donc besoin d'aménagement adéquat. Car de multiples difficultés font que les services de la Protection civile et les agents forestiers peinent à y accéder en cas d'incendie. Les pistes aménagées et les points d'eau sont inexistants. Des efforts doivent être fournis pour mieux prendre en compte le plan d'aménagement forestier. Il faut être en mesure de réagir facilement dans les minutes qui suivent le déclenchement du feu. Lors d'une rencontre que nous avons tenue en décembre dernier, la direction des forêts s'était engagée à revoir le plan d'aménagement pour améliorer la prévention et diminuer la surface brûlée. Je pense que le retard enregistré durant la décennie noire peut être rattrapé. -Peut-on dire que les forêts algériennes sont les plus menacées en Méditerranée ? Elles figurent parmi les forêts les plus menacées, car elles subissent plusieurs pressions. La principale, c'est le changement climatique. De nombreuses populations d'arbres sont à la limite du Sud. Si la température augmente en entraînant ensuite une sécheresse qui vient s'ajouter à la pression humaine par le pâturage des animaux, nous allons assister à un phénomène de stepperisation. Autrement dit, la forêt se dégrade pour être remplacée par le pâturage puis le désert. -Comment expliquez-vous que l'Algérie est le seul pays à avoir une tendance négative de l'évolution des surfaces forestières alors même que plus d'hectares de forêt sont plantés ? La plantation ne compense pas la dégradation et la déforestation. A cause des incendies enregistrés chaque année, la tendance reste négative. La surface totale des forêts a tendance à diminuer dans d'autres massifs, ce qui entraîne un changement total d'écosystème. Par exemple, dans le parc national de Tlemcen, nous assistons aujourd'hui à la dégradation de la subéraie (forêts de chênes-liège) pour laisser la place à d'autres espèces. Le chêne-liège n'arrive pas à se régénérer naturellement dans un environnement qui devient de plus en plus sec. Avec le changement climatique, les zones sub-humides sont devenues semi-arides et Tlemcen fait partie de cette zone. Hausse des températures, diminution des précipitations, augmentation de la durée de la sécheresse et de sa fréquence dans le temps… La forêt ne pourra pas supporter ces nouvelles conditions. La solution, c'est d'adapter la gestion. Il faut entre autres aider à la génération naturelle à travers des pratiques sylvicoles et prévenir contre les incendies. Le travail doit être entamé en hiver pour limiter la biomasse qui se développe dans la forêt. Les petites végétations qui se développent autour des arbres et qui se cumulent au fil des mois deviennent sèches et favorisent l'incendie. Il faudrait alors encourager la régénération des espèces résistantes aux feux et limiter la quantité de combustibles à travers des campagnes de sensibilisation. -Les pertes des terres arables sont aussi importantes… En effet, ce problème est directement lié au développement urbain. Les villes s'étendent de plus en plus et l'extension se fait au détriment des terres fertiles et agricoles, à l'exemple de la Mitidja. Au fil des années, l'Algérie devra faire face à une insuffisance de terres agricoles nécessaires pour répondre aux besoins de la population…