Nicolas Maduro, dauphin du défunt charismatique Comandante, sera mis à l'épreuve pour savoir s'il est, oui ou non, digne du lourd héritage. En face, il aura un redoutable fringant jeune homme de droite, Henrique Capriles, 40 ans, gouverneur de l'Etat de Miranda (nord), qui a réussi en novembre 2012 à tenir tête au grand Hugo Chavez. Mais au-delà de la personnalité de l'un et de l'autre, le scrutin présidentiel au Venezuela se déroule aussi et surtout sur le terrain émotionnel. Et à ce jeu, le président par intérim, Nicolas Maduro, a toutes les chances de rester en place au palais Miraflores, tant le torrent de larmes versées sur Chavez, voici seulement un mois, ne s'est pas encore asséché. Aussi, la droite est historiquement accusée, dans ce pays et dans toute l'Amérique latine, d'intelligence avec l'impérialisme états-uniens. Capriles a sans doute beaucoup de supporters au Venezuela, qui se recrutent parmi les jeunes issus des milieux bourgeois, mais aussi des entrepreneurs. Cependant le contexte politique actuel ne lui semble pas favorable, tant les Vénézueliens sont encore orphelins de leur «Comandante» qu'ils souhaitent pouvoir «s'incarner» avec Nicolas Maduro. Il va de soi que ce dernier a usé et même abusé de sa position de président par intérim pour se donner les grands moyens de propagande, à défaut d'avoir le talent d'orateur d'Hugo Chavez. Les sondages le donnent d'ailleurs logiquement favori devant le chef de l'opposition de droite, avec pour mot d'ordre : «Poursuivre la révolution du Comandante». La tête de cet ancien dirigeant syndical devenu chef de la diplomatie trône depuis plusieurs jours sur tous les écrans des télévisions et les affiches publicitaires. Et pour finir en apothéose sa campagne bruyante durant laquelle Hugo Chavez était omniprésent, Maduro a bénéficié d'un coup de «main de Dieu». La star mondiale de football, l'Argentin Diego Maradona, qui était un ami personnel de Chavez, mais aussi de Fidel Castro, a volé au secours de Maduro pour porter le coup de grâce à Capriles. Diego, qui a enfilé la chemise rouge bolivarienne, est harangué par la foule en délire durant l'ultime meeting du candidat «chaviste». Et comme pour signifier qu'il compte bien faire du chavisme sans Chavez, Nicolas Maduro a fait hier un pèlerinage au tombeau de Hugo Chavez sur les hauteurs de Caracas, pour célébrer les «milices bolivariennes», un corps de civils créé par le défunt président en 2003 après un putsch avorté contre lui. Et ultime pierre dans le jardin de Capriles, le gouvernement a exposé vendredi des fusils et des explosifs présentés comme les armes de paramilitaires colombiens soupçonnés d'être venus semer la violence. La suggestion contre le candidat de la droite y est plus qu'évidente. La réaction ne s'est pas fait attendre. «Les autorités cherchent à semer la peur et abusent des moyens de l'Etat pour diffuser la propagande», réplique le camp de Capriles. Ramon Gillermo, l'un des responsables de la Table de l'unité démocratique, collectif regroupant les partis d'opposition, a demandé qu'on «laisse les citoyens tranquilles pour qu'ils réfléchissent et prennent leur décision» en vue de l'élection. Quoi qu'il en soit, et malgré les critiques souvent surdimensionnées de l'Occident, l'élection présidentielle aujourd'hui au Venezuela sera un grand moment de démocratie, où le dernier mot revient au peuple. Le verdict des urnes renseignera sur l'Etat d'esprit des Vénézueliens face à une question simple : pour ou contre la révolution. Réponse ce soir.