Où sont passés les guirlandes et les drapeaux qui, il n'y a pas si longtemps, ornaient nos rues, nos places et nos balcons ? Où sont passés les drapeaux innombrables que les Algériens sortent à l'occasion des matches de foot ? Dans les tiroirs ? Le 1er Novembre est-il moins important qu'un match de foot ? Le sang des chouhada pèse-t-il moins dans la balance des émotions nationales qui mobilisent le peuple algérien ? J'ai traversé les principales artères du centre d'Alger dénuées de guirlandes, de drapeaux, les balcons nus. Voici ce que j'ai vu : hormis Bologhine magnifiquement décoré et Bab El Oued plus timidement, où sont les partis, les APC, la wilaya qui disposent, m'a-t-on dit, d'un budget pour le 1er Novembre ? Où sont-ils ? Aux abonnés absents ? Que serait ce pays, qui nous abrite et nous fait vivre bon an, mal an, sans le 1er Novembre ? On peut facilement l'imaginer ce pays de Dunkerque à Tamanrasset. Un département d'outre-mer français avec des cireurs, des chômeurs et des paysans dont on fait suer les burnous. Aux nostalgiques qui osent dire qu'« avant c'était mieux ». Mieux pour qui ? Qu'ils se réfèrent à la situation économique et sociale et de la Nouvelle-Calédonie, de la Guyane ou des Antilles. A ceux qui ont la mémoire courte, doit-on rappeler que ce 1er Novembre — qu'ils effacent si allégrement — a été le fait majeur du déclenchement de la Révolution. Plus d'un million d'Algériens y ont laissé leur vie, des chouhada. Des hommes, des femmes, qui ont laissé familles, enfants, pour combattre la machine de guerre de la 3e puissance mondiale avec des armes dérisoires. Ils y croyaient et ils ont eu raison d'y croire puisque l'indépendance est venue. Le sang de ces hommes et de ces femmes ne vaut-il pas un drapeau accroché à un balcon ? Une pensée, un merci pour leur sacrifice ? Comment un peuple qui oublie son passé peut-il construire son avenir ?