Il se dit beaucoup de choses sur des contrats à signer avec des entreprises, mais reste à savoir si l'expérience du Bordj El Ali ne se répètera pas un jour. Il y a à peine quelques semaines, un contrat d'études a été signé entre Promobatie, le promoteur immobilier privé sétifien qui a acheté l'imposante carcasse du Bordj El Ali, située en plein centre-ville de Sétif, et Arte Charpentier, l'agence parisienne d'architecture. Cette dernière achève de construire, en ce moment même, à Lyon (France), face à la Part-Dieu, la tour Oxygène, et vient de livrer, à Dijon (France), le premier immeuble de bureaux à énergie positive, le désormais fameux Elithis. Ce contrat a pour objet la reprise des études d'architecture et d'engineering de cet ensemble immobilier en vue d'en faire un grand équipement urbain abritant plusieurs fonctions essentielles : hôtellerie (probablement un Mariott de classe internationale, le deuxième en Algérie après celui d'Oran, voulu par le président de la République), restauration, loisirs, commerces, bureaux, centre international de conférences, plus de 1000 places en parking souterrain… Voilà que Sétif s'apprête à recevoir, encore une fois, les projets de quelques-unes des plus prestigieuses agences d'architecture. En effet, la Direction de l'urbanisme et de la construction de la wilaya (DUC) vient de lancer un concours international d'architecture, ouvert aux seules agences ayant l'expérience et les moyens requis, en vue de la construction de la future cour de justice de Sétif, la plus grande d'Algérie, qu'ambitionne d'abriter Sétif sur un site de rêve, à la limite nord-ouest du centre-ville, face au parc d'attractions et à ce futur complexe du Bordj El Ali. Arte Charpentier aura pour principaux concurrents l'autre grande agence parisienne Architecture Studio, ayant signé le siège du Parlement européen et l'Institut du Monde arabe, candidat malheureux à la construction de la grande mosquée d'Alger, AW2, une agence dirigée par deux jeunes architectes, Redha Amalou (d'origine algérienne) et Stéphanie Ledoux, qui ont failli de peu « chiper » à Jean Nouvel la construction du musée des Arts premiers à Paris (ils ont été classés deuxième à l'issue du concours) et Next Step Architecture, l'agence de Ouiza Abdat, une autre architecte algérienne installée à Paris. Celle-ci réhabilite en ce moment un grand immeuble d'habitations à Marseille et construit des hôtels de grand luxe au Moyen-Orient, notamment pour le compte d'Emiratis Space Group (qui parle de s'engager mais n'a toujours pas retiré le cahier des charges au moment où nous rédigeons), de l'énorme bureau d'architecture sud-coréen (plus de 600 architectes), ayant installé une antenne à Alger depuis quelques années, ainsi que quelques agences privées nationales. Ces dernières viendront « inquiéter » les équipes françaises pour espérer leur voler le privilège de construire ce grand symbole de la justice algérienne, dans une ville qui se souvient encore et toujours des affres de l'injustice des journées de mai et juin 1945… Arte Charpentier bénéficiera, cependant, pour ce concours, d'un avantage certain, puisqu'il est fort probable qu'il soit associé à Mohamed-Larbi Merhoum, concepteur de l'élégant siège de la CNEP à Sétif, ayant déjà une longue histoire avec la ville (et voulant l'approfondir) et Iosis, un grand bureau d'étude français installé depuis des années à Alger. Mais qu'est-ce qui fait courir autant de signatures talentueuses vers la haute ville ? Certainement sa beauté et la rigueur de sa gestion concertée, mais aussi la notoriété de son chef de l'exécutif, amoureux de belle architecture, ayant converti, en outre, les autorités judiciaires et locales à cette noble cause. Les prémices d'une grande compétition d'architecture sont posées ; ils vaudront à Sétif une autre réalisation et un prestige à la mesure de sa réputation.