Membre de l'ONG Transparency International, l'Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC) a fait l'objet d'une interdiction de participation aux travaux de la 3e conférence des Etats-parties de la Convention des Nations unies contre la corruption qui s'est ouverte, hier, à Doha (Qatar), a dénoncé son porte-parole, Djilali Hadjadj, dans un communiqué rendu public. M. Hadjadj pointe un doigt accusateur sur « le gouvernement algérien » en tant qu'instigateur de cette exclusion « avec la complicité des Nations unies ». « Encouragé par le fait que cette conférence se tienne dans un pays "ami", le Qatar, et assuré d'avoir une vice-présidence de ces assises, le gouvernement algérien n'a pas eu de difficulté – avec la complicité des Nations unies – à obtenir l'exclusion de l'AACC », s'indigne-t-il. Pourtant officiellement accréditée le 5 octobre 2009 par l'Office des Nations unies contre le crime et la drogue chargé de piloter le secrétariat de cette conférence, sans aucune opposition d'un Etat-partie dans les délais réglementairement définis, l'AACC a été « désaccréditée » deux semaines plus tard, soit le 21 octobre dernier, par le même organisme en violation du règlement intérieur de cette conférence, déplore la même source. Un véritable coup de théâtre d'autant que cette association avait été accréditée, sans anicroche, lors des deux premières conférences des Etats-parties en 2006 et 2008. A l'époque, en dépit de l'existence d'une disposition du règlement intérieur de cette conférence permettant à un Etat-partie de s'opposer à la présence d'une association, le gouvernement algérien n'avait pas utilisé son « droit de veto ». Ce qui ne semble pas le cas pour la conférence de Doha. Tout porte à croire que les autorités algériennes ont changé le fusil d'épaule à propos d'une association locale dont les prises de position courageuses sur le phénomène de la corruption en Algérie agacent les autorités. « Le pouvoir, qui apparaît dans sa véritable nature autoritaire et liberticide, n'a pas craint de se ridiculiser et de se décrédibiliser davantage, confirmant son aversion pour la société civile et son manque de volonté politique à lutter contre la corruption », souligne M. Hadjadj. Il reste convaincu que ce revirement de la position des Nations unies « est, à proprement parlé, scandaleux et unique dans les annales onusiennes, d'autant plus que l'AACC fait partie des ONG accréditées auprès des Nations unies à Vienne, avec un statut d'observateur ». Ceci étant, l'AACC, craignant une exacerbation des « représailles » de la part des autorités algériennes, invite ses membres et ses sympathisants à la vigilance. « Après avoir "toléré" l'AACC, le pouvoir est en train de l'interdire de fait, confirmant son implication – par ses différentes officines, sbires et hommes de main interposés – dans les agressions, intimidations, harcèlements et les multiples pressions que l'AACC subit depuis plusieurs années », avertit l'AACC dans son communiqué. Par ailleurs, M. Hadjadj prédit l'« échec » de la rencontre de Doha en raison de la « farouche détermination d'un certain nombre d'Etats-parties – à leur tête les gouvernements algérien, égyptien et pakistanais – qui s'opposent à l'adoption de mécanismes de suivi et à l'implication de la société civile ». Dans le cas de l'Algérie, le porte-parole de l'AACC rappelle que le gouvernement, en « allant jusqu'à s'opposer frontalement à la mise en place au sein des Nations unies de mécanismes internationaux de suivi de l'application de cette convention », est en train de « dératifier » la Convention des Nations unies contre la corruption.