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Publié dans El Watan le 15 - 06 - 2013


De notre envoyé spécial
Etrange pour une ville nichée en bordure de cette Méditerranée qui a façonné son histoire multimillénaire. Mieux encore, outre «ce territoire libéré» sur la mer, comme le dit son architecte, Rudy Ricciotti (associé à Roland Carta), le Mucem devient un lieu de rencontres inédit dans la cité phocéenne, ouvert sur l'horizon maritime. Cet endroit manquait peut-être en cette ville de brassage des populations, unique en France ? Tant d'origines diverses peuplent cette ville ouverte à tous les vents de l'histoire. C'est de la mer que tout part et que tout arrive. A Marseille, parce qu'on est porté par la vague, on est d'abord Marseillais avant d'être de quelque part.
Le vieux port est resté longtemps la dernière limite de partage avant de se refermer sur lui-même, coquillage qu'on écoute pour entendre le souffle marin. Pour voir la mer, il fallait grimper un peu, vers Notre-Dame de la Garde ou les hauts quartiers. Cette absence relative de perspective maritime, contrairement à Alger où la mer est visible de partout, le Mucem l'offre désormais sans pudeur à Marseille, avec son accès facilité par une passerelle qui joint le quartier du Panier au fort Saint-Jean.
Jusque-là, la forteresse était inaccessible aux Marseillais et aux centaines de milliers de visiteurs. Cet antique casernement devient aujourd'hui en quelque sorte le nouveau bout de la terre, la fin de la terre, ou finistère comme disent les Bretons. De là, on prend la mer en plein visage ! Une autre passerelle nous amène vers le Mucem dont on fait librement le tour, émerveillés de voir de partout le lointain maritime. Après, chacun est maître de son choix. On peut rêver face à la Méditerranée retrouvée ou pénétrer dans ce splendide bâtiment qui offrira des expositions régulières.
L'aspect carré du Mucem et sa couleur noire nous font penser, la journée, à la Kaâba. La nuit, le bâtiment s'éclaire d'une lumière bleutée qui accueille de loin les paquebots.Pour Marseille, ce sera comme un phare qui tranchera la voûte nocturne et donnera une nouvelle identité à la capitale régionale. Mais, au-delà de la ville, le musée se veut une ouverture sur l'autre, tous les autres. C'est ce que dit son président, Bruno Suzzarelli : «Le musée veut traiter des problématiques à l'œuvre de part et d'autre de la Méditerranée, mais qui le sont également dans l'Europe non méditerranéenne, car celle-ci est concernée par ce qui se joue en Méditerranée.»
Pour Michaël Mohamed, chargé de la communication internationale au Mucem, il est question «d'inviter l'ensemble des regards sur la Méditerranée, ou sur les Méditerranée finalement». Il ajoute : «Le point de vue d'un Barcelonais, d'un Algérois, d'un Niçois ou bien sûr, d'un Marseillais, peuvent être différents et partagés. A chaque fois qu'on va initier une action, on va se demander quelle réciprocité est envisageable.» Ainsi, explique-t-il, sur chaque programme, «nous allons consulter des commissaires étrangers, des experts de l'extérieur de l'Hexagone, des spécialistes internationaux de tous les domaines artistiques.»
Par ailleurs, il nous faut être en relation avec l'ensemble des structures des pays et donner la parole à d'autres horizons. Le partage des expertises sera une constante pour le Mucem, jusque dans le cadre d'un centre de formation aux métiers méditerranéens du patrimoine qui sera ouvert à tous les partenaires qui y feront appel. Nous avons un programme de bourses d'accompagnement. Le partenariat, c'est aussi le partage des œuvres.»
Pour l'ouverture, dans le dédale des nombreuses présentations artistiques, dont la galerie permanente de la Méditerranée, nous nous sommes intéressés à l'exposition «Le noir et le bleu, un rêve méditerranéen», que le commissaire, Thierry Fabre, également directeur du développement culturel et des relations internationales du musée, était venu présenter en mars dernier à Alger, soulignant qu'elle met en scène «des fragments qui ont du sens». Pour lui, «ce qu'on veut, c'est déconstruire le regard, donner à entendre que l'histoire n'est pas celle qu'on connaît, ou qu'on a voulu nous faire connaître».
Ce que confirme la commissaire associée, Anissa Bouayed, chargée en 2008 de l'exposition inaugurale du MaMa d'Alger sur les artistes et la Révolution. Pour elle, il s'agit de «sortir du regard euro-centré», de parler de «civilisations au pluriel», de «retrouver un équilibre» car «les savoirs ne sont pas allés dans un seul sens, ils se sont propagés autour de la Méditerranée, cela a du sens de le dire haut et fort dans Marseille, ville cosmopolite où le brassage se prête à la diversité». Elle précise que l'idée de base de l'exposition est de s'éloigner de l'orientalisme dominant en France dans la façon de représenter l'histoire des relations entre les deux rives, ajoutant : «On a cherché à creuser les choses, savoir comment les sociétés égyptienne ou algérienne, par exemple, ont été confrontées au discours des Européens, en faisant un travail historique face au rêve européen de domination. Par exemple, face au discours de Bonaparte en Egypte, qui dit : je viens vous libérer des mamelouks, je respecte le Coran et je suis aussi musulman que vous, il y a cette image où il pénètre dans la mosquée Al Azhar avec son cheval.»
En effet, le tableau d'un artiste de la conquête immortalise ce geste qui vient casser les belles déclarations. Anissa Bouyad souligne le déséquilibre : «L'Algérie ou l'Egypte ne sont pas des sociétés qui vont valoriser l'événement à travers une peinture d'histoire. L'art visuel est décoratif, d'inspiration calligraphique, mais il n'est pas fait pour montrer un événement comme le fait traditionnellement la peinture européenne. Ainsi comment voir la manière dont a été appréhendée l'arrivée coloniale française en Algérie ?»
Les documents existent, parfois dérisoires, mais font le contrepoint qui force le visiteur à réfléchir. A une gravure d'époque montrant les enfumages d'Algériens dans une grotte par l'officier Pélissier, ou un tableau du débarquement français à Sidi Fredj en 1830, la simple représentation sur trois mètres du cercle de l'organisation de la Smala de l'Emir Abdelkader ou encore un livre mystique de celui-ci remettent en place l'équilibre.
La poésie a une place importante pour exprimer l'effondrement d'Alger et l'idée de lutte contre l'envahisseur. Anissa Bouayed explique : «On a valorisé l'écrit de Hamdan Khodja, notable d'Alger en 1830, qui va dire aux Français vous êtes en train de faire en Algérie ce que vous ne devrez pas faire au nom de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Vous êtes en train d'opprimer un peuple au nom de la civilisation. On a essayé d'aller au plus près des écrits, textes et images de cette époque-là, quand on en avait. Quand on est vaincu, on ne va pas faire des représentations iconographiques alors que les œuvres picturales occidentales, comme celles d'Horace Vernet, sont de grandes machines historiques. Il n'y a pas d'équivalent, mais il y a des images mentales qui se sont forgées sur la confrontation et elles sont toujours présentes, comme dans l'œuvre de Mohamed Temmam, très jeune en 1933 – il avait 18 ans – lorsqu'il peint un tableau où Napoléon III vient rendre visite à l'Emir Abdelkader au château d'Amboise, les mettant à égalité en les transférant dans un palais algérois. Dans la partie sonore, j'ai mis une complainte d'un cheikh qui se désole de la perte d'Alger et des poèmes kabyles à la gloire de lalla Fatma N'Soumeur, résistante dont l'orientaliste Massignon dit qu'elle est la sœur kabyle de Jeanne d'Arc. Nous avons tracé des jalons de la mémoire algérienne.»
A signaler aussi des tableaux de Baya (de la galerie Maeght) illustrés de poèmes de Jean Sénac, deux œuvres gigantesques d'Amar Bouras montées à partir de milliers de photos prises pendant les années noires du terrorisme et un montage d'images transcrivant une photographie du président Boudiaf. Enfin, une œuvre picturale de Zinedine Bessaï. Koraïchi est aussi présent avec une calligraphie et des manuscrits de son ami Mahmoud Darwich qu'il a prêtés pour l'expo. Enfin, des peintures et poèmes d'Abdallah Belanteur. L'Algérie est donc bien présente, comme d'ailleurs au fort Saint-Jean au travers d'une œuvre-vidéo de Stéphane Couturier disséquant la grande cité d'Alger dans l'expo «Les choses de ce côté du monde».
A signaler que le grand auditorium, nœud gordien de l'activité, a été baptisé du nom de Germaine Tillon, ethnologue, dont une partie de la vie est intimement liée à l'Algérie, notamment durant la guerre. Pour Thierry Fabre, «c'est un symbole». Il ajoute que la mémoire d'Albert Camus sera honorée en juillet, toujours dans le cadre de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture. L'hommage prévu à Aix-en-Provence avait été annulé, après des démêlés autour du choix de Benjamin Stora comme organisateur. On avait opté pour le philosophe, Michel Onfray, auteur d'un livre sur l'écrivain. Mais, finalement, devant le tollé, il avait annulé la partie. Le Mucem, là aussi, remet les pendules à l'heure.


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