Expulsées depuis novembre 2012, deux familles vivotent dans des conditions inhumaines. Entassées dans deux tentes de fortune au 3, rue Colonel El Haoues, dans une cité située au cœur de Sétif, neuf personnes dont deux bébés de 3 et 18 mois, ne savent à quel saint se vouer. En cet hiver sibérien où le thermomètre descend au-dessous du zéro dès la tombée de la nuit, les personnes vulnérables se chauffent au gaz butane. Les trois autres enfants âgés entre 3 et 5 ans, souffrent quant à eux le martyre. Expulsées d'une maison où elles vivaient depuis les années 1970, les deux familles qui ont frappé à toutes les portes ne voient rien venir. En plus des conditions de vie impossibles, le silence radio des responsables, des élus en particulier, fait mal à ces vulnérables citoyens qui souffrent en silence. «Après notre expulsion, des membres de la commission d'attribution de logement sont venus nous voir à deux reprises. Puis, plus rien par la suite. Nous profitons de la visite à El Watan pour interpeller le wali afin qu'il vienne nous rendre visite et voir dans quelles conditions vivent deux petites familles pataugeant dans le dénuement total. Nous espérons que cet appel ou plutôt ce cri de détresse sera entendu par le premier responsable de la wilaya, prié de prendre en charge notre dossier», diront, non sans une forte dose de déprime, Riadh Z. et Aissa M., ne percevant mensuellement, chacun pas plus de 18 000DA, allocations familiales incluses. Contacté par téléphone, un responsable au fait du dossier a bien voulu nous parler sous couvert de l'anonymat : «Malheureusement la situation regrettable des deux familles de Langar n'est pas un cas isolé, sept autres familles se trouvent dans la même situation aux 1006 Logements, à l'école Bella, à la cité Yahiaoui et aux 1000 Logements. Une veuve avec deux enfants et un fils de chahid font partie de ces expulsés. Bien ficelé, un dossier a été transmis à temps au wali. Nous ne pouvons faire plus pour ces familles très éprouvées.» D'un autre côté, des centaines de familles de la capitale des Hauts-Plateaux où aucune distribution de logement public à caractère locatif (LPL) n'a été effectuée depuis des lustres, grincent des dents. Partageant de minuscules surfaces, de nombreuses familles crient leur malheur : «Je partage avec ma grande famille qui se compose de 15 personnes, un petit F 3 qui nous a été attribué en 1988. L'intimité de mes parents, ma sœur et mes trois frères dont un est marié avec ses trois enfants, a perdu ses vertus et valeurs», dénonce Zinedine, des 500 Logements (ferraille). Ce père de trois enfant enfonce le clou : «Mon rêve est de bénéficier d'un appartement décent où je pourrais vivre tranquillement avec ma petite famille. J'ai déposé une demande de logement en 1999. Celle-ci reste sans écho. En 2011, une première commission d'enquête est venue constater les conditions de vie de ma famille. Une autre commission est venue pour me dire que je n'ai pas le droit de bénéficier d'un logement social puisque ma paye est de 25 000 DA. Comme tout le monde sait, un tel salaire ne me permet pas d'acheter ou de louer une maison. Nous avons le sentiment d'être des citoyens de seconde catégorie, pour lesquels toutes les portes restent fermées. Ni les responsables de la wilaya, ni ceux de la daïra et de la commune n'ont daigné donner suite à nos moult doléances.» Notons, à toutes fins utiles, que les deux frères célibataires qui ne peuvent fonder de foyer pour les mêmes motifs, passent leur journée à l'extérieur de l'étroit toit ; ils ne rentrent que tard la nuit, et ce, pour occuper une place au salon : leur chambre à coucher, celle de leurs parents et de la sœur aînée.